7 Juillet 2025
Jane Misme (1865–1935) est l’une des figures centrales du féminisme réformiste français du début du XXe siècle. Journaliste chevronnée, animatrice d’un hebdomadaire féministe influent, militante engagée dans les organisations suffragistes, elle incarne un féminisme soucieux de dialogue, de réforme progressive et d’actions concrètes.
Avant de fonder son propre journal, Jane Misme se fait remarquer dans plusieurs titres majeurs et débute comme critique théâtrale, puis collabore au Figaro et au Temps, deux journaux renommés de la presse parisienne, enfin elle rejoint également La Fronde, journal féministe fondé par Marguerite Durand, ce qui lui permet d’affiner son approche militante. Cette trajectoire journalistique l’immunise contre le mépris réservé aux femmes de presse et lui offre une grande maîtrise des outils de communication. Misme défend une presse féminine responsable, accessible et sérieuse, loin des caricatures habituelles. En 1906, Jane Misme fonde La Française, hebdomadaire du progrès féminin, qu’elle dirigera jusqu’en 1924. C'est un hebdomadaire féministe ouvert et fédérateur qui couvre tous les sujets de l’actualité politique, sociale et culturelle, sans se cantonner à un féminisme cloisonné. Bien qu’écrit principalement par des femmes, La Française n’exclut pas les hommes, misant sur un dialogue républicain et respectueux et il devient rapidement l’organe de presse officiel du Conseil national des femmes françaises (CNFF), et un lieu de diffusion d’idées, de débats et de propositions législatives.
Membre du comité exécutif de l’Union française pour le suffrage des femmes, elle milite pour le droit de vote des femmes, en insistant sur leur aptitude à exercer des responsabilités civiques. Elle participe activement au Conseil national des femmes françaises, où elle œuvre à coordonner les efforts militants, établir des priorités et négocier avec les pouvoirs publics.
Son féminisme repose sur une idée forte qui consiste à faire entrer les femmes dans la République, par la loi, la presse et l’instruction. Contrairement aux féminismes plus radicaux de l’époque, Jane Misme incarne un féminisme pragmatique, c'est-à-dire réformiste mais résolu, attaché à 1°) l’éducation des filles, comme outil d’émancipation durable, 2°) la représentation parlementaire, fondée sur le mérite et la compétence, 3°) l’évolution par le droit, sans confrontation directe avec les institutions. Sa posture attire une large adhésion, tout en suscitant parfois des critiques pour son modérantisme. Pourtant, elle contribue à structurer les avancées concrètes, là où d’autres militants restent en marge des négociations politiques. Jane Misme est une artisanne de l’émancipation féminine par les mots, les idées et la stratégie. Grâce à La Française, elle a offert aux femmes un espace public d’expression et de réflexion, tout en façonnant les contours d’un féminisme légaliste et progressiste. Une figure à revaloriser, entre presse, suffrage et diplomatie féminine.