LA SAGESSE | Par-delà les systèmes clos et ouverts, transcendance et immanence
Condensé des précédents articles sur les systèmes clos et ouverts (c'est-à-dire transcendance et
immanence ou encore pensée du Pli ou de la stupeur et pensée du Dépli ou de la clâmeur). Paris8philo
Il faut savoir éviter aujourd’hui les écueils métaphysiques des pensées de la stupeur de l’être (toute la philosophie du jugement, Sartre, Althusser, Badiou, Rancière qui n’en est pas loin, tous ces idéalistes matérialistes) et de la clameur de l’être (Simondon, Deleuze sans Guattari, Gilles Châtelet, François Zourabichvili, Ivan Lapeyroux). Le non-être du négatif d’une part et le non-être du problématique d’autre part. Pour les premiers la vie est négative, condamnable comme une pourrissement, pour les seconds la vie, sa plus infime manifestation, est problématique, comme un poussement infime qu’il faut accompagner, cela ne peut faire que penser à Socrate, qui le jour de son suicide devait un coq au dieu de la médecine Asclépios : à lui déjà la vie apparaissait comme un problème.
Ces derniers, Deleuze et ses disciples, pour qui la vie est problématique, n’ont pas hésité, dès qu’ils posaient le virtuel comme un « en-soi » et que leur vie actuelle était trop douloureuse n ‘ont pas hésités à rejoindre ce « virtuel en soi et plein de promesses » par le geste du suicide. C’est qu’à force d’être un grand voyant et de voir la vie partout même dans ses formes les plus minables, les plus décatis, on n'a plus la force d’agir. L’envie de rejoindre le virtuel — ce Dedans, cette mémoire absolue — est trop forte. Mais il est sûr que quelque chose d’une tonalité affective que l’on nomme événement, communique avec les stoïciens. C’est dans ses plus grandes crises pulmonaires que Deleuze se mettait à parler des stoïciens, mais ussi de grâce de l’événement, de clameur de l’être, de virtuel et de leur manière d’envisager la mort — plutôt que de rejoindre la santé par un effort impossible. C’est que la vie était condamnée, non par un jugement, mais petit à petit, la vie comme étouffement, épuisement. Le recours à la création était salutaire dans ces moments-là, mais combien d’esprit de vengeance avons-nous avalé sous la forme de l’être ou de l’événement : « Dans tous mes livres j’ai cherché la nature de l’événement, c’est un concept philosophique, le seul capable de destituer le verbe être et l’attribut » (DzP_194). Il suffisait de poser le mouvement comme un état et non un processus, plutôt que de faire du style « le mouvement du concept », encore teinté de procès et d’avocats (les fameux intercesseurs) dédiés à la vie. Fuir la justice, combattre son arraisonnement. On est loin de cette vie qui va plus vite que la pensée écrite dans Mille-Plateaux par nos Zarathoustra français.
C’est cela qui arrive par moments, un éloge de la vie impuissante et le plus machinalement du monde c’est là que rebondissent les philosophes de la stupeur de l’être, du crépuscule de la vie plutôt que d’y être indifférent : la vie doit alors se faire digne ou elle n'est que survie. Monter le vide en épingle, faire du bruit de rien, tout faire pour que la crise advienne et qu’un nouvel ordre apparaisse. C’est qu’il faut accuser la vie comme variation de haut et de bas, la condamner comme un survie, prétendre mener une vie digne et bonne, au sein de l’institution. Faire oublier que l’on serait de grands malades hors de l’institution. La vie bonne du sujet au sein de l’institution contre l’inépuisable production des choses singulières. La subjectivité contre la singularité. Les penseurs d’institution ont tôt de qualifiés les vie des penseurs dits « privés » d’égoïste et de douteuse (Héraclite, Empédocle, Anaxagore, Spinoza, Schopenhauer, Nietzsche…) et de montrer la voie de l’audace et de se présenter comme un modèle. Parlant de l'Ecole Normale Supérieure, « je me sens dans cette institution comme dans ma demeure » disait Badiou, (le 11/06/08). Indispensable Badiou, qui sous une pensée « crépusculaire », selon son mot, transforme ce qu’il touche en corruption, notre époque ou plutôt la précédente en a fait les frais. Vivre sa vie comme un œuvre d’art qui est déjà dans un musée depuis l’enfance, telle est la stupeur de l’être de tous nos « philosophes » normaliens. On a très vite oublié que c’est l’institution qui fait l’homme bon, l’homme aux affects et aux passions plus qu’apprivoisées et calfeutrées par la raison. Qu’en est-il des affects, ce thumos chez Platon, cette « tierce part de l’âme » que nos platoniciens ont tôt fait de balayer d’un geste de revers, alors que l’affect premier pour eux est la stupeur ? Dans le détachement de la vie que génère la stupeur face au monde, efface-t-elle à ce point tous les autres affects ?
Il y a donc eu deux manières d'envisager la philosophie dans notre période contemporaine, comme deux manières plus ou moins ouvertes de se laisser affecter. Transcendance et Immanence, si l'on veut caricaturer. Cela se retrouva aussi dans le creuset qu'est Paris 8, d'un côté ceux qui voient la vie comme une corruption (Badiou, Zizek, Medhi Belaj Kacem, Rémy Bac, etc... les idéalistes matérialistes), nommons-les les incorruptibles et ce qui cherchent à tout l'innocence du devenir au travers du virtuel (Deleuze, Gilles Châtelet, François Zourabichvili, Yvan Lapeyroux, etc...), nommons les innocents. L'idée étant venu de cette présentation de l'éloge de la corruption (les incorruptibles passionnés) que vous retrouverez en cliquant ici. Ceci correspond aux deux courants de pensée qui proviennent pour l'un de la Stupeur de l'Etre et de l'autre de la clameur de l'Etre. Viendraient ensuite les probes et les prodigues (comme se qualifiait Nietzsche) de la complexité. Nos incorruptibles et nos innocents sont des métaphysiciens (de l'infini actuel ou Liberté absolue pour les premiers et du virtuel ou de l'Un-Tout pour les seconds). La complexité qui est un dépassement de la réalité physique pourrait être vue comme une métaphysique (car dépassement de la Nature ou physis) mais, rappelons-le, elle est avant tout un dépassement de la physique envisagée par la métaphysique grecque.
La complexité est un dépassement de la réalité physique dite classique. Elle pourrait être vue comme une métaphysique parce qu'elle est un dépassement de la Nature (physis chez les Grecs) mais elle est surtout un dépassement de la physique envisagée par la métaphysique Grecque. Certains audacieux, qui assumaient de franchir les limites kantiennes fixées à l’expérience, ont expérimenté le comportement de la lumière et ont vu qu’elle possédait ses propres « lois », un peu comme l’éruption d’un volcan, parlons alors d’autonomie. D’autres plus opportunistes encore ont vu que l’on pouvait accolé de l’information quand on faisait intervenir la lumière sur une impureté cristalline : libérant ainsi un électron en état quantique, sur lequel on indexera l’information, d’abord binaire (bit) puis quantique (q-bit). De là est née la complexité : c’est-à-dire le fait d’indexer de l’information sur de l’énergie. C’est ce qui a permis les sociétés de contrôle avec leur secret (cryptage) et leur codes (mot de passe). Nous sortions alors de la réalité des sociétés disciplinaires dont il reste des résidus qui fonction par mis au secret (enfermement) et mot d’ordre (discipline). Nous pouvons envisager que le basculement de la réalité de notre monde dans la complexité ne sera jamais totale, contrairement à ce que pensait Baudrillard : il y aura toujours du quotidien, de la banalité comme dimensions sans importance et donc irréductibles. Il y aura certainement des sacrifices mais ils seront soit consentis par l'audace ou une nécessité assumée soit imposés par une coercition (contrôle étatique et policier ou désastre du tribunal de l'égalité à la Badiou), les innocents, eux, resteront impuissants et se suicideront gaiement à la manière d'hérétique se jetant en chantant dans les bûchés de l'Inquisition.
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SYSTEMES CLOS ET SYSTEMES OUVERTS
Nous ne venons d'employer ici que ce que Deleuze appelle autrement pensée du Pli et pensée du Dépli, qui sont très exactement des systèmes clos et ouverts. Si nous avions parlé en termes bien abstraits de Stupeur de l'être et de Clâmeur de l'être, c'est que la philosophie contrairement à la sagesse reste prisonnière des systèmes. Badiou d'une part et Deleuze d'autre part n'échappe pas à la règle qu'ils se sont donné dès le début. Pourquoi n'ont il pas voulu d'une sagesse qui rompt avec tout système, pourquoi furent-ils les philosophes les plus institutionnels qui soient ? Il s'agissait comme le remarque lui-même Deleuze au fond de rester protégé plutôt que de se jeter comme les sages dans la vie et de pousuivre une oeuvre métaphysique qui consiste au final à reconduire des systèmes. Deleuze ne se cachait pas de produire un système de l'Ouvert ou du Dépli. En quelques mots « un système ouvert c'est quand les concepts sont rapportés à des circonstances et non plus à des essences », dans le second cas, le système est fermé, partant d'une hypothèse pour en retrouver le principe. Rappelons que Deleuze croit « à la philosophie comme système. C’est la notion de système qui me déplaît quand on la rapporte aux coordonnées de l’Identique, du Semblable et de l’Analogue. C’est Leibniz, je crois, qui le premier identifie système et philosophie. … Pour le système ne doit pas seulement être en perpétuelle hétérogénéité, il doit être une hétérogenèse, ce qui me semble n’a jamais été tenté » (Deleuze in Deux régimes de fous..., DzRF_338). « Un système c'est un ensemble de concepts / En fait les systèmes n'ont précisément rien perdu de leur force vives. Il y a aujourd'hui, dans les sciences ou en logique, tout le début d'une théorie des systèmes dits ouverts, fondés sur les interactions, et qui répudient seulement les causalités linéaires et transforment la notion de temps ... Un système ouvert c'est quand les concepts sont rapportés à des circonstances et non plus à des essences » (Deleuze, Pourparlers, DzP_48). Ceci pour les systèmes ouverts, qui posent une variation, une modulation, une élévation à l'infini de la substance, de quelque chose qui serait permanent. Même ouvert, un système appartient au tournant scientifique (ou épistémique) de la pensée, à ce moment particulier où la philosophie s'est arrogée la pensée du sage, pour l'amoindrir une pensée qui traite du commun comme Platon dans la République. C'est le passage de l'énigmatique au systématique. Alors que l'une des particularités de la pensée du sage est qu'elle n'est pas pousser à communiquer, à professer. Comme le remarque Deleuze : « Nous ne souffrons pas d’incommunication, mais au contraire de toutes les forces qui nous obligent à nous exprimer quand nous n’avons pas grand chose à dire » (DzP_188).
Ce qui se produit donc avec Badiou, l'archevêque de l'émancipation, Saint-Paul de l'infini actuel, celui qui reprend à son compte cette pensée du commun(-isme), c'est que sous couvert d'une égalité déclarée qui vise un absolu inatteignable (pléonasme) à savoir le Dieu-Liberté. Il se trouve que précvisément il respecte les énoncés de Platon, qu'il est allé avec sa grande lenteur de l'hypothèse au principe anhypothétique, de la l'égalité à la liberté. Pour montrer la clôture de Badiou, il suffit de voir en quoi, il reconduit le système communautaire ou de castre énoncé par Platon lui, le Sujet, appelant ses adeptes à mener une « vie bonne » comme lui, bref à porter un jugement de stupeur sur la vie, à se détacher de son mouvement. Pensée du commun veut simplement dire que notre cerveau n'opère plus de nouveau frayage, n'est plus stimmuler en vue d'un effort, d'une action et que l'on reste aux vielles habitudes, aux pulsions instinctives incorporées comme des vérités éternelles et qui sous la forme d'une morale commune dicte notre conduite. Pour Platon, si avoir en vue c'est faire, il suffit que la liberté soit aperçue pour qu'elle soit effective comme absolu, comme Badiou baignant plein de vanité en ce moment au milieu de son système. Très tôt déjà il affirmait qu'il n'y avait pas de nouveauté en philosophie. Disons que la nouveauté n'a pas lieu mais constitue une donnée importante . Badiou est dans un système qu'il nomme « parcours à l'envers », « trajet point par point » et qui consiste à « platoniser en paix », c'est-à-dire produire patiemment une métaphysique close. Nous avons donc là bien un système qui , les problèmes d'asservissement surgissent donc quand on veut passer à l'endroit tout bonnement, mettre en application ces idées transcendantes, qui ne sont là que pour empêcher tout effort, toute action autre que « morale ». L'envers de cet envers, ou plutôt l'endroit concert de cela, c'est que l'on tombe dans un système régi par un tribunal de l'égalité, ou en quelque sorte chacun est renvoyé par rapport à ses propres choix par rapport au système que Badiou met en place. C'est qu'il existe pas d'action morale, pas plus qu'il n'existe de phénomènes moraux, il n'y a qu'un jugement moral porté sur les actoin ou la réalité (admise de manière plus ou moins complexe). On est bien renvoyé à un système de jugement, un système qui tend à se fermer et à devenir crépusculaire parce que asservi à des Idoles, des Idées. ¨Pensez à toute la thématique chrétienne dont ne parvient à se dépétrer Badiou. Ce parcours symbolique est anticipable n'amènera rien sinon des malentendus quand certains chercheront à mettre en pratique tout ces illusions symboliques d'un vieux penseur de plus de 55 ans, qui au fond nous parle de sa vie « digne » mais ennuyeuse. C'est certainement cela qu'il faut faire avec Badiou ne pas détacher le discours de celui qui l'a énoncé, car l'effet inverse produit des vérité bien ennuyeuse pour notre avenir : « la vérité s'oirigine d'une disparition », celle du sujet qui l'énonce. Le seul échappatoire à ce retour au même et à cette variation du même est aussi entrevue par Deleuze, comme étant une Pensée du Surpli ou du Dehors. Elle consiste tout bonnement à sortir de la pensée en système : c'est la critique et la satire de Nietzsche, ce sont les prétendus « paradoxes » ou énigmes d'Héraclite, qui ne sont là que pour pousser à l'audace et à l'action, donc au final à la lutte et au combat contrairement à Badiou qui arrivera toujours après-coup pour interpréter de manière crépusculaire et Deleuze qui sera dans une attitude de fuite active, d'évitement mais qui au fond n'amène pas à s'intéresser plus au corps et à sa transformation (gymnasitque, arts martiaux) qui conditionne autrement la pensée que vers la dimension du suicide à force d'avoir trop épier le virtuel.
IIl y a, comme l'affirme Friedrich Nietzsche in Par-delà Beni et Mal ou Henri Laborit in Biologie et structure, nécessité d'une grande synthèse. En effet si un individu qui lit 5 heures par jour, le faisait toute sa vie il ne parviendrait à dépassé les 25.000 ouvrages, ce qui est peu en comparaison des millions d'ouvrages que l'humanité a produits. Si on avait une vision synthétique de l'époque on passerai plus vite à l'action plutôt que de trouver dans la philosophie — comme quête métaphysique de la vérité — un prétexte à l'inaction, à la contemplation. Si la philosophie comme art du jugement peut-être rapprochée de la science à la quelle elle a donné une origine, c'est que toute deux repose sur un principe de moindre action. Au fond Les philosophes sont attachés aux systèmes que ceux-ci soient les institutions qui les abritaient ou les différentes manières d'articuler des concepts entre eux. La stupeur de l'être est tout simplement une expression bien compliquée pour parler de l'étonnement face à ce qui est, face au monde et du détachement que cela occasionne ou plutôt du détachement par rapport à la vie qui a conduit à cette angoisse plus qu'à un émerveillement. Si l'on s'émerveille alors qu'on est détaché c'est qu'il y a illusion. La Clameur de l'être n'est que la perpétuation d'un même mode de variation, une système qui ne vise que sa propre survie, il n'y a là aucun dépassement, sinon l'idée de poser un logique du multiple. Mais c'est par-delà les notions abstraite de l'Un et du multiple que se joue la sagesse. Vient un moment où il faut se donner les moyens d'agir, c'est là l'aspect le plus déraisonnable de la sagesse. Les philosophes ont interprété les monde, il nous revient face à son bouleversement d'en modifier notre approche, car ce sont les disciplines créatrices qui l'ont transformé…
Il faut savoir éviter aujourd’hui les écueils métaphysiques des pensées de la stupeur de l’être (toute la philosophie du jugement, Sartre, Althusser, Badiou, Rancière qui n’en est pas loin, tous ces idéalistes matérialistes) et de la clameur de l’être (Simondon, Deleuze sans Guattari, Gilles Châtelet, François Zourabichvili, Ivan Lapeyroux). Le non-être du négatif d’une part et le non-être du problématique d’autre part. Pour les premiers la vie est négative, condamnable comme une pourrissement, pour les seconds la vie, sa plus infime manifestation, est problématique, comme un poussement infime qu’il faut accompagner, cela ne peut faire que penser à Socrate, qui le jour de son suicide devait un coq au dieu de la médecine Asclépios : à lui déjà la vie apparaissait comme un problème.
Ces derniers, Deleuze et ses disciples, pour qui la vie est problématique, n’ont pas hésité, dès qu’ils posaient le virtuel comme un « en-soi » et que leur vie actuelle était trop douloureuse n ‘ont pas hésités à rejoindre ce « virtuel en soi et plein de promesses » par le geste du suicide. C’est qu’à force d’être un grand voyant et de voir la vie partout même dans ses formes les plus minables, les plus décatis, on n'a plus la force d’agir. L’envie de rejoindre le virtuel — ce Dedans, cette mémoire absolue — est trop forte. Mais il est sûr que quelque chose d’une tonalité affective que l’on nomme événement, communique avec les stoïciens. C’est dans ses plus grandes crises pulmonaires que Deleuze se mettait à parler des stoïciens, mais ussi de grâce de l’événement, de clameur de l’être, de virtuel et de leur manière d’envisager la mort — plutôt que de rejoindre la santé par un effort impossible. C’est que la vie était condamnée, non par un jugement, mais petit à petit, la vie comme étouffement, épuisement. Le recours à la création était salutaire dans ces moments-là, mais combien d’esprit de vengeance avons-nous avalé sous la forme de l’être ou de l’événement : « Dans tous mes livres j’ai cherché la nature de l’événement, c’est un concept philosophique, le seul capable de destituer le verbe être et l’attribut » (DzP_194). Il suffisait de poser le mouvement comme un état et non un processus, plutôt que de faire du style « le mouvement du concept », encore teinté de procès et d’avocats (les fameux intercesseurs) dédiés à la vie. Fuir la justice, combattre son arraisonnement. On est loin de cette vie qui va plus vite que la pensée écrite dans Mille-Plateaux par nos Zarathoustra français.
C’est cela qui arrive par moments, un éloge de la vie impuissante et le plus machinalement du monde c’est là que rebondissent les philosophes de la stupeur de l’être, du crépuscule de la vie plutôt que d’y être indifférent : la vie doit alors se faire digne ou elle n'est que survie. Monter le vide en épingle, faire du bruit de rien, tout faire pour que la crise advienne et qu’un nouvel ordre apparaisse. C’est qu’il faut accuser la vie comme variation de haut et de bas, la condamner comme un survie, prétendre mener une vie digne et bonne, au sein de l’institution. Faire oublier que l’on serait de grands malades hors de l’institution. La vie bonne du sujet au sein de l’institution contre l’inépuisable production des choses singulières. La subjectivité contre la singularité. Les penseurs d’institution ont tôt de qualifiés les vie des penseurs dits « privés » d’égoïste et de douteuse (Héraclite, Empédocle, Anaxagore, Spinoza, Schopenhauer, Nietzsche…) et de montrer la voie de l’audace et de se présenter comme un modèle. Parlant de l'Ecole Normale Supérieure, « je me sens dans cette institution comme dans ma demeure » disait Badiou, (le 11/06/08). Indispensable Badiou, qui sous une pensée « crépusculaire », selon son mot, transforme ce qu’il touche en corruption, notre époque ou plutôt la précédente en a fait les frais. Vivre sa vie comme un œuvre d’art qui est déjà dans un musée depuis l’enfance, telle est la stupeur de l’être de tous nos « philosophes » normaliens. On a très vite oublié que c’est l’institution qui fait l’homme bon, l’homme aux affects et aux passions plus qu’apprivoisées et calfeutrées par la raison. Qu’en est-il des affects, ce thumos chez Platon, cette « tierce part de l’âme » que nos platoniciens ont tôt fait de balayer d’un geste de revers, alors que l’affect premier pour eux est la stupeur ? Dans le détachement de la vie que génère la stupeur face au monde, efface-t-elle à ce point tous les autres affects ?
Il y a donc eu deux manières d'envisager la philosophie dans notre période contemporaine, comme deux manières plus ou moins ouvertes de se laisser affecter. Transcendance et Immanence, si l'on veut caricaturer. Cela se retrouva aussi dans le creuset qu'est Paris 8, d'un côté ceux qui voient la vie comme une corruption (Badiou, Zizek, Medhi Belaj Kacem, Rémy Bac, etc... les idéalistes matérialistes), nommons-les les incorruptibles et ce qui cherchent à tout l'innocence du devenir au travers du virtuel (Deleuze, Gilles Châtelet, François Zourabichvili, Yvan Lapeyroux, etc...), nommons les innocents. L'idée étant venu de cette présentation de l'éloge de la corruption (les incorruptibles passionnés) que vous retrouverez en cliquant ici. Ceci correspond aux deux courants de pensée qui proviennent pour l'un de la Stupeur de l'Etre et de l'autre de la clameur de l'Etre. Viendraient ensuite les probes et les prodigues (comme se qualifiait Nietzsche) de la complexité. Nos incorruptibles et nos innocents sont des métaphysiciens (de l'infini actuel ou Liberté absolue pour les premiers et du virtuel ou de l'Un-Tout pour les seconds). La complexité qui est un dépassement de la réalité physique pourrait être vue comme une métaphysique (car dépassement de la Nature ou physis) mais, rappelons-le, elle est avant tout un dépassement de la physique envisagée par la métaphysique grecque.
La complexité est un dépassement de la réalité physique dite classique. Elle pourrait être vue comme une métaphysique parce qu'elle est un dépassement de la Nature (physis chez les Grecs) mais elle est surtout un dépassement de la physique envisagée par la métaphysique Grecque. Certains audacieux, qui assumaient de franchir les limites kantiennes fixées à l’expérience, ont expérimenté le comportement de la lumière et ont vu qu’elle possédait ses propres « lois », un peu comme l’éruption d’un volcan, parlons alors d’autonomie. D’autres plus opportunistes encore ont vu que l’on pouvait accolé de l’information quand on faisait intervenir la lumière sur une impureté cristalline : libérant ainsi un électron en état quantique, sur lequel on indexera l’information, d’abord binaire (bit) puis quantique (q-bit). De là est née la complexité : c’est-à-dire le fait d’indexer de l’information sur de l’énergie. C’est ce qui a permis les sociétés de contrôle avec leur secret (cryptage) et leur codes (mot de passe). Nous sortions alors de la réalité des sociétés disciplinaires dont il reste des résidus qui fonction par mis au secret (enfermement) et mot d’ordre (discipline). Nous pouvons envisager que le basculement de la réalité de notre monde dans la complexité ne sera jamais totale, contrairement à ce que pensait Baudrillard : il y aura toujours du quotidien, de la banalité comme dimensions sans importance et donc irréductibles. Il y aura certainement des sacrifices mais ils seront soit consentis par l'audace ou une nécessité assumée soit imposés par une coercition (contrôle étatique et policier ou désastre du tribunal de l'égalité à la Badiou), les innocents, eux, resteront impuissants et se suicideront gaiement à la manière d'hérétique se jetant en chantant dans les bûchés de l'Inquisition.
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SYSTEMES CLOS ET SYSTEMES OUVERTS
Nous ne venons d'employer ici que ce que Deleuze appelle autrement pensée du Pli et pensée du Dépli, qui sont très exactement des systèmes clos et ouverts. Si nous avions parlé en termes bien abstraits de Stupeur de l'être et de Clâmeur de l'être, c'est que la philosophie contrairement à la sagesse reste prisonnière des systèmes. Badiou d'une part et Deleuze d'autre part n'échappe pas à la règle qu'ils se sont donné dès le début. Pourquoi n'ont il pas voulu d'une sagesse qui rompt avec tout système, pourquoi furent-ils les philosophes les plus institutionnels qui soient ? Il s'agissait comme le remarque lui-même Deleuze au fond de rester protégé plutôt que de se jeter comme les sages dans la vie et de pousuivre une oeuvre métaphysique qui consiste au final à reconduire des systèmes. Deleuze ne se cachait pas de produire un système de l'Ouvert ou du Dépli. En quelques mots « un système ouvert c'est quand les concepts sont rapportés à des circonstances et non plus à des essences », dans le second cas, le système est fermé, partant d'une hypothèse pour en retrouver le principe. Rappelons que Deleuze croit « à la philosophie comme système. C’est la notion de système qui me déplaît quand on la rapporte aux coordonnées de l’Identique, du Semblable et de l’Analogue. C’est Leibniz, je crois, qui le premier identifie système et philosophie. … Pour le système ne doit pas seulement être en perpétuelle hétérogénéité, il doit être une hétérogenèse, ce qui me semble n’a jamais été tenté » (Deleuze in Deux régimes de fous..., DzRF_338). « Un système c'est un ensemble de concepts / En fait les systèmes n'ont précisément rien perdu de leur force vives. Il y a aujourd'hui, dans les sciences ou en logique, tout le début d'une théorie des systèmes dits ouverts, fondés sur les interactions, et qui répudient seulement les causalités linéaires et transforment la notion de temps ... Un système ouvert c'est quand les concepts sont rapportés à des circonstances et non plus à des essences » (Deleuze, Pourparlers, DzP_48). Ceci pour les systèmes ouverts, qui posent une variation, une modulation, une élévation à l'infini de la substance, de quelque chose qui serait permanent. Même ouvert, un système appartient au tournant scientifique (ou épistémique) de la pensée, à ce moment particulier où la philosophie s'est arrogée la pensée du sage, pour l'amoindrir une pensée qui traite du commun comme Platon dans la République. C'est le passage de l'énigmatique au systématique. Alors que l'une des particularités de la pensée du sage est qu'elle n'est pas pousser à communiquer, à professer. Comme le remarque Deleuze : « Nous ne souffrons pas d’incommunication, mais au contraire de toutes les forces qui nous obligent à nous exprimer quand nous n’avons pas grand chose à dire » (DzP_188).
Ce qui se produit donc avec Badiou, l'archevêque de l'émancipation, Saint-Paul de l'infini actuel, celui qui reprend à son compte cette pensée du commun(-isme), c'est que sous couvert d'une égalité déclarée qui vise un absolu inatteignable (pléonasme) à savoir le Dieu-Liberté. Il se trouve que précvisément il respecte les énoncés de Platon, qu'il est allé avec sa grande lenteur de l'hypothèse au principe anhypothétique, de la l'égalité à la liberté. Pour montrer la clôture de Badiou, il suffit de voir en quoi, il reconduit le système communautaire ou de castre énoncé par Platon lui, le Sujet, appelant ses adeptes à mener une « vie bonne » comme lui, bref à porter un jugement de stupeur sur la vie, à se détacher de son mouvement. Pensée du commun veut simplement dire que notre cerveau n'opère plus de nouveau frayage, n'est plus stimmuler en vue d'un effort, d'une action et que l'on reste aux vielles habitudes, aux pulsions instinctives incorporées comme des vérités éternelles et qui sous la forme d'une morale commune dicte notre conduite. Pour Platon, si avoir en vue c'est faire, il suffit que la liberté soit aperçue pour qu'elle soit effective comme absolu, comme Badiou baignant plein de vanité en ce moment au milieu de son système. Très tôt déjà il affirmait qu'il n'y avait pas de nouveauté en philosophie. Disons que la nouveauté n'a pas lieu mais constitue une donnée importante . Badiou est dans un système qu'il nomme « parcours à l'envers », « trajet point par point » et qui consiste à « platoniser en paix », c'est-à-dire produire patiemment une métaphysique close. Nous avons donc là bien un système qui , les problèmes d'asservissement surgissent donc quand on veut passer à l'endroit tout bonnement, mettre en application ces idées transcendantes, qui ne sont là que pour empêcher tout effort, toute action autre que « morale ». L'envers de cet envers, ou plutôt l'endroit concert de cela, c'est que l'on tombe dans un système régi par un tribunal de l'égalité, ou en quelque sorte chacun est renvoyé par rapport à ses propres choix par rapport au système que Badiou met en place. C'est qu'il existe pas d'action morale, pas plus qu'il n'existe de phénomènes moraux, il n'y a qu'un jugement moral porté sur les actoin ou la réalité (admise de manière plus ou moins complexe). On est bien renvoyé à un système de jugement, un système qui tend à se fermer et à devenir crépusculaire parce que asservi à des Idoles, des Idées. ¨Pensez à toute la thématique chrétienne dont ne parvient à se dépétrer Badiou. Ce parcours symbolique est anticipable n'amènera rien sinon des malentendus quand certains chercheront à mettre en pratique tout ces illusions symboliques d'un vieux penseur de plus de 55 ans, qui au fond nous parle de sa vie « digne » mais ennuyeuse. C'est certainement cela qu'il faut faire avec Badiou ne pas détacher le discours de celui qui l'a énoncé, car l'effet inverse produit des vérité bien ennuyeuse pour notre avenir : « la vérité s'oirigine d'une disparition », celle du sujet qui l'énonce. Le seul échappatoire à ce retour au même et à cette variation du même est aussi entrevue par Deleuze, comme étant une Pensée du Surpli ou du Dehors. Elle consiste tout bonnement à sortir de la pensée en système : c'est la critique et la satire de Nietzsche, ce sont les prétendus « paradoxes » ou énigmes d'Héraclite, qui ne sont là que pour pousser à l'audace et à l'action, donc au final à la lutte et au combat contrairement à Badiou qui arrivera toujours après-coup pour interpréter de manière crépusculaire et Deleuze qui sera dans une attitude de fuite active, d'évitement mais qui au fond n'amène pas à s'intéresser plus au corps et à sa transformation (gymnasitque, arts martiaux) qui conditionne autrement la pensée que vers la dimension du suicide à force d'avoir trop épier le virtuel.
IIl y a, comme l'affirme Friedrich Nietzsche in Par-delà Beni et Mal ou Henri Laborit in Biologie et structure, nécessité d'une grande synthèse. En effet si un individu qui lit 5 heures par jour, le faisait toute sa vie il ne parviendrait à dépassé les 25.000 ouvrages, ce qui est peu en comparaison des millions d'ouvrages que l'humanité a produits. Si on avait une vision synthétique de l'époque on passerai plus vite à l'action plutôt que de trouver dans la philosophie — comme quête métaphysique de la vérité — un prétexte à l'inaction, à la contemplation. Si la philosophie comme art du jugement peut-être rapprochée de la science à la quelle elle a donné une origine, c'est que toute deux repose sur un principe de moindre action. Au fond Les philosophes sont attachés aux systèmes que ceux-ci soient les institutions qui les abritaient ou les différentes manières d'articuler des concepts entre eux. La stupeur de l'être est tout simplement une expression bien compliquée pour parler de l'étonnement face à ce qui est, face au monde et du détachement que cela occasionne ou plutôt du détachement par rapport à la vie qui a conduit à cette angoisse plus qu'à un émerveillement. Si l'on s'émerveille alors qu'on est détaché c'est qu'il y a illusion. La Clameur de l'être n'est que la perpétuation d'un même mode de variation, une système qui ne vise que sa propre survie, il n'y a là aucun dépassement, sinon l'idée de poser un logique du multiple. Mais c'est par-delà les notions abstraite de l'Un et du multiple que se joue la sagesse. Vient un moment où il faut se donner les moyens d'agir, c'est là l'aspect le plus déraisonnable de la sagesse. Les philosophes ont interprété les monde, il nous revient face à son bouleversement d'en modifier notre approche, car ce sont les disciplines créatrices qui l'ont transformé…
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