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La Garenne de philosophie

CITE GRECQUE / Les Sept Sages de la Grèce antique

Outre Thalès et Solon, ajoutons aux Sept Sages de la Grèce Antique que voici, Clisthène et Socrate. 

 

Pittakos de Mytilène, né vers 650 avant notre ère sur l’île de Lesbos et mort aux alentours de 570, fut l’un des Sept Sages de la Grèce antique, figure emblématique de la sagesse politique et morale dans un monde en mutation. Issu probablement d’une famille noble d’origine thrace, il s’illustra d’abord comme stratège et homme d’État, notamment en libérant sa cité du joug du tyran Mélanchros. Choisi comme aisymnète, c’est-à-dire arbitre suprême doté de pouvoirs exceptionnels pour restaurer l’ordre, il gouverna Mytilène avec prudence et fermeté pendant une décennie, avant de renoncer volontairement au pouvoir, invoquant la difficulté de rester vertueux en toute circonstance. Sa pensée, empreinte de modération et de sens pratique, se reflète dans ses maximes telles que « Sache reconnaître le moment opportun » ou « Bien faire ce qu’on fait actuellement », qui traduisent une philosophie de l’action mesurée et du discernement. Il légiféra avec rigueur, notamment en instaurant une loi punissant plus sévèrement les délits commis sous l’emprise de l’ivresse, mesure qui visait les excès des aristocrates et fut saluée par le peuple. Sa clémence est également restée célèbre : lorsqu’il eut entre ses mains l’assassin de son propre fils, il choisit de le pardonner, affirmant que « le pardon vaut mieux que le repentir », geste qui illustre la profondeur morale de son engagement. Il fut aussi un adversaire redoutable sur le champ de bataille, comme en témoigne son duel contre le général athénien Phrynon, qu’il vainquit par ruse en utilisant un filet dissimulé, épisode qui inspira plus tard les combats de gladiateurs. Platon le cite dans le Protagoras, Aristote le loue pour son souci du bien commun, et la Souda lui consacre une notice. Bien que ses écrits aient disparu, son héritage perdure à travers les fragments de ses lois et les sentences transmises par la tradition.

Bias de Priène, originaire de la cité ionienne de Priène au VIe siècle avant notre ère, incarne une sagesse lucide et désabusée, nourrie par l’expérience politique et la méditation morale. Avocat et homme d’État, il se distingua par son intégrité, refusant de plaider pour des causes injustes, et par son engagement en faveur du bien commun, allant jusqu’à codifier les lois de sa cité. Sa réputation de sage repose autant sur ses actes que sur ses paroles, notamment sa célèbre maxime « La plupart des hommes sont méchants », qui exprime une vision sombre mais réaliste de la nature humaine, fondée sur l’observation des passions, des intérêts et des hypocrisies sociales. Il aurait écrit un long poème de deux mille vers sur les moyens de rendre l’Ionie heureuse et prospère, preuve de son souci de la réforme et de la cohésion régionale. Lors du siège de Priène par Alyattès, roi de Lydie, Bias aurait usé de ruse pour amener l’ennemi à faire la paix, illustrant une intelligence stratégique alliée à une volonté de préserver la cité. Sa pensée, transmise par Diogène Laërce et d’autres auteurs anciens, valorise la prudence, la lenteur dans l’action, la maîtrise de soi et le respect des lois. Il affirmait que « la bonne conscience est seule au-dessus de la crainte » et que « le plus malheureux des hommes est celui qui ne sait pas supporter le malheur », soulignant l’importance de la résilience intérieure. Bias pleurait en condamnant un homme à mort, expliquant que la pitié est naturelle mais que la loi doit être respectée, ce qui révèle une tension entre émotion et devoir, résolue par une éthique du juste équilibre. Il conseillait de « haïr comme si un jour on devait aimer » et « aimer comme si un jour on devait haïr », formules paradoxales qui traduisent une conscience aiguë de la versatilité des relations humaines. Sa sagesse, à la fois grave et pénétrante, continue d’éclairer les réflexions sur la justice, la politique et la condition humaine.

Chilon de Sparte, figure austère et emblématique de la sagesse dorienne, vécut au VIe siècle avant notre ère et fut l’un des Sept Sages de la Grèce antique, reconnu pour la rigueur de sa pensée et la concision de ses maximes. Éphore vers 556–555 av. J.-C., il incarna l’idéal spartiate dans ce qu’il avait de plus noble : discipline, retenue, sens du devoir et fidélité à la cité. Sa philosophie, fondée sur la maîtrise de soi et la lucidité morale, se manifeste dans des sentences telles que « Que ta langue ne devance pas ta raison », « Ne désire rien de trop » ou encore « Des morts on ne dit que du bien », qui traduisent une éthique du silence, de la mesure et du respect. Il affirmait que la grandeur humaine réside dans la capacité à prévoir les conséquences de ses actes et à supporter l’injustice sans se laisser emporter par la colère. On lui attribue le célèbre précepte « Connais-toi toi-même », gravé sur le temple de Delphes, bien que cette paternité soit disputée par certains auteurs antiques. Chilon aurait également composé une élégie de deux cents vers, preuve de son engagement intellectuel au-delà de la politique. Sa mort, survenue selon la tradition lorsqu’il embrassa son fils vainqueur aux Jeux olympiques, fut interprétée comme l’ultime accomplissement d’une vie guidée par la vertu. Diogène Laërce rapporte que Chilon considérait comme difficile de taire ce qu’il ne faut pas dire, de bien employer ses loisirs et de savoir supporter l’injustice, soulignant ainsi les exigences de la sagesse véritable

Cléobule de Lindos, né vers 630 avant notre ère et mort aux alentours de 560, fut un personnage à la fois historique et légendaire de la Grèce antique, reconnu comme l’un des Sept Sages de la Grèce antique, figure à la fois politique et philosophique dont la mémoire s’est inscrite dans la tradition hellénique comme celle d’un homme de mesure, de réflexion et d’élégance morale. Tyran éclairé de la cité de Lindos, sur l’île de Rhodes,  il succéda à son père Évagoras et aurait été, selon la tradition, descendant d’Héraclès. Il gouverna avec fermeté mais aussi avec un souci manifeste du bien commun, favorisant les arts, la culture. Son règne coïncide avec l’apogée de Lindos, qu’il embellit notamment par la rénovation du temple d’Athéna Lindia, financée grâce aux richesses acquises après une victoire sur la Lycie. Sa pensée, nourrie par des voyages en Égypte où il aurait étudié la philosophie, se distingue par une série de maximes et d’énigmes qui témoignent d’un esprit à la fois subtil et pénétrant. Il composa près de trois mille vers, mêlant conseils de vie, sentences morales et réflexions sur la condition humaine, et transmit à sa fille Cléobuline le goût des énigmes en hexamètres, perpétuant ainsi une tradition familiale de sagesse poétique. Cléobule prônait la modération en toutes choses, la bienveillance envers les amis et la capacité à transformer les ennemis en alliés, affirmant que « la modération est la meilleure des choses » et que « faire du bien à ses ennemis est le moyen de les convertir en amis ». Il recommandait de ne pas se laisser emporter par la joie ni abattre par le malheur, et de savoir affronter les revers de fortune avec courage. Sa pensée, empreinte d’un stoïcisme avant l’heure, traduisai une sagesse fondée sur la mesure, la prudence, la bienveillance et valorisait la discrétion, la réflexion avant l’action et la noblesse d’âme. Il mourut à l’âge de soixante-dix ans, et selon Diogène Laërce, sa tombe portait l’épitaphe : « Cléobule, homme sage, mort souhaitée par son père Lindos, fier de sa mer », formule poétique qui scelle l’union entre le sage et sa cité. Son héritage, transmis par des auteurs comme Diogène Laërce et célébré dans les anthologies de maximes antiques, continue d’illustrer une sagesse fondée sur la mesure, la dignité et l’art de vivre en harmonie avec soi-même et avec les autres.

Périandre de Corinthe, deuxième tyran de la cité après son père Cypsélos, régna au VIIe siècle avant notre ère et demeure une figure ambivalente de l’histoire grecque, à la fois célébrée pour son génie politique et décriée pour sa cruauté. Héritier d’une dynastie fondée sur la rupture avec l’aristocratie traditionnelle, il transforma Corinthe en un centre économique et culturel florissant, favorisant le commerce maritime, les arts et les infrastructures, notamment par la construction du diolkos, une rampe permettant aux navires de traverser l’isthme sans contourner le Péloponnèse. Son règne, qui dura environ quarante ans, fut marqué par une centralisation du pouvoir et une politique coloniale ambitieuse, avec la fondation de cités comme Potidée et Apollonie. Pourtant, derrière cette façade de prospérité, se dessine un homme dont les actes suscitent l’effroi car il aurait tué sa propre épouse Mélissa dans un accès de rage, n'est pas Louis Althusser qui veut, provoquant la rupture avec son fils Lycophron, qu’il exila à Corcyre. Ce dernier, refusant de régner aux côtés de son père, fut assassiné par les habitants de la colonie, événement qui précipita la fin du tyran. Périandre est également connu pour avoir conseillé à Thrasybule de Milet, dans une parabole sinistre, de « couper les épis qui dépassent », métaphore de l’élimination des citoyens influents pour asseoir la tyrannie. Malgré cette réputation de dureté, il fut compté parmi les Sept Sages de la Grèce, sans doute en raison de son sens de l’organisation, de sa capacité à gouverner efficacement et de son mécénat envers les artistes, comme le poète Arion de Méthymne, qui fréquenta sa cour. Son héritage, complexe et contrasté, illustre les tensions entre autorité et sagesse, entre grandeur civique et violence privée, et continue de nourrir les réflexions sur le pouvoir, la justice et la mémoire historique.

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