Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Quelques recherches sur la philosophie se faisant ! ABONNEZ-VOUS A LA NEWSLETTER pour nous soutenir 1530 abonnées

La Philosophie à Paris

FEMINISME / Hélène Brion

FEMINISME / Hélène Brion
Hélène Brion
(1882–1962)

Figure remarquable du féminisme socialiste du début du XXe siècle, Hélène Brion (1882–1962) fut institutrice, syndicaliste, militante féministe, pacifiste, et intellectuelle engagée. Par son audace et sa cohérence, elle incarne un féminisme intransigeant, articulé autour de la lutte des classes et du refus de la violence étatique. C'est une institutrice au cœur du militantisme syndical et politique

Brion débute sa carrière comme institutrice, métier profondément lié aux idéaux républicains. Elle s'engage très tôt au sein de la Confédération générale du travail (C.G.T.) et de la Section française de l'Internationale ouvrière (S.F.I.O), deux espaces où elle défend l'autonomie des femmes au sein des luttes sociales. Ce double engagement syndical et politique forme le socle de son combat : selon elle, les oppressions féminines ne peuvent être dissociées des dominations économiques. Elle milite dans de nombreuses associations féministes, toujours attentive à ne pas dissoudre le féminisme dans les intérêts d’autres mouvements.

L’originalité de la pensée de Brion réside dans sa volonté de préserver l’autonomie du féminisme tout en appelant à une union des femmes de toutes les classes sociales contre leur oppression commune. Contrairement à certaines de ses contemporaines, elle refuse que les revendications féminines soient subordonnées aux priorités des partis politiques ou syndicats masculins. Sa vision est stratégique : les femmes doivent se rassembler autour de revendications transversales — droit à l’éducation, à l’emploi, à la parole publique — tout en respectant leurs diversités sociales.

En 1915, au cœur de la Première Guerre mondiale, Hélène Brion adopte une posture pacifiste radicale. Elle dénonce les horreurs du conflit et la propagande patriarcale qui pousse les femmes à soutenir l’effort de guerre sans réfléchir aux conséquences humaines. Cette position courageuse lui vaut d’être accusée de défaitisme, emprisonnée en 1917, et surtout — fait historique — d’être la première femme jugée en Conseil de guerre. Lors de son procès en mars 1918, elle déclare avec force :

« Je suis ennemie de la guerre par féminisme. »

Cette phrase devient emblématique. Elle résume sa pensée : la guerre est un outil de domination masculine, et le féminisme doit être antimilitariste. Elle est condamnée à trois ans de prison avec sursis, puis radiée de l’Éducation nationale. Elle ne sera réintégrée qu’en 1925 — une victoire tardive mais symboliquement importante.

Après son procès, Brion continue à militer. Elle adhère un temps au Parti communiste, mais en quitte les rangs en raison de désaccords sur la place réelle accordée aux femmes dans l’organisation. Fidèle à son exigence d’autonomie féministe, elle préfère se consacrer à un travail intellectuel. Elle entreprend la rédaction d’une Encyclopédie féministe, projet ambitieux visant à documenter l’histoire, les idées et les luttes des femmes. Ce projet — malheureusement inachevé — témoigne de sa volonté de transmettre, d’éduquer, et de structurer la pensée féministe.

Hélène Brion est une figure puissante et singulière, qui a su articuler pédagogie, révolte, et lucidité. Son refus des compromis et sa défense farouche de l’autonomie féministe résonnent encore dans les débats actuels. Elle incarne une féministe qui n’a jamais transigé avec la vérité.

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article