POLITIQUE / Révolution conservatrice
La révolution conservatrice est un mouvement rasemblant différent courants nés en Allemagne après la seconde guerre mondiale et qui va servir de creuset et de base à la mise en place de l'accession du nazisme au pouvoir.
Il comprend cinq courants à la base : ce qui regroupe en tout 400 revues et publications. Ce courants se sont ramifiés hors d'Allemagne en trois branches notamment : Italie, France, Russie et Hongrie. Ce que ces courants ont en commun, c’était que leurs idéologies portaient des traits résolument antilibéraux, antidémocratiques et antiégalitaires.
C'est Armin Mohler, secrétaire particulier d'Ernst Jünger et publiciste après-guerre, qui assuerra la perpétuation du mouvement donnant un nouveau souffle européiste et paganiste au nationalisme essouflé d'après-guerre (on peut penser à l'échec de l'OAS en France en 1962). Contrairement aux conservateurs, les réovlutionnaires conservateurs ne cherchent pas la préservation par le changement. Sur la question de la Révolution Française, les différences avec la réaction comme le conservatisme deviennent claires : si le réactionnaire veut laisser la révolution aux oubliettes en revenant à l’État prérévolutionnaire, le conservateur en attenue les effets, tandis que le révolutionnaire conservateur s’efforce de la détruire dans le temps.
Le terme est apparu sous la plume de Friedrich Engels en février 1848 en référence au soulèvement polonais de novembre 1830 qui écrivait en Français : « Disons-le franchement : le soulèvement de 1830 n’était ni une révolution nationale (il excluait les trois quarts de la Pologne), ni une révolution sociale ou politique ; cela n’a pas changé la situation interne du peuple; c’était une révolution conservatrice.» En novembre 1848, l’érudit anglais Thomas Babington Macaulay décrit la Glorieuse Révolution comme une « révolution de préservation » contrairement à la Révolution Française. On peut là faire un clin d'oeil à clouscard quand on sait que la Dekonstruction sert avant tout à dépasser pour maintenir que ce soit chez Derrida ou chez Deleuze par leurs ontologies pratiquées à la suite de Heidegger. Charles Maurras emploie le terme en 1900 dans pour décrire la révolution contre la révolution en tant que réaction radicale portée par par une minorité bien organisée et déterminée : « En pratique, une révolution, en particulier une révolution conservatrice, une restauration, un retour à l’ordre ne sera menée avec succès qu’avec l’aide de certains éléments de l’administration et de l’armée. » Armin Mohler s'appuiera sur cette expression de Charles Maurras pour sa thèse La révolution conservatrice en Allemagne 1918-1932. où il référence pas moins de 350 personnes dans les cinq courants subnommés. Entre temps, Thomas Mann fait référence par ce terme à Friedrich Nietzsche dans son Anthologie russe (1921) : « Sa synthèse est celle de l’illumination et de la foi, de la liberté et de l’esclavage, de l’esprit et de la chair, de 'Dieu' et du 'monde'. Elle est, artistiquement exprimée, celle de la sensualité et du critiquenisme, exprimée politiquement, celle du conservatisme et de la révolution. Car le conservatisme n’a besoin que d’avoir un esprit pour être plus révolutionnaire que n’importe quelle illumination libérale positiviste, et Nietzsche lui-même n’a été dès le début, même dans les « considérations dépassées », rien de plus que la révolution conservatrice. »
L'invasion de l'Ukraine par la Russie participe entièrement de ce mouvement. On ne confondra pas la révolution conservatrice de type européiste ou traditionaliste avec la revolution conservatrice de type atlantiste ou libérale qui a eu lieu au début des années 80 et que l'on peut tout simplement appelé courant néoconservateur. De ce fait les éléments constitutifs de ce courant se trouvent être géopolitiquement allemands, hongrois et russes, cette alliance si elle se formait deviendrait invincible aux yeux des Américains. Il a moins de prise en Allemagne et en Italie.
1 / Le courant nationaliste völkisch
Il y a deux tendances au sein de ce courant : d'une part, la tendance « occultisante », incarné par Herman Wirth, et, d'autre part, la tendance « nordiciste », incarné par Hans Günther.
Artur Dinter, politicien völkisch, propagandiste et écrivain raciste, crée en 1927 la Geistchristliche Religionsgemeinschaft, précurseur de l’Organisation pour l’État populaire national-socialiste pour les chrétiens, renommée en 1934 Deutsche Volkskirche (Église populaire allemande). Ainsi, le mouvement völkisch a servi de base au développement du national-socialisme.
2 / Le mouvement de jeunesse Bündische
La Bündische Jugend et ses Bündischen est un vaste mouveùent de eunesse rattaché au Wandervogel (oiseaux migrateurs) et aux scouts éclaireurs.
La Ligue nationale des jeunes, - qui s’est séparée en 1921 de la Ligue nationale allemande de la jeunesse (DNJ) a été fondée en janvier 1919, d'inspiration plus monarchiste avec pour visée la restauration de l’ordre social de l’Empire - est de tendance völkisch-nationaliste
La Ligue des Aigles et des Faucons, fondée en 1920, est un mouvement völkisch-nationaliste
Il existe un pendant à ce mouvement qui fut réprimé les nationaux-socialistes.
4 / Le nationalisme révolutionnaire
Les nationalistes révolutionnaires sont considérés comme des "fascistes" par leurs opposants de gauche et comme des "marxistes" ou des fascistes de gauche par leurs opposants de droite, cependant, les NR rejettent l'internationalisme marxiste, leur idéologie diffère également du Fascisme historique
Le nationalisme révolutionnaire comporte au moins trois branches et deux tendances :
Les trois tendances sont la révolution conservatrice (Ernst Jünger, etc. ...), le national-bolchévisme qui se transformera petit à petit en eurasisme et le strasserisme. Les deux premiers courants ne sont pas ouvertement antisémites, le dernier courant ne fait pas de l'antisémitisme son axe central bien qu'il s'inscrive au sein du national-socialisme jusqu'en 1945.
Des deux tendances qui s'y font jour, l'une est clairement en continuité des thèses de François Duprat, prônant une « troisième voie », entre capitalisme et communisme, rejetant dos à dos les USA et le bloc soviétique. La seconde issu du strasserisme puis du national-bolchévisme prône l'eurasisme d'une Europe s'alliant avec la Russie et ses alliés asiatiques face à l'atlantisme.
Le nationalisme révolutionnaire est aussi clivé entre un retour à la nation française et les deux formes de paneuropéanisme que sont la confédération européenne des nations et la fédération des ethnies régionales au sein d'une nation européenne intégrée à un gouvernement européen. Les nationalistes révolutionnaires rejettent tout autant l'Organisation des Nations Unies qu'il juge cosmopolites et internationalistes. Reste le projet d'un fédéralisme des civilisations au sein d'un État mondial prôné par Ernst Jünger et repris par Alain de Benoist.
Le second clivage que nous évoquions auparavant est celui sur lequel il faut appuyer. Il apparaît de manière tranchée en 2014, quand les nationalistes révolutionnaires européens se divisent au sujet de la Guerre du Donbass. Certains, comme l'Action serbe, Forza Nuova, l'Unité nationale russe ainsi que d'anciens de la Troisième voie, prennent parti pour les séparatistes pro-russes de la Novorossia d'autres pour l'Ukraine comme le Bastion social (émergence des identitaires), Groupe Union Défense ou la Casa Pound... Ainsi, de nombreux nationalistes révolutionnaires sont motivés par un choix pro-russe du fait que la plupart adhère à l'Eurasisme, d'autres motivés par la création d'un empire européen et les autres motivés par un anti-atlantisme et un antiaméricanisme farouche ainsi que par solidarité avec les nationalistes russes en défendant des thèmes irrédentistes russes. Les nationalistes révolutionnaires pro-russes considèrent aussi le gouvernement ukrainien comme le jouet des américains alors que les nationalistes révolutionnaires pro-ukrainiens sont en faveur des Ukrainiens car ils craignent un néo-soviétisme, sont en opposition à l'impérialisme novorusse et voient dans le règne prolongé de Vladimir Poutine un régime antinational.
5 / Le mouvement de la paysannerie
C'est en Allemagne le Landvolkbewegung, c'est-à-dire le mouvement de paysans. Sous l'impulsion de Walther Darré, théoricien du Bauernadel (aristocratie paysanne), ce courant rejoindra le national-socialisme.
6 / Les intellectuels
Voici la liste des intellectuels allemands liés à la révolution conservatrice des années 30.
Joseph E. Drexel, Hans Freyer, Stefan George, Heinrich von Gleichen-Rußwurm, Martin Heidegger, Friedrich Hielscher, Edgar Julius Jung, Ernst Jünger, Friedrich Georg Jünger, Artur Mahraun, Arthur Moeller van den Bruck, Armin Mohler, Ernst Niekisch, Ernst von Salomon, Helmut Schelsky, Carl Schmitt, Othmar Spann, Oswald Spengler, Eduard Stadtler, Wilhelm Stapel, Andreas Paul Weber, August Winnig (de), Giselher Wirsing, Hans Zehrer.
7 / Julius Evola
/partie en cours d'écriture/
Ce courant par des rencontres successives de Julius Evola avec certains des cinq courants de la révolution conservatrice allemande. Ces liens tissés ont connu trois périodes ou ères :
- la noblesse allemande et des « Jeunes-conservateurs » avec Edgar Julius Jung (1894-1934), Heinrich von Gleichen-Russwurm, le prince Karl Anton von Rohan (1896-1975) et surtout avec Othmar Spann ; il écrit notamment pour la revue
- le « Cercle de Hambourg » de Wilhelm Stapel
8 / La multiple orientation française
/partie en cours d'écriture/
C'est Alain de Benoist, qui est paganiste et européiste.
Sa Ce sont aussi en Russie les figures de Pierre Malinowski, François Mauld-d'Aymée, Xavier Moreau et son frère, qui sont catholiques traditionalistes.
9 / Néo-eurasisme
/partie en cours d'écriture/
C'est le national-bolchévisme puis à son éclatement le néo-eurasisme par Aleksandr Douguine notamment.
Ce courant est une poursuite du néo(bolchévisme dans l'ex-URSS, mais il éclatera entre d'un côté son pendant libéral Jirinowsky et son pendant néo-eurasiste (très influencé par Alain de Benoist qui fera découvrir Heidegger à Aleksandr Douguine).
Il n'est pas sûr que l'on puise parler désormais de slavophilie au sein de ce courant en ce que s'y opposent les Slovaques, les Slovènes, les Polonais, les Ukrainiens et les Tchèques, suite à l'invasion de l'Ukraine par la Russie. Les Bulgares et les Croates restent sur la réserve.
10 / L'illibéralisme hongrois
/partie en cours d'écriture/
Viktor Orban en est le parangon. Ce courant plus nationaliste que révolutionaire conservateur souhaite réunir la transylvanie, la ruthénie (d'où est issu Andy Warhol) et la transcarpathie occidendantale.
Sources
Robert Steuckers, La révolution conservatrice allemande : biographies de ses principaux acteurs et textes choisis, Les Éd. du Lore, 2014.
Rüdiger Ahrens, Bündische Jugend. Eine neue Geschichte 1918–1933. Wallstein, Göttingen 2015