NOTION / Ironie
L'ironie c'est à la fois manifester son incapacité et rendre incapable. (sens moderne)
C'est que l'ironie a toujours pour cadre la discussion, même dans les livres, c'est la discussion d'une « âme » avec votre « âme », d'un « esprit » avec votre « esprit », mais jamais ce ne sera le fait d'un corps qui surfe, d'un corps en capacité lui-même de dissoudre les problèmes. Certes il y a une habileté des « esprits » à esquiver les problèmes, à ne pas s'engager, on retrouve cela chez les philosophes analytiques ou les phénomélogues, qui s'inventent avec sérieux, le prétexte des abstractions, ou des problèmes si quotidiens que l'on s'y enlise avec délectation, eux du moins. Jouissance du discursif, qui s'enferme dans un symbolique loin du réel ou limite celui non à l'horizon mais aux tracasseries quotidiennes. Mais l'ironie vise tout de même autre chose qu'un enfermement, que l'habilité à esquiver les problèmes (qui par définition vous viennent dans les pattes), l'ironie c'est l'interrogation feignant l'ignorance, au sens où c'était la méthode de Socrate pour faire acoucher ses interlocuteurs. Au sens moderne, c'est une manière rhétorique pour faire entendre ce que l'on veut dire en disant le contraire. Mais de tout temps ironie et humour furent concurrent, la première fonctionnant sur le coup d'arrêt, le second davantage comme une glissade, une inclinaison. On retrouve cette distinction chez Bergson : « tantôt on énoncera ce qui devait être en feignant de croire que c'est précisément ce qui est : en cela consiste l'ironie. Tantôt au contraire, on décrira minutieusement et méticuleusement ce qui est, en affectant de croire que c'est bien là ce que les choses devraient être : ainsi procède souvent l'humour » (Bergson, Le rire). L'humour a à voir avec l'éthylique, avec l'une des forme de l'oubli de soi qu'est l'ivresse philosophique, se saoûler avec un vers d'eau, tandis que l'ironie touche au « connais-toi toi-même », au souci de soi qui lui est si proche. On se soucie de soi de son corps quand celui-ci devient incapable, triste aveu de Foucault.