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La Philosophie à Paris

FEMINISME / Maria Deraismes

Maria Deraismes
(1828–1894)

Maria Deraismes (1828–1894) est une figure phare du féminisme français, alliant érudition philosophique, engagement républicain et audace intellectuelle. Par ses discours, ses écrits et son action politique, elle s’est dressée contre les dogmes patriarcaux de son temps, affirmant que l’infériorité féminine n’était pas une vérité naturelle, mais une construction sociale destinée à exclure les femmes du champ public.

L’une des grandes forces de Maria Deraismes réside dans sa capacité à déconstruire les discours d’autorité. Elle conteste les théories médicales et philosophiques qui justifient la domination masculine en prétendant que les femmes sont biologiquement inférieures. Elle s’attaque aux fondements religieux et scientifiques de l’ordre patriarcal, dénonçant une “fiction sociale” qui travestit les relations de pouvoir en fatalités naturelles. Dans Ève dans l’humanité (1895), ouvrage posthume, elle affirme que l’histoire des femmes est celle d’un effacement orchestré et appelle à leur réintégration dans le récit collectif ; sa pensée est une critique radicale des mécanismes d’exclusion intellectuelle et politique.

Maria Deraismes défend un féminisme universaliste, refusant les hiérarchies internes ou les particularismes qui divisent, de ce fait, elle fustige l’“universel de poche” des républicains, qui oublient d’inclure les femmes dans leurs idéaux de liberté, égalité et fraternité (il faudrait dire sororité). Son féminisme se veut compatible avec les principes républicains, tout en dénonçant leur hypocrisie lorsqu’ils excluent la moitié de la population. Elle milite pour les droits civils et économiques des femmes, notamment l’accès au travail, à la propriété et à l’éducation.

Prudente face aux risques d’un affrontement direct avec les institutions, Deraismes choisit une voie tactique. Elle refuse de revendiquer les droits politiques trop tôt, craignant de compromettre la stabilité de la Troisième République naissante. Elle préside la Société pour l'amélioration du sort de la femme, où elle œuvre pour des réformes concrètes et progressives. Cette stratégie d’intégration permet de légitimer les revendications féminines dans les cercles républicains encore réticents. Maria Deraismes est également une grande oratrice, reconnue pour ses conférences pédagogiques. Elle participe à la création de banquets féministes, lieux de sociabilité et de réflexion où les idées circulent librement.

Elle fonde, avec Georges Martin, la loge mixte Le Droit Humain, première loge maçonnique ouverte aux femmes et son ouverture à la franc-maçonnerie témoigne de son engagement en faveur d’un féminisme laïc, rationaliste et universel.

Avec Léon Richer, Maria Deraismes co-organise en 1878 le premier Congrès féministe international et cette initiative marque une nouvelle ère dans le féminisme, en posant les jalons d’une coopération transnationale entre militantes. Ce congrès ancre son action dans une perspective large, anticipant les futurs mouvements mondiaux pour les droits des femmes, insistant sur la nécessité d’une réforme globale des institutions.

Maria Deraismes fut une intellectuelle audacieuse, une militante stratège et une philosophe du féminin. Elle nous apprend que la lutte féministe ne peut se contenter de revendications ponctuelles, mais doit s’accompagner d’une critique profonde des savoirs, des institutions et des représentations. Une voix puissante, encore trop méconnue aujourd’hui.

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