2 Novembre 2025
Fabrice Midal est né en 1963 à Paris dans une famille intellectuelle marquée par les questions spirituelles. Son père, Henri Midal, était un grand connaisseur du bouddhisme et cette proximité avec la pensée orientale dès l'enfance a profondément orienté sa trajectoire. Très jeune, il se passionne pour la philosophie et entreprend des études qui le conduisent à l'École normale supérieure de Fontenay-Saint-Cloud. Il soutient par la suite une thèse de doctorat en philosophie consacrée à Martin Heidegger et à la question de la technique, travail qui témoigne d'un intérêt précoce pour les rapports entre pensée occidentale et sagesse pratique. Cette formation académique rigoureuse constitue le socle de son œuvre ultérieure, marquée par la volonté constante de faire dialoguer les traditions philosophiques européennes avec les enseignements contemplatifs asiatiques.
son parcours intellectuel et spirituel s’articule autour d’une double exigence : d’une part, une immersion rigoureuse dans les traditions méditatives asiatiques, notamment le bouddhisme tibétain et le zen ; d’autre part, une volonté de repenser ces pratiques à l’aune des enjeux existentiels et culturels de l’Occident moderne. Son œuvre se distingue par un refus des approches dogmatiques ou purement techniques, privilégiant une méditation ancrée dans l’expérience vivante et dans une réflexion philosophique exigeante. Contrairement à nombre de maîtres ou d’enseignants qui se réclament d’une lignée unique, Midal puise dans des sources variées, tout en développant une pensée originale qui interroge les fondements mêmes de la pratique méditative.
Ses maîtres et ses sources La formation de Fabrice Midal s’est construite au contact de figures majeures des traditions bouddhistes, mais aussi à travers une étude approfondie des philosophies occidentales. Parmi ses principaux maîtres, on compte Dudjom Rinpoché, un des plus éminents représentants de l’école nyingma du bouddhisme tibétain, auprès duquel il étudie le dzogchen, une voie de méditation axée sur la reconnaissance directe de la nature de l’esprit. Le dzogchen, souvent qualifié de « grande perfection », se caractérise par une approche non dualiste où la pratique ne vise pas à transformer l’esprit, mais à reconnaître sa nature originellement libre. Midal a également été marqué par l’enseignement de Kalu Rinpoché, un autre maître tibétain, ainsi que par des rencontres avec des praticiens zen, notamment dans la lignée de Taisen Deshimaru, qui introduisit le zen sōtō en Europe. Ces influences multiples expliquent pourquoi sa vision de la méditation ne se limite pas à une école ou à une méthode, mais embrasse une diversité de perspectives tout en les soumettant à un examen critique. Nous verrons olus loin que sorti de la méditation et du bouddhisme, il a d'autres maîtres.
Une vision de la méditation comme expérience de liberté La conception que défend Fabrice Midal s’écarte radicalement des approches contemporaines qui réduisent la méditation à une technique de bien-être ou de performance. Pour lui, la méditation n’est ni un outil de gestion du stress ni une méthode d’optimisation personnelle, mais une pratique de libération. Cette libération ne se comprend pas au sens métaphysique d’une délivrance d’un cycle de renaissances (comme dans le bouddhisme traditionnel), mais comme une émancipation par rapport aux conditionnements psychologiques, sociaux et culturels qui entravent l’existence. Midal insiste sur le fait que méditer, c’est d’abord cesser de fuir l’expérience présente, qu’elle soit agréable ou douloureuse. Contrairement aux approches qui prônent la recherche d’un état de calme ou de vide mental, il souligne que la méditation doit affronter le tumulte des pensées, des émotions et des sensations sans chercher à les supprimer. Cette position le rapproche de certaines formes de méditation vipassana (vision claire), où l’attention est dirigée vers la réalité telle qu’elle se manifeste, sans filtrage ni jugement.
Une philosophie de l’impermanence et de la non-séparation La pensée de Midal s’appuie sur deux concepts centraux du bouddhisme, qu’il réinterprète dans un langage accessible et dénué de jargon religieux : l’impermanence et la non-séparation. L’impermanence (anicca en pali) désigne le caractère éphémère et mouvants de toutes les choses, y compris de notre propre identité. Midal en fait le socle d’une éthique de l’attention, où la reconnaissance de la fragilité de l’existence devient une force plutôt qu’une source d’angoisse. La non-séparation, quant à elle, remet en cause la distinction sujet-objet qui structure notre perception ordinaire. Selon lui, la souffrance naît de cette illusion d’une séparation entre soi et le monde, entre l’observateur et l’observé. La méditation, dans cette perspective, n’est pas une retraite hors du monde, mais un moyen de dissoudre les frontières artificielles qui nous aliènent. Cette idée rejoint certaines intuitions de la phénoménologie occidentale, notamment chez Maurice Merleau-Ponty, pour qui la perception est toujours déjà une relation au monde, jamais une opération solipsiste.
Critique des dérives contemporaines de la méditation Un aspect majeur de la réflexion de Midal consiste en une analyse sans concession des dérives de la méditation dans les sociétés occidentales. Il dénonce particulièrement la tendance à transformer la pratique en un produit de consommation, vendu comme une solution miracle contre le stress, l’anxiété ou la baisse de productivité. Cette marchandisation, selon lui, vide la méditation de sa dimension subversive. Méditer n’est pas devenir plus efficace, mais plus libre—y compris libre par rapport aux attentes sociales de performance et de bonheur. Il critique également les approches scientistes qui réduisent la méditation à ses effets neurobiologiques, mesurables en laboratoires. Si les recherches en neurosciences peuvent éclairer certains mécanismes, elles ne sauraient épuiser le sens d’une pratique qui engage l’être dans sa totalité. Pour Midal, cette réductionnisme est symptomatique d’une culture obsédée par le contrôle et la quantification, alors que la méditation, précisément, invite à lâcher prise.
Le travail d’éditeur et de diffuseur culturel Parallèlement à son enseignement, Fabrice Midal a joué un rôle déterminant dans la diffusion des textes et des idées liés à la méditation et à la philosophie bouddhiste en France. En 2001, il fonde les éditions Les Deux Océans, une maison d’édition spécialisée dans la publication d’ouvrages sur le bouddhisme, la méditation et les spiritualités comparées. Le nom même de la structure reflète sa volonté de créer un pont entre l’Orient et l’Occident, entre tradition et modernité. Parmi les auteurs publiés, on trouve des maîtres tibétains comme Dilgo Khyentse Rinpoché ou Chögyam Trungpa, mais aussi des penseurs occidentaux qui ont dialogué avec le bouddhisme, comme Philippe Cornu ou Alexandre Jollien. Midal a également traduit et préfacé plusieurs textes classiques, contribuant à les rendre accessibles sans les édulcorer. Son travail éditorial se distingue par un souci constant de conjuguer rigueur philologique et pertinence existentielle, évitant ainsi les écueils d’un exotisme superficiel ou d’un académisme stérile.
Une thèse centrale : la méditation comme art de vivre. Au cœur de la philosophie de Midal se trouve l’idée que la méditation n’est pas une discipline réservée à une élite spirituelle, mais un art de vivre accessible à tous. Cette démocratisation ne signifie pas une simplification ou une vulgarisation, mais au contraire une exigence accrue : celle de confronter la pratique aux réalités concrètes de l’existence—le travail, les relations, les échecs, les joies. Contrairement à certaines traditions qui isolent la méditation dans des contextes monastiques ou rituels, Midal insiste sur sa dimension laïque et quotidienne. Méditer, pour lui, c’est apprendre à habiter pleinement chaque instant, sans chercher à le fuir ni à le fixer. Cette approche rejoint des courants comme la mindfulness (pleine conscience), mais s’en distingue par son refus de toute instrumentalisation thérapeutique ou utilitariste. La méditation n’est pas un remède, mais une manière d’être au monde.
Une élaboration et des controverses. Le parcours de Fabrice Midal n’est pas exempt de tensions. Certaines voix, au sein des milieux bouddhistes traditionnels, lui reprochent une interprétation trop personnelle des enseignements, voire une dilution de leur profondeur métaphysique. D’autres, dans le champ des sciences cognitives, lui opposent un manque de rigueur empirique. Midal assume ces critiques en rappelant que la fidélité à une tradition ne consiste pas à répéter des formules, mais à les actualiser dans un contexte nouveau. Son œuvre, à cet égard, s’inscrit dans une lignée de penseurs, tels Alan Watts ou D.T. Suzuki, qui ont cherché à rendre les sagesses orientales intelligibles sans les trahir. Ce qui compte, pour lui, n’est pas l’orthodoxie, mais la justesse de l’expérience.
Le parcours spirituel de Fabrice Midal s'enracine dans une rencontre décisive avec le bouddhisme tibétain, particulièrement dans la lignée Shambhala fondée par Chögyam Trungpa Rinpoché.
Chögyam Trungpa, maître tibétain exilé en Occident après l'invasion chinoise du Tibet, a développé une approche originale de la méditation et de la spiritualité bouddhiste adaptée au contexte occidental. Trungpa, formé dans la tradition Kagyü et Nyingma, avait reçu une éducation monastique complète avant de fuir son pays en 1959. Installé d'abord en Grande-Bretagne puis en Amérique du Nord, il fonda l'organisation Shambhala, proposant un chemin spirituel laïque enraciné dans la sagesse bouddhiste sans exiger l'adhésion formelle au bouddhisme comme religion. Fabrice Midal n'a pas rencontré personnellement Chögyam Trungpa, décédé en 1987, avant qu'il ne puisse établir ce contact direct. Il a en revanche étudié intensivement ses enseignements et est devenu l'un des principaux transmetteurs de cette lignée en France. Il a reçu la transmission de Sakyong Mipham Rinpoché, fils et successeur de Chögyam Trungpa, qui l'a autorisé à enseigner la méditation dans cette tradition.
La philosophie de Fabrice Midal se caractérise par un refus des approches de la méditation qu'il considère comme réductrices ou instrumentalisées. Dans son ouvrage Foutez-vous la paix ! paru en 2017, il développe une critique vigoureuse de ce qu'il nomme la tyrannie du développement personnel et du bien-être. Selon lui, la méditation telle qu'elle est souvent présentée dans nos sociétés contemporaines a été vidée de sa substance pour devenir un simple outil de gestion du stress ou d'amélioration des performances. Cette transformation de la pratique méditative en technique d'optimisation personnelle trahit selon lui l'essence même de la démarche contemplative. Pour Midal, la méditation ne vise pas à se transformer en une version améliorée de soi-même, à devenir plus calme, plus efficace ou plus heureux selon les normes sociales dominantes. Elle consiste au contraire à accepter profondément ce que nous sommes, avec nos fragilités, nos contradictions et nos imperfections.
La méditation selon Fabrice Midal n'est pas une technique de transformation de soi mais une pratique d'acceptation radicale de notre condition humaine dans toute sa vulnérabilité.
Cette thèse centrale traverse l'ensemble de son œuvre et s'inscrit dans la tradition de Chögyam Trungpa qui parlait de basic goodness, la bonté fondamentale. Ce concept affirme que chaque être humain possède une dignité intrinsèque, une bonté de fond qui ne dépend pas de ses accomplissements, de ses qualités morales ou de sa conformité aux attentes sociales. La pratique méditative permet de toucher cette dimension fondamentale en nous libérant temporairement des jugements incessants que nous portons sur nous-mêmes. Dans Quel bouddhisme pour l'Occident ?, Midal interroge la manière dont les enseignements orientaux peuvent être transmis dans un contexte culturel différent sans perdre leur profondeur ni tomber dans l'exotisme superficiel. Il défend l'idée que le bouddhisme ne doit pas être importé comme un système de croyances mais compris comme une invitation à l'expérience directe et à l'investigation personnelle.
Son approche de la philosophie se distingue par un refus de la séparation entre théorie et pratique, entre connaissance intellectuelle et expérience vécue. Pour lui, la philosophie occidentale, depuis ses origines grecques, était intimement liée à un art de vivre, à des exercices spirituels comme l'a montré Pierre Hadot dans ses travaux. La philosophie antique proposait des pratiques concrètes visant la transformation de l'existence quotidienne, et c'est cette dimension qu'il s'efforce de réactiver en dialoguant avec les traditions orientales. Dans Socrate ou l'Éveil de la conscience, il montre comment le philosophe grec pratiquait une forme de méditation à travers le dialogue et l'examen de soi. Cette lecture de Socrate permet de rapprocher la maïeutique socratique de certaines pratiques contemplatives orientales, toutes deux visant à libérer l'esprit des opinions préconçues et des certitudes illusoires.
La critique de la modernité occupe une place importante dans la pensée de Fabrice Midal, nourrie par sa connaissance de Heidegger. Le philosophe allemand avait développé une analyse du monde technique moderne comme système où tout, y compris l'être humain, tend à être réduit à une ressource exploitable, calculable et optimisable. Midal transpose cette critique dans le domaine de la spiritualité contemporaine en montrant comment la méditation elle-même est devenue un objet de consommation, un produit standardisé promettant des résultats mesurables. Les applications de méditation, les programmes de mindfulness en entreprise, les protocoles thérapeutiques codifiés représentent pour lui des symptômes de cette logique marchande et gestionnaire qui envahit tous les aspects de l'existence. Il ne rejette pas pour autant toute forme de méditation laïque ni les bienfaits psychologiques de la pratique, il met en garde contre la réduction de la méditation à ses seuls effets thérapeutiques ou utilitaires.
Critiquer la société du développement personnel ne signifie pas rejeter le bien-être mais refuser de faire de l'amélioration de soi une obligation morale et une norme sociale.
Dans La méditation, Midal propose une introduction accessible à la pratique en évitant les deux écueils de la simplification excessive et de l'ésotérisme impénétrable. Il insiste sur la simplicité fondamentale de la méditation : s'asseoir, porter attention à la respiration, revenir à l'instant présent chaque fois que l'esprit s'égare. Cette simplicité ne doit pas être confondue avec la facilité car la pratique confronte le méditant à l'agitation incessante de son esprit, à ses résistances, à l'inconfort physique et mental. L'enseignement de Fabrice Midal met l'accent sur la douceur et la bienveillance envers soi-même pendant la pratique, contre toute forme d'exigence rigide ou de perfectionnisme spirituel. Il parle souvent de fraternité avec soi-même, d'amitié envers notre propre expérience, quelle qu'elle soit. L’École occidentale de méditation, qu’il fonde en 2006, s’inscrit dans cette volonté de transmission et d’ouverture. C'est une structure qui propose des enseignements et des retraites dans la tradition Shambhala adaptés au contexte français. Cette école se distingue par son ancrage philosophique et sa volonté de transmettre la méditation comme sagesse plutôt que comme simple technique. Les enseignements proposés intègrent des références à la philosophie occidentale, à la poésie, aux arts, créant des ponts entre différentes traditions de pensée. L’école met l’accent sur la pratique de la méditation assise, l’étude des textes fondamentaux et l’exploration des liens entre méditation, philosophie, art et vie quotidienne. Fabrice Midal y anime chaque année plusieurs séminairesL'École occidentale de méditation organise des sessions régulières à Paris et en province, des week-ends et des retraites plus longues permettant une immersion dans la pratique. Midal y enseigne personnellement et forme des instructeurs capables de transmettre à leur tour cet enseignement.
Son travail d'éditeur et de diffuseur culturel s'est concrétisé de plusieurs manières. Il a par ailleurs dirigé pendant plusieurs années aux éditions du Seuil la collection Le prunier, consacrée aux textes spirituels des différentes traditions. Cette collection ambitieuse a permis de publier en français des textes majeurs du bouddhisme, du taoïsme, de la mystique chrétienne et d'autres courants spirituels. Le travail éditorial de Midal s'est attaché à proposer des traductions de qualité, accompagnées d'introductions et de notes permettant au lecteur français de comprendre le contexte et les enjeux de ces textes souvent difficiles d'accès. Parmi les titres publiés dans cette collection figurent des œuvres de Dôgen, maître zen japonais du XIIIe siècle, des textes de Maître Eckhart, mystique rhénan médiéval, ou encore des enseignements de Ramana Maharshi, sage indien du XXe siècle. Cette diversité témoigne de l'ouverture de Midal aux différentes voies spirituelles et de sa conviction que la sagesse ne se limite pas à une seule tradition.
Fabrice Midal a par ailleurs publié plusieurs ouvrages sur des figures philosophiques et spirituelles majeures. Dans Choix de textes de Nietzsche paru chez Pocket, il propose une anthologie commentée permettant d'approcher la pensée du philosophe allemand à travers ses écrits les plus significatifs. Son Nietzsche, la pensée intempestive présente le philosophe du marteau comme un penseur de la vie et de l'affirmation, libéré du ressentiment et des idéaux ascétiques. Cette lecture de Nietzsche entre en résonance avec certains aspects du bouddhisme, notamment dans la critique des illusions métaphysiques et l'invitation à embrasser pleinement l'existence telle qu'elle est. Son Rimbaud, l'heure de la fuite explore comment le poète a cherché à travers son œuvre une forme d'illumination et de dépassement des limites ordinaires de la conscience. Midal voit chez Rimbaud une quête mystique qui s'exprime par les moyens de la poésie plutôt que par les voies religieuses traditionnelles.
La poésie, la philosophie et la méditation forment pour Fabrice Midal trois chemins convergents vers une même libération : celle de l'expérience directe et non médiatisée de la réalité.
Son approche interdisciplinaire constitue l'une des originalités de son travail intellectuel. Plutôt que de séparer strictement les domaines de compétence, il tisse des liens entre philosophie, spiritualité, littérature et arts. Cette démarche s'inscrit dans une conception de la pensée comme activité vivante, enracinée dans l'existence concrète et non comme construction purement abstraite. Ses ouvrages mêlent souvent références savantes et exemples tirés de la vie quotidienne, citations de maîtres bouddhistes et poèmes de Rilke ou de Baudelaire, analyses conceptuelles et conseils pratiques. Ce style hybride peut dérouter les lecteurs habitués aux genres académiques conventionnels mais correspond à sa vision d'une sagesse incarnée, qui ne sépare pas la réflexion de l'action ni la théorie de la pratique.
Dans Frappe le ciel, écoute le bruit publié en 2014, Fabrice Midal revient sur l'histoire du zen et sur les enseignements des grands maîtres de cette tradition. Le zen, branche japonaise du bouddhisme chan chinois, insiste particulièrement sur l'expérience directe de l'éveil par opposition à l'étude théorique des textes. Les koans, ces énigmes paradoxales utilisées dans certaines écoles zen, visent à court-circuiter la pensée conceptuelle pour permettre un saisissement direct de la réalité. Midal montre comment cette approche radicale peut parler aux Occidentaux contemporains, souvent saturés d'informations et de théories sans avoir accès à une expérience véritable. Le titre de l'ouvrage, tiré d'un koan célèbre, évoque cette immédiateté recherchée par le zen : frapper le ciel d'un coup de bâton et écouter le son qu'il produit, geste absurde sur le plan logique qui pointe vers une réalité au-delà de la rationalité ordinaire.
Le rapport de Midal à la tradition est complexe et nuancé. Il se positionne comme héritier et transmetteur d'une lignée spirituelle précise, celle de Chögyam Trungpa et de l'enseignement Shambhala, tout en insistant sur la nécessité d'une appropriation personnelle et contextualisée des enseignements. Il ne prône ni le conservatisme rigide qui répéterait mécaniquement les formes traditionnelles sans les comprendre ni le modernisme qui rejetterait toute filiation pour inventer une spiritualité entièrement nouvelle. Sa position pourrait se résumer ainsi : respecter profondément les lignées de transmission tout en osant les faire dialoguer avec la modernité occidentale et avec les questions spécifiques de notre époque. Cette tension créatrice entre fidélité et renouvellement traverse l'ensemble de son œuvre.
Transmettre une tradition vivante implique de la transformer tout en préservant son essence, exercice d'équilibriste qui exige à la fois rigueur et créativité.
Fabrice Midal s'est engagé dans de nombreux débats publics autour de la place de la méditation et de la spiritualité dans la société contemporaine. Il intervient régulièrement dans les médias, à la radio et à la télévision, pour présenter sa vision de la méditation et critiquer les dérives qu'il observe. Son franc-parler et son refus des compromis lui valent parfois des polémiques, notamment avec les promoteurs de la mindfulness standardisée qu'il accuse de dénaturer la pratique. Ces controverses ne sont pas recherchées pour elles-mêmes selon lui, elles découlent de sa conviction qu'il est nécessaire de défendre une certaine hauteur de vue contre les simplifications réductrices. Il ne revendique pas le monopole de la transmission méditative ni ne prétend que son approche soit la seule valable, il demande simplement que la dimension de sagesse et de questionnement existentiel ne soit pas évacuée au profit d'une logique purement utilitariste.
Son style d'écriture oscille entre l'essai philosophique, le récit personnel et le guide pratique. Certains de ses livres adoptent un ton très accessible, presque conversationnel, comme pour retrouver l'oralité de l'enseignement direct. D'autres textes sont plus denses, nourris de références savantes et d'analyses conceptuelles élaborées. Cette variation stylistique correspond à différents publics et objectifs : toucher le grand public avec des ouvrages comme Foutez-vous la paix ! tout en continuant à produire des travaux plus exigeants sur des figures philosophiques ou des questions théoriques. Midal assume cette pluralité d'approches sans chercher à hiérarchiser les genres, considérant que la transmission de la sagesse peut emprunter de multiples voies selon les circonstances et les interlocuteurs.
Dans Comment le bouddhisme a changé ma vie, ouvrage collectif qu'il a dirigé, Fabrice Midal réunit des témoignages de personnes ayant intégré la pratique bouddhiste dans leur existence. Ces récits illustrent la diversité des chemins spirituels et montrent que la rencontre avec le bouddhisme prend des formes très variées selon les individus. Certains témoins décrivent des transformations spectaculaires, d'autres des évolutions plus discrètes, tous soulignent l'importance d'une pratique régulière et l'accompagnement d'enseignants qualifiés. Ce livre participe de la volonté de Midal de rendre concret et incarné ce qui pourrait rester abstrait dans un exposé purement théorique des enseignements bouddhistes.
La sagesse ne réside pas dans l'accumulation de connaissances théoriques sur la méditation ni dans la performance spirituelle, elle se manifeste dans la manière dont on habite sa propre vie.
Sa conception de l'enseignement spirituel accorde une grande importance à la relation entre maître et élève, comprise non comme soumission aveugle à une autorité externe ni comme simple transmission d'informations techniques. Le maître, dans cette perspective, incarne les enseignements par sa présence même et crée un espace permettant à l'étudiant de découvrir sa propre sagesse. Cette relation pédagogique exige beaucoup des deux parties : du maître, une authenticité sans faille et une capacité à s'adapter à chaque étudiant ; de l'élève, une ouverture et un engagement sincères. Fabrice Midal a lui-même été étudiant avant de devenir enseignant et cette expérience nourrit sa compréhension du processus de transmission. Il insiste sur la nécessité d'une pratique personnelle solide avant d'enseigner aux autres, car on ne peut transmettre que ce que l'on a soi-même intégré et digéré.
La question du corps occupe une place significative dans sa pensée. La méditation selon Midal n'est pas une pratique purement mentale ou intellectuelle, elle engage le corps dans sa totalité. La posture assise, la verticalité de la colonne, l'ancrage dans le sol, l'attention portée aux sensations constituent des éléments essentiels de la pratique. Cette dimension corporelle fait écho aux enseignements de la phénoménologie, notamment chez Merleau-Ponty, qui a montré que la conscience est toujours conscience incarnée et que notre relation au monde passe d'abord par le corps vécu. Midal critique les approches dualistes qui opposeraient l'esprit au corps ou qui chercheraient à s'évader du corporel pour atteindre une spiritualité désincarnée. La sagesse authentique, selon lui, intègre toutes les dimensions de notre être dans une présence unifiée.
Son engagement pour la diffusion de la méditation s'accompagne d'une réflexion sur les obstacles et les difficultés rencontrés par les pratiquants occidentaux contemporains. Le manque de temps, les exigences multiples de la vie moderne, l'agitation mentale exacerbée par les technologies numériques constituent des défis spécifiques à notre époque. Midal ne propose pas de solutions miraculeuses à ces difficultés, il encourage plutôt une pratique modeste, régulière, intégrée au quotidien plutôt que réservée à des moments exceptionnels. Méditer dix minutes chaque jour vaut mieux selon lui qu'attendre les conditions idéales qui ne viendront jamais. Cette pragmatique de la pratique s'oppose aux représentations héroïques de la spiritualité qui exigeraient des renoncements drastiques ou des retraites interminables. Si ces formes intensives de pratique ont leur place et leur valeur, elles ne doivent pas devenir la norme exclusive excluant ceux qui mènent une vie ordinaire avec ses obligations familiales et professionnelles.
Fabrice Midal a organisé de nombreux événements publics visant à faire connaître la méditation à un large public. Les Journées de la méditation qu'il a initiées rassemblent plusieurs milliers de participants autour de pratiques, de conférences et d'échanges. Ces événements cherchent à créer une communauté de pratiquants, une sangha pour reprendre le terme bouddhiste désignant la communauté spirituelle. Car si la méditation est une pratique individuelle, elle gagne à s'inscrire dans un contexte collectif offrant soutien, encouragement et inspiration. La dimension communautaire de la pratique spirituelle, souvent négligée dans l'individualisme contemporain, représente pour Midal un élément important du chemin. Pratiquer avec d'autres permet de sortir de l'isolement, de relativiser ses propres difficultés et de bénéficier de l'énergie collective.
La méditation n'est ni une fuite du monde ni un refuge pour individus inadaptés à la société moderne, elle constitue au contraire un engagement radical envers la réalité telle qu'elle est.
Cette thèse démarque clairement Midal des accusations récurrentes adressées aux pratiques contemplatives, souvent perçues comme formes d'évasion ou de retrait narcissique. Pour lui, la méditation permet au contraire de développer une présence plus intense au monde et aux autres, libérée des filtres incessants de l'ego et de ses projections. Le méditant expérimenté ne fuit pas les difficultés de l'existence, il apprend à les rencontrer avec plus d'ouverture et moins de réactivité automatique. Cette capacité à rester présent face à l'inconfort, la confusion ou la souffrance sans se précipiter vers des solutions toutes faites constitue l'une des qualités développées par la pratique régulière.
Son œuvre philosophique proprement dite se déploie dans plusieurs ouvrages consacrés à des penseurs majeurs ou à des questions conceptuelles. Dans Pratique de la méditation, il articule dimensions pratiques et réflexions théoriques, montrant comment la philosophie peut éclairer l'expérience méditative et comment inversement la méditation peut nourrir la philosophie. Cette circularité entre théorie et pratique rompt avec la séparation moderne entre vie contemplative et vie active, séparation qu'il juge artificielle et appauvrissante. Les philosophes antiques ne distinguaient pas leur enseignement théorique de leur manière de vivre, et cette unité perdue constitue selon Midal un idéal à retrouver dans le contexte contemporain.
Fabrice Midal a par ailleurs abordé la question du rapport entre psychothérapie et méditation, sujet complexe qui suscite de nombreux débats. Il reconnaît les bienfaits thérapeutiques de la méditation, désormais largement documentés par la recherche scientifique, tout en refusant de réduire la pratique à sa seule dimension thérapeutique. La méditation ne vise pas primairement à guérir des symptômes psychologiques ni à résoudre des problèmes personnels, même si elle peut y contribuer. Son objectif dépasse le cadre de l'adaptation psychosociale pour toucher à des questions existentielles plus fondamentales : qui suis-je vraiment ? Quel est le sens de mon existence ? Comment vivre une vie pleine et entière ? Ces interrogations philosophiques et spirituelles ne se réduisent pas aux catégories de la psychopathologie, elles relèvent d'une quête de sens universelle qui traverse toutes les cultures et toutes les époques.
Les relations entre Fabrice Midal et les institutions bouddhistes traditionnelles ne sont pas toujours simples. Certains représentants du bouddhisme asiatique voient d'un œil critique les adaptations occidentales des enseignements, craignant une dilution ou une dénaturation des traditions millénaires. Midal se situe dans une position délicate, héritier d'une lignée tibétaine et simultanément engagé dans un travail de traduction culturelle qui implique nécessairement des transformations. Il défend l'idée que toute transmission authentique d'une tradition dans un nouveau contexte culturel exige une créativité et des adaptations, sous peine de n'offrir qu'une coquille vide ou un exotisme de surface. Cette position n'est pas exempte de tensions ni de malentendus, elle témoigne des défis rencontrés par quiconque s'engage dans un travail de passeur entre deux univers culturels distincts.
Dans Quel bouddhisme pour l'Occident ?, Midal interroge précisément ces questions de transmission interculturelle. Comment préserver l'essence des enseignements tout en les rendant accessibles et pertinents pour des Occidentaux du XXIe siècle ? Faut-il conserver les formes rituelles et les structures organisationnelles développées en Asie ou inventer de nouvelles formes adaptées au contexte européen ? Ces questions ne reçoivent pas de réponses définitives ni univoques, elles appellent selon Midal une investigation continue et une expérimentation prudente. Le risque du conservatisme est de figer la tradition en formes rigides qui perdent leur vitalité ; le risque du modernisme est de jeter le bébé avec l'eau du bain et de perdre la profondeur accumulée par des siècles de pratique.
Une tradition spirituelle vivante doit pouvoir s'adapter aux nouveaux contextes sans perdre son cœur, exercice qui demande sagesse et discernement plutôt que des règles mécaniques.
Son approche de la laïcité spirituelle mérite attention. Midal défend la possibilité d'une pratique méditative laïque, c'est-à-dire non attachée à une religion particulière ni à un système de croyances métaphysiques. Cette position s'inscrit dans la tradition Shambhala développée par Chögyam Trungpa, qui distinguait l'enseignement bouddhiste au sens religieux et ce qu'il appelait le Dharma Art, un chemin de sagesse accessible à tous indépendamment de leurs convictions religieuses. Pour Midal, cette distinction permet de proposer la méditation dans l'espace public, dans les écoles ou les entreprises, sans violer le principe de neutralité religieuse. Elle ouvre la pratique à des personnes qui ne se reconnaîtraient pas dans le cadre religieux du bouddhisme tout en cherchant une dimension de profondeur dans leur existence.
Cette position laïque ne signifie pas pour autant un abandon de toute dimension transcendante ou sacrée. Midal parle de sacré naturel ou de bonté fondamentale pour désigner une dimension de profondeur et de plénitude accessible dans l'expérience ordinaire, sans référence nécessaire à des entités surnaturelles. La méditation permet selon lui de toucher cette dimension, de reconnaître la dignité et la valeur intrinsèque de chaque instant de vie. Cette sacralisation du quotidien, qui fait écho à certains courants de la mystique chrétienne comme chez Maître Eckhart, transforme le regard sur l'existence sans exiger l'adhésion à des dogmes particuliers.
Les critiques adressées à Fabrice Midal concernent principalement son ton parfois polémique et son refus de certaines formes institutionnalisées de la méditation. Certains praticiens de la mindfulness lui reprochent de caricaturer leurs approches et de ne pas reconnaître la validité des protocoles thérapeutiques basés sur la méditation. Des bouddhistes traditionalistes lui reprochent inversement de trop s'éloigner des formes canoniques de l'enseignement. Ces tensions témoignent des débats actuels autour de la place de la méditation dans les sociétés occidentales contemporaines, débats qui ne sont pas près de s'éteindre tant les enjeux sont multiples : scientifiques, thérapeutiques, philosophiques, commerciaux, spirituels.
Fabrice Midal continue de développer son œuvre d'enseignement et d'écriture, publiant régulièrement de nouveaux ouvrages et donnant des conférences en France et à l'étranger. Son influence dans le paysage français de la méditation et de la spiritualité laïque reste significative, même si elle ne fait pas l'unanimité. Il représente une certaine manière d'aborder ces questions, ancrée dans une double exigence de rigueur intellectuelle et d'expérience pratique, refusant tant le dogmatisme que le relativisme facile. Son parcours illustre la possibilité pour un intellectuel occidental contemporain de s'engager dans une voie spirituelle traditionnelle tout en maintenant un regard critique et une autonomie de pensée.
La véritable transmission spirituelle n'exige ni soumission aveugle ni scepticisme systématique, elle appelle une confiance ouverte et une investigation personnelle constante.
Cette formulation résume l'équilibre recherché par Midal entre respect de la tradition et esprit critique, entre fidélité aux enseignements reçus et appropriation personnelle du chemin. Son œuvre invite chacun à découvrir par lui-même, à travers la pratique et la réflexion, ce que peuvent signifier concrètement des notions comme l'éveil, la présence ou la compassion, au-delà des représentations convenues ou des clichés. En cela, son travail s'inscrit dans l'esprit même des traditions contemplatives qui ont toujours insisté sur la primauté de l'expérience directe par rapport aux constructions conceptuelles, tout en reconnaissant le rôle essentiel des concepts et des enseignements dans l'orientation du chemin.
Un Frabrice et trois François : François Fédier, Francisco Varela, François Roustang
La relation à Francisco Varela
La relation entre Fabrice Midal et Francisco Varela ne relève pas d'une rencontre personnelle directe ni d'un compagnonnage intellectuel prolongé comme ce fut le cas avec François Roustang. Elle s'inscrit davantage dans un contexte intellectuel partagé où les deux hommes ont participé, chacun à sa manière et depuis des positions différentes, à l'introduction du bouddhisme et de la méditation dans l'espace culturel occidental, particulièrement francophone. Francisco Varela, biologiste et neuroscientifique chilien né en 1946 et décédé prématurément en 2001, représentait une figure majeure du dialogue entre sciences cognitives et bouddhisme, domaine qui a profondément marqué la réception occidentale des pratiques contemplatives à partir des années 1980 et 1990.
Varela avait développé avec Humberto Maturana la théorie de l'autopoïèse dans les années 1970, concept qui décrivait les systèmes vivants comme des organisations capables de se produire et de se maintenir elles-mêmes de manière autonome. Cette approche systémique de la vie remettait en question les modèles mécanistes classiques et introduisait une conception circulaire et non dualiste de la relation entre organisme et environnement. Par la suite, Varela avait étendu ces réflexions au domaine de la cognition, développant une approche qu'il nommait l'énaction, selon laquelle la cognition ne consiste pas en représentations mentales d'un monde extérieur préexistant, elle émerge de l'interaction dynamique entre un organisme et son milieu. Cette perspective énactive rejoignait sur plusieurs points la conception bouddhiste de l'interdépendance et de la coproduction conditionnée, selon laquelle aucun phénomène n'existe de manière isolée et indépendante.
L'énaction selon Francisco Varela et l'interdépendance selon le bouddhisme convergent dans le refus d'une séparation ontologique radicale entre sujet connaissant et monde connu.
Francisco Varela avait commencé à pratiquer la méditation bouddhiste dans les années 1970 après avoir rencontré Chögyam Trungpa Rinpoché, justement le maître tibétain dont Fabrice Midal allait devenir l'un des principaux diffuseurs en France. Cette rencontre avec Trungpa a profondément marqué Francisco Varela et orienté toute sa trajectoire ultérieure. Il est devenu un pratiquant assidu de la méditation dans la tradition Shambhala et a intégré cette pratique contemplative à sa démarche scientifique, cherchant à établir des ponts rigoureux entre l'expérience subjective telle qu'explorée par la méditation et les connaissances objectives des neurosciences. Cette double formation, scientifique et contemplative, faisait de lui un interlocuteur privilégié pour les dialogues entre bouddhisme et science qui se développent à cette époque. Francisco Varela est l'un des principaux animateurs des rencontres Mind and Life entre le Dalaï-Lama et des scientifiques occidentaux, série de conférences initiée en 1987. Ces échanges ont considérablement contribué à légitimer la méditation bouddhiste aux yeux de la communauté scientifique occidentales. Fabrice Midal a toujours entretenu une relation complexe et parfois critique envers cette scientifisation de la méditation dont Francisco Varela fut l'un des pionniers. D'un côté, il reconnaît la valeur du travail de Francisco Varela et l'importance de son travail dans la diffusion du bouddhisme en Occident. De l'autre, il s'inquiète des dérives potentielles d'une approche qui réduirait la méditation à ses effets neurobiologiques mesurables et qui instrumentaliserait la pratique contemplative au service d'objectifs thérapeutiques ou de performance cognitive.
Cette tension traverse toute la réflexion de Fabrice Midal sur la place de la méditation dans les sociétés occidentales contemporaines. Dans L'invitation à la méditation ainsi que d'autres ouvrages, Fabrice Midal critique explicitement la réduction de la méditation à un objet d'étude scientifique ou à une technique de gestion du stress validée par des protocoles expérimentaux. Selon lui, cette approche, si elle présentait certains mérites en termes de diffusion et de légitimation sociale, manquait l'essentiel de ce qu'est la méditation : une voie de transformation radicale de l'existence, une manière d'être au monde plutôt qu'un simple outil au service de fins prédéterminées. La méditation ne visait pas principalement à améliorer les performances cognitives ou à réduire le stress, elle proposait une remise en question fondamentale de notre rapport à nous-mêmes et à la réalité.
La scientifisation de la méditation risque de réduire une voie spirituelle millénaire à un ensemble de techniques cognitives mesurables, perdant ainsi sa dimension transformatrice. Cette critique ne visait pas spécifiquement Francisco Varela, dont Fabrice Midal reconnaissait la profondeur spirituelle et la sincérité de l'engagement contemplatif. Elle s'adressait plutôt à ceux qui, dans le sillage de ces recherches pionnières, ont développé des approches purement instrumentales de la méditation coupées de tout contexte spirituel et éthique. Varela lui-même avait toujours insisté sur l'importance de la pratique personnelle et sur la nécessité de ne pas séparer l'étude objective de la conscience de l'exploration subjective première personne. Il affirmait que les sciences cognitives doivent intégrer la dimension phénoménologique de l'expérience vécue et ne peuvent se contenter d'observations comportementales ou neurophysiologiques externes.
Dans L'inscription corporelle de l'esprit, ouvrage coécrit avec Evan Thompson et Eleanor Rosch publié en 1991, Francisco Varela développe une critique des sciences cognitives classiques qui traitent l'esprit comme un système de traitement de l'information fonctionnant selon des règles logiques abstraites. Il propose à la place une approche incarnée de la cognition qui prend au sérieux le fait que nous sommes des corps vivants en interaction avec un environnement. Varela et Midal partagent une référence commune à Chögyam Trungpa et à la lignée Shambhala, même si leurs manières de s'inscrire dans cette filiation différaient considérablement. Francisco Varela aborde l'enseignement de Trungpa depuis sa position de scientifique cherchant à établir des ponts avec les sciences cognitives contemporaines. Fabrice Midal l'approchait depuis sa formation philosophique et son engagement comme enseignant de méditation cherchant à préserver la dimension spirituelle et existentielle de la pratique contre sa récupération utilitariste. Ces deux postures ne sont pas nécessairement contradictoires, elles reflétent des sensibilités et des préoccupations différentes face au même héritage spirituel.
Francisco Varela avait collaboré étroitement avec Jon Kabat-Zinn, le créateur du protocole MBSR (Mindfulness-Based Stress Reduction) qui a largement contribué à l'introduction de la méditation dans les milieux médicaux et thérapeutiques occidentaux. Cette collaboration situait Francisco Varela au cœur du mouvement de médicalisation et de sécularisation de la méditation bouddhiste, mouvement que Midal observait avec un mélange d'intérêt et d'inquiétude. Kabat-Zinn avait délibérément extrait la pratique de la pleine conscience de son contexte bouddhiste traditionnel pour la rendre acceptable dans des institutions laïques comme les hôpitaux et les écoles. Cette stratégie a permis une diffusion massive de la méditation auprès de populations qui ne se seraient jamais intéressées au bouddhisme comme religion ou philosophie.
Fabrice Midal exprime des réserves sur cette décontextualisation de la méditation qu'il juge appauvrissante sur ke long terme et qui, selon lui, en séparant la technique méditative de son cadre éthique et spirituel, revient à en faire une simple gymnastique mentale dépourvue de sa puissance transformatrice. La méditation bouddhiste traditionnelle s'inscrit dans un chemin global comprenant une éthique de vie, une vision philosophique, une communauté de pratique avec des rituels, pratiques et des enseignements progressifs. Isoler la seule technique de l'attention à la respiration risquerait de la vider de son sens et de la réduire à un calmant mental sans portée existentielle. Cette critique rejoignait celle que certains maîtres bouddhistes asiatiques formulent à l'égard de la tendance à la pleine conscience proprement occidentale.
Francisco Varela aurait probablement reconnu la validité de ces préoccupations tout en défendant l'utilité stratégique d'une approche scientifique et sécularisée de la méditation. Il considérait que la validation scientifique des effets bénéfiques de la méditation peut ouvrir des portes et susciter l'inté, ce qui est une position pragmatique accepte le risque d'une instrumentalisation partielle de la méditation au nom d'une diffusion plus large et d'un impact social plus important.
Il y a un autre impact. Le dialogue entre sciences et méditation peut enrichir les deux domaines à condition de ne pas réduire l'un à l'autre ni de perdre de vue leurs spécificités irréductibles. Cette formulation peut résumer la position d'équilibre que Francisco Varela tentait de maintenir et que Fabrice Midal jugeait précaire. Pour Fabrice Midal, la tentation réductionniste était trop forte du côté scientifique pour qu'un dialogue réellement équilibré soit possible. La science moderne, avec son paradigme matérialiste et objectiviste, tendait structurellement à réduire la conscience et l'expérience subjective à leurs corrélats neurobiologiques mesurables. Les traditions contemplatives affirment au contraire la primauté de l'expérience subjective et la réalité de dimensions de l'existence inaccessibles aux méthodes objectives de la science.
Francisco Varela avait développé une méthodologie qu'il nommait neurophénoménologie, tentative de créer un pont rigoureux entre l'investigation objective du cerveau par les neurosciences et l'exploration subjective de l'expérience par la phénoménologie et les pratiques contemplatives. Cette approche proposait de corréler systématiquement les données neurologiques de troisième personne (mesures cérébrales) avec des rapports d'expérience de première personne rigoureusement recueillis auprès de méditants entraînés. L'idée était que ni l'objectivité pure ni la subjectivité pure ne suffisent à comprendre la conscience, seule leur articulation méthodique pouvait progresser dans l'élucidation de ce mystère.
Fabrice Midal reconnaissait l'intelligence de cette démarche neurophénoménologique sans être entièrement convaincu de sa faisabilité ni de son intérêt ultime. Selon lui, l'expérience méditative possédait une qualité intrinsèque qui échappait à toute tentative de corrélation objective et qui constituait précisément ce qui importait le plus. Connaître les modifications de l'activité cérébrale associées à un état méditatif ne disait rien d'essentiel sur la signification existentielle de cet état ni sur sa valeur transformatrice pour la personne qui le vit. Cette limitation fondamentale de l'approche scientifique, même enrichie par la phénoménologie, justifiait selon Fabrice Midal de maintenir la pratique contemplative dans son autonomie plutôt que de chercher à la légitimer par la science.
La mort prématurée de Francisco Varela en 2001, à cinquante-quatre ans des suites d'une hépatite chronique, avait privé le dialogue entre bouddhisme et sciences cognitives d'une de ses figures les plus brillantes et les plus respectées des deux côtés. Fabrice Midal a alors une quarantaine d'années et développe son enseignement de la méditation en France. Francisco Varela avait publié peu de temps avant sa mort un ouvrage intitulé Quel savoir pour l'éthique ?, traduit en français en 1996, où il explorait les implications éthiques de l'approche énactive et de la pratique méditative. Il y développait une critique de l'éthique normative traditionnelle fondée sur des principes universels abstraits et proposait à la place une éthique incarnée émergeant de la sagesse pratique cultivée par la méditation. Cette éthique non dualiste refusait la séparation entre moyens et fins, entre soi et autrui, cherchant à cultiver une réponse spontanément appropriée aux situations concrètes plutôt qu'une application mécanique de règles prédéterminées. Cette vision éthique rejoignait sur plusieurs points les réflexions de Fabrice Midal sur la compassion et l'action juste.
L'éthique véritable ne procède pas de l'application de règles morales universelles, elle émerge d'une présence éveillée capable de percevoir directement ce que la situation requiert.
Cette conception d'une éthique de la situation fondée sur la présence plutôt que sur des principes abstraits se retrouvait chez de nombreux penseurs contemporains ayant intégré la sagesse contemplative orientale. Elle posait néanmoins des questions redoutables concernant les critères permettant de distinguer l'action véritablement sage de l'action simplement impulsive ou égoïste. Les traditions contemplatives avaient développé des garde-fous contre cette confusion, insistant sur la nécessité d'un long entraînement sous la guidance de maîtres expérimentés avant de prétendre à une spontanéité véritablement éclairée.
Le legs de Francisco Varela au paysage francophone de la méditation reste considérable. Ses travaux ont inspiré toute une génération de chercheurs et de praticants qui ont poursuivi l'exploration des liens entre neurosciences et pratiques contemplatives. Le Mind and Life Institute qu'il avait cofondé continue d'organiser des rencontres et de financer des recherches, et les protocoles de méditation validés scientifiquement qui se sont multipliés dans les contextes médicaux, éducatifs et professionnels doivent beaucoup à l'impulsion initiale qu'il avait donnée à ce champ d'investigation. Pour sûr, Francisco Varela a contribué de manière décisive à faire de la méditation un objet légitime d'étude scientifique et d'application thérapeutique. Fabrice Midal se situe en héritier critique de cette histoire. Il bénéficie de la légitimité sociale que la méditation a acquise en partie grâce aux travaux de Francisco Varela et de ses collaborateurs. Il peut aujourd'hui enseigner la méditation à un public large sans être immédiatement taxé d'ésotérisme ou de dérive sectaire, précisément parce que la validation scientifique a normalisé la pratique. Simultanément, il combat ce qu'il perçoit comme les effets pervers de cette normalisation : la banalisation de la méditation réduite à une technique de relaxation, sa récupération par l'idéologie du développement personnel (dont Fabrice Midal participe parfois) et de l'optimisation de soi, la perte de sa dimension spirituelle et existentielle radicale.
Cette position ambivalente caractérise toute une génération d'enseignants de méditation occidentaux qui arrivent après les pionniers. Ils héritent d'un terrain défriché, d'une acceptabilité sociale acquise, de structures institutionnelles établies. Ils doivent composer avec cet héritage sans nécessairement adhérer à toutes les orientations prises par les générations précédentes. Fabrice Midal représente ainsi une voix singulière dans le paysage de la méditation francophone, voix qui assume pleinement la transmission d'une lignée traditionnelle tibétaine tout en développant une critique virulente de certaines formes contemporaines de la méditation occidentalisée.
La référence commune à Chögyam Trungpa crée néanmoins un lien indirect fort entre Francisco Varela et Fabrice Midal. Trungpa avait développé une approche de l'enseignement bouddhiste qui refusait les compromis édulcorants tout en s'adressant directement aux Occidentaux dans leur contexte culturel. Il n'hésitait pas à bousculer les conventions et à critiquer sévèrement ce qu'il nommait le matérialisme spirituel, cette tendance à utiliser les pratiques spirituelles pour renforcer l'ego plutôt que pour le dépasser. Cette intransigeance dans la transmission couplée à une capacité d'adaptation culturelle marquait profondément tous ceux qui entrent en contact avec son enseignement, que ce soit Francisco Varela depuis les sciences cognitives ou Fabrice Midal depuis la philosophie.
On peut imaginer que Francisco Varela, s'il avait vécu, aurait poursuivi son travail de construction de ponts entre domaines et aurait peut-être servi de médiateur entre les approches scientifiques et les approches plus traditionnelles ou philosophiques de la méditation. Sa double compétence et sa double légitimité, scientifique et contemplative, font de lui un interlocuteur respecté de tous les côtés. Sa disparition prématurée a laissé un vide que personne n'a vraiment pu combler, créant peut-être un fossé grandissant entre les communautés scientifiques et spirituelles intéressées par la méditation.
Fabrice Midal cite occasionnellement les travaux de Francisco Varela dans ses ouvrages et conférences, reconnaissant leur importance historique dans la diffusion occidentale du bouddhisme. Il utilise parfois le concept d'énaction pour décrire la nature participative de notre relation au monde, concept qui s'accorde bien avec sa propre insistance sur la non-séparation entre soi et environnement. Ces références restent néanmoins sporadiques et ne constituent pas un élément central de son argumentation. Fabrice Midal puise davantage dans les sources philosophiques occidentales, particulièrement la phénoménologie et Heidegger, ainsi que dans les textes bouddhistes traditionnels et les enseignements de ses maîtres.
La relation entre Fabrice Midal et Francisco Varela demeure donc largement virtuelle, relation entre deux héritiers différents d'un même maître et deux acteurs d'un même champ culturel qui n'ont pas eu l'occasion d'un véritable dialogue. Elle témoigne des multiples chemins par lesquels le bouddhisme et la méditation se sont implantés en Occident, chemins scientifiques, philosophiques, thérapeutiques, religieux qui parfois convergent et parfois divergent. Cette pluralité d'approches enrichit le paysage global tout en créant des tensions et des incompréhensions entre communautés qui ne parlent pas toujours le même langage ni ne poursuivent exactement les mêmes buts.
L'un des enjeux contemporains majeurs pour le bouddhisme occidental consiste précisément à gérer cette diversité sans tomber ni dans l'éclectisme superficiel ni dans le sectarisme rigide. Comment maintenir l'intégrité des transmissions traditionnelles tout en permettant des adaptations créatives au contexte moderne ? Comment dialoguer avec la science sans réduire la spiritualité à ses aspects mesurables ? Comment diffuser largement la méditation sans la vider de sa substance ? Ces questions, que Francisco Varela et Fabrice Midal ont abordées de manières différentes, continuent d'animer les débats dans les communautés bouddhistes et méditatives occidentale.
La relation à François Fédier
C'est sous la direction de François Fédier que Fabrice Midal a approfondi sa compréhension de Heidegger et que s'est cristallisée sa réflexion sur les rapports entre philosophie occidentale et sagesse orientale. Fédier incarnait une approche exigeante de la philosophie qui refusait les lectures superficielles ou instrumentalisées de Heidegger. Il insistait sur la nécessité d'une fréquentation patiente et humble des textes, d'une attention scrupuleuse au langage et aux nuances, d'une méditation prolongée plutôt que d'une compréhension intellectuelle rapide. Cette discipline de lecture et d'interprétation correspondait sur bien des points à la discipline de la méditation que Fabrice Midal allait enseigner par la suite.
François Fédier aime à définir le fascisme comme étant le conformisme, à cet égard, il prend comme exemple antique le lit de Procuste, près du détroit de Corinthe, où ce dernier fait s'allonger tout étranger qui passe et coupe tout ce qui dépasse. François Fédier avait défendu Martin Heidegger contre les accusations d'antisémitisme et de nazisme qui avaient resurgi avec virulence lors de la publication des Cahiers noirs dans les années 2014-2015, sa défense minimisait l'importance des passages problématiques et tentait de dissocier l'engagement politique du philosophe de la valeur de sa pensée. Quant aux vives controverses visant à discréditer l'œuvre entière de Heidegger pour des raisons idéologiques, François Fédier y voit une entreprise de calomnie et en retour ses détracteurs lui reprochent un aveuglement coupable face aux dimensions les plus sombres de l'œuvre et de la biographie heideggériennes. Fabrice Midal s'est retrouvé indirectement impliqué dans ces controverses du fait de sa filiation intellectuelle avec François Fédier et de ses références constantes à Martin Heidegger. Certains critiques questionnent la légitimité de convoquer un philosophe compromis avec le nazisme pour penser la méditation bouddhiste censée incarner des valeurs de compassion et de non-violence. Fabrice Midal a défendu la pertinence philosophique des concepts heideggériens tout en restant plus prudent que François Fédier sur les questions biographiques et politiques. Il a tenté de maintenir une distinction entre l'utilisation de certains outils conceptuels et l'adhésion à l'ensemble du système ou de l'itinéraire d'un penseur.
Cette attitude face à la philosophie, qui la comprend comme mode de vie et non comme simple discipline académique, résonne profondément avec l'approche que Fabrice Midal développait parallèlement dans sa pratique de la méditation. Dans ses ouvrages sur la méditation, Fabrice Midal cite régulièrement Martin Heidegger et mobilise des concepts heideggériens pour éclairer l'expérience méditative. La notion heideggérienne de Gelassenheit, traduite diversement par lâcher-prise, sérénité ou délaissement, lui sert à décrire l'attitude méditative qui ne consiste ni en effort volontariste ni en passivité inerte. Il s'agit d'un laisser-être actif, d'une ouverture vigilante qui renonce à la volonté de maîtrise sans sombrer dans l'indifférence. Cette notion traverse toute l'œuvre tardive de Martin Heidegger et François Fédier l'avait commentée dans plusieurs textes importants. FDe même, la notion heideggérienne d'habiter, développée particulièrement dans la conférence Bâtir habiter penser de 1951, nourrit la réflexion de Fabrice Midal sur la présence et l'enracinement. Martin Heidegger y montret que l'habiter authentique ne consiste pas simplement à occuper un logement mais à être pleinement présent, à séjourner de manière recueillie dans le monde. Cette critique de l'habitat moderne réduit à sa fonction utilitaire rejoint la critique de l'existence moderne caractérisée par la distraction, l'agitation et la perte du sens de la demeure. Fabrice Midal y trouve un pont conceptuel précieux entre philosophie occidentale et méditation orientale ; la méditation occidentale selon Midal offrirait la possibilité de retrouver cet habiter authentique, cette capacité à être véritablement là où l'on est plutôt que constamment projeté ailleurs par les sollicitations et les inquiétudes, à être attentif au présent.
François Fédier s'est opposé avec vigueur aux lectures marxistes ou existentialistes de Heidegger qui ont dominé la réception française du philosophe dans les années 1950 et 1960. Il critique particulièrement l'interprétation sartrienne qui transformait l'analytique existentiale de Être et Temps en anthropologie philosophique centrée sur la liberté du sujet. Selon Fédier, ces lectures manquant l'essentiel du propos heideggérien qui vise justement à déconstruire la métaphysique de la subjectivité. Heidegger ne propose pas une nouvelle philosophie du sujet humain, il tente de penser l'être en dehors du cadre sujet-objet qui a dominé la philosophie moderne depuis René Descartes. Cette vigilance contre les récupérations anthropocentriques de Heidegger a certainement sensibilisé Midal aux dangers symétriques menaçant la transmission du bouddhisme en Occident. De même que la pensée de Heidegger pouvait être dénaturée en étant réinterprétée dans les catégories de la philosophie du sujet, la méditation bouddhiste pouvait être dénaturée en étant réduite à une technique de développement personnel centrée sur le moi. Dans les deux cas, une pensée ou une pratique qui visait à dissoudre l'ego se trouvait récupérée au service du renforcement de ce même ego.
François Fédier a organisé avec d'autres traducteurs et commentateurs français de Martin Heidegger plusieurs colloques et publications collectives qui ont marqué la réception francophone du philosophe. Ces entreprises collectives témoignent d'une conception de la pensée comme œuvre commune plutôt que comme production individuelle isolée. Fabrice Midal a participé à certaines de ces initiatives et y a trouvé un modèle pour ses propres projets éditoriaux et pédagogiques. L'École occidentale de méditation qu'il a fondée se voulait précisément un espace de travail collectif et de transmission vivante plutôt qu'une institution bureaucratique dispensant un enseignement standardisé. La convergence entre Martin Heidegger et le bouddhisme avait déjà été explorée par plusieurs penseurs avant Fabrice Midal. Le philosophe japonais Keiji Nishitani, de l'école de Kyoto, avait développé dès les années 1950 un dialogue approfondi entre la pensée heideggérienne et le bouddhisme zen. En France, Jean-François Billeter avait proposé dans ses travaux sur la pensée chinoise des rapprochements entre Zhuangzi et certains thèmes heideggériens. Fabrice Midal s'inscrit donc dans une tradition de dialogue interculturel déjà constituée, qu'il prolongeait et enrichissait à partir de sa double compétence philosophique et contemplative. La rencontre entre Martin Heidegger et le bouddhisme ne relève pas d'un syncrétisme facile mais révèle des convergences profondes dans le diagnostic sur la modernité et dans la recherche d'une issue à ses impasses. François Fédier avait traduit et commenté la conférence de Martin Heidegger La chose, texte de 1950 où le philosophe proposait une méditation sur la cruche comme exemple de chose authentique résistant à la réduction technique. Martin Heidegger y montrait comment la cruche, en tant que chose et non simple objet, rassemblait en elle le jeu du quadriparti : terre et ciel, divins et mortels. Cette analyse phénoménologique de la cruche invitait à une attention contemplative aux choses simples de l'existence, attention qui les libérait de leur réduction utilitaire pour laisser apparaître leur richesse ontologique. Midal a repris cette invitation à une attention contemplative aux choses ordinaires comme dimension essentielle de la pratique méditative.
La relation avec François Roustang
Fabrice Midal a entretenu avec François Roustang une relation intellectuelle profonde qui a marqué sa réflexion sur la méditation, la thérapie et la présence. François Roustang, né en 1923 et décédé en 2016, était un personnage singulier dans le paysage intellectuel français. Jésuite pendant vingt ans avant de quitter la Compagnie de Jésus en 1968, il était devenu psychanalyste puis s'était progressivement éloigné de l'orthodoxie freudienne pour développer sa propre approche thérapeutique centrée sur l'hypnose et la notion de présence. Son parcours atypique, passant de la vie religieuse à la psychanalyse puis à une pratique thérapeutique originale, présentait des points de convergence remarquables avec les préoccupations de Midal concernant la transformation de soi et l'expérience directe.
François Roustang représentait pour Fabrice Midal une figure rare de penseur occidental ayant retrouvé par ses propres moyens certaines intuitions fondamentales des traditions contemplatives orientales.
La rencontre entre les deux hommes s'est produite dans les années 2000 et a donné lieu à des échanges réguliers, des conversations qui ont nourri la pensée de Midal sur plusieurs points essentiels. Roustang avait développé dans ses derniers ouvrages, notamment Il suffit d'un geste publié en 2003 ou Savoir attendre pour que la vie change paru en 2006, une conception de la thérapie qui rompait radicalement avec le modèle interprétatif dominant en psychanalyse. Pour lui, le changement thérapeutique ne résultait pas d'une prise de conscience intellectuelle ni d'une interprétation correcte du passé du patient. Il se produisait dans un moment de présence intense où le thérapeute et le patient touchent ensemble une dimension de la réalité habituellement voilée par le bavardage mental et les constructions névrotiques. Cette présence thérapeutique partageait de nombreuses caractéristiques avec la présence méditative telle que Midal la conçoit.
Les deux hommes se rejoignent dans leur critique commune d'une certaine modernité thérapeutique obsédée par le contrôle, l'explication causale et la technique standardisée. Roustang dénonçait les protocoles rigides qui prétendent enfermer la complexité de la relation thérapeutique dans des procédures mécaniques. Fabrice Midal critique de son côté la transformation de la méditation en outil de gestion du stress ou d'optimisation des performances. Dans les deux cas, une pratique originellement libératrice se voit réduite à un instrument au service d'objectifs étroits définis par les normes sociales dominantes. Cette convergence critique créait un terrain d'entente solide entre un psychothérapeute hétérodoxe et un philosophe patrique et méditant.
François Roustang accorde une importance centrale à ce qu'il nomme la perplexité, cet état d'ouverture et de non-savoir qui précède toute véritable transformation. Selon lui, le thérapeute devait renoncer à sa position de sachant, à son désir de comprendre et d'expliquer le patient, pour entrer dans une disponibilité radicale où quelque chose d'inattendu pouvait survenir. Cette perplexité n'était pas ignorance ou incompétence, elle résultait au contraire d'une discipline rigoureuse permettant de suspendre les automatismes intellectuels et les grilles de lecture préconçues. Midal retrouvait dans cette notion des échos directs avec l'esprit débutant dont parlent les maîtres zen, cette capacité à regarder chaque situation avec des yeux neufs comme si on la rencontrait pour la première fois. Les deux approches valorisent le lâcher-prise du besoin de maîtrise cognitive et la confiance en un processus qui échappe au contrôle volontaire. La perplexité selon Roustang et l'esprit débutant selon le zen désignent une même disposition fondamentale : l'ouverture à ce qui est sans le filtre des savoirs accumulés.
L'hypnose occupe une place majeure dans la pratique thérapeutique de Roustang, comprise non comme manipulation ni comme état de suggestibilité passive, plutôt comme accès à un mode de conscience élargi. Dans l'état hypnotique tel qu'il le concevait, le patient ne perd pas le contrôle de lui-même au profit du thérapeute. Il accède à une présence plus vaste et moins contrainte par les limitations habituelles de la conscience ordinaire. Cette conception de l'hypnose rejoignait certaines descriptions des états méditatifs où le pratiquant expérimente un élargissement du champ de conscience et une dissolution des frontières rigides de l'ego. Midal a été attentif à ces parallèles entre hypnose roustanguienne et méditation, y voyant deux voies distinctes vers une même expérience de présence élargie.
Dans La fin de la plainte publié en 2000, Roustang développait une critique radicale de la posture victimaire et du ressassement névrotique qui caractérisent selon lui une large part de la souffrance psychique contemporaine. Il montrait comment les individus s'enferment dans des récits de leur histoire personnelle où ils se perçoivent comme victimes impuissantes des circonstances ou de leur passé. La thérapie devait permettre de sortir de ces récits figés non pas en construisant un récit alternatif meilleur, en accédant à une présence qui précède tout récit, à une dimension de l'existence antérieure aux histoires que nous nous racontons sur nous-mêmes. Cette thèse résonnait fortement avec la critique que Midal adressait au développement personnel et à sa tendance à renforcer le narcissisme en invitant constamment à travailler sur soi, à améliorer son histoire personnelle, à optimiser sa vie.
Les deux penseurs partagent une conception non dualiste de l'être humain qui refuse les oppositions tranchées entre corps et esprit, conscient et inconscient, rationnel et irrationnel. Pour Roustang, formé à la phénoménologie et lecteur de Merleau-Ponty, l'être humain est fondamentalement un corps-sujet en relation avec le monde, non une conscience désincarnée commandant une machine biologique. Cette anthropologie rejoint la vision bouddhiste de l'interdépendance et de la non-séparation entre l'intérieur et l'extérieur, entre le soi et le monde. François Midal trouve dans les écrits de François Roustang une formulation occidentale, enracinée dans la tradition phénoménologique européenne, de cette intuition que les traditions orientales ont développée par d'autres chemins. François Roustang et Fabrice Midal se rejoignent ainsi dans l'affirmation que la transformation véritable ne procède pas d'un travail sur soi volontariste, elle survient dans le lâcher-prise et l'accueil de ce qui est. Faîtes le truc, répète François Roustang comme déclencheur, comme activateur.
Cette convergence fondamentale se décline différemment selon les contextes, thérapeutique chez Roustang et méditatif chez Midal, pourtant la structure sous-jacente reste similaire. Dans les deux cas, l'effort paradoxal consiste à cesser d'essayer, à renoncer aux stratégies de contrôle et d'amélioration de soi pour s'ouvrir à une dimension plus vaste de l'existence. Ce paradoxe traverse toutes les traditions de sagesse, formulé de manières diverses selon les époques et les cultures. François Roustang l'a redécouvert à partir de sa pratique clinique et de sa réflexion sur l'hypnose. Midal l'a reçu de la tradition Shambhala et de l'enseignement de Chögyam Trungpa, sur lequel il a publié de multiples livres (voir la bibliographie plus bas).
Fabrice Midal a consacré à François Roustang des passages dans plusieurs de ses ouvrages et a organisé des rencontres publiques où les deux hommes dialoguaient devant un auditoire. Ces échanges permettaient de faire découvrir au public intéressé par la méditation l'œuvre de François Roustang, souvent méconnue en dehors des cercles de psychothérapeutes, et réciproquement d'introduire les lecteurs de François Roustang à la pratique méditative. Ces ponts entre psychothérapie et méditation restent délicats à construire car les deux domaines possèdent leurs logiques propres et ne se superposent pas simplement. Leur dialogue ouvre des perspectives fécondes pour penser les processus de transformation humaine au-delà des clivages disciplinaires habituels.
La notion de geste, centrale dans la pensée tardive de Roustang, rejoint l'insistance de Fabrice Midal sur la simplicité et la concrétude de la pratique méditative. Pour François Roustang, il suffit souvent d'un geste juste, infiniment simple, pour que la situation thérapeutique bascule et que le changement se produise. Ce geste peut être une parole, un silence, un mouvement du corps, l'essentiel réside dans sa justesse et sa spontanéité plutôt que dans une quelconque complexité technique. De même, Midal répète que la méditation consiste en gestes très simples : s'asseoir, respirer, revenir au présent. La simplicité apparente de ces gestes ne doit pas masquer leur profondeur ni la difficulté de leur accomplissement réel, débarrassé des complications mentales que nous ne cessons d'y ajouter.
François Roustang a développé une critique sévère de l'institution psychanalytique, accusée selon lui d'avoir trahi l'esprit de découverte qui animait Freud pour se transformer en système dogmatique et en appareil de pouvoir. Cette critique institutionnelle résonne avec les réserves de François Midal envers certaines formes institutionnalisées du bouddhisme ou de la méditation qui perdent leur vitalité en se figeant en rituels vides ou en hiérarchies oppressives. François Roustang n'a-t-il pas écrit un livre sur la surmortalité des premiers disciples ? Un destin si funeste en 1976. La question de la transmission occupe les deux penseurs. Comment transmettre une expérience qui par nature échappe au langage conceptuel et ne peut être communiquée directement ? François Roustang a expérimenté dans sa pratique thérapeutique que la transmission véritable ne passe pas par des explications ni des interprétations verbales, par la qualité de présence du thérapeute qui permette au patient d'accéder à sa propre présence. Midal rencontre la même question dans l'enseignement de la méditation où les instructions verbales, si nécessaires soient-elles, ne suffisaient jamais à communiquer l'essentiel. L'enseignant doit incarner ce qu'il transmet, créer par sa présence un espace où l'expérience méditative devient possible pour l'étudiant. Cette transmission par présence plutôt que par discours rapproche la relation thérapeutique selon Roustang de la relation maître-disciple dans les traditions contemplatives. La transmission authentique ne repose pas sur le transfert d'informations du sachant vers l'ignorant, elle consiste à éveiller chez l'autre une présence et une sagesse qui lui sont propres.
Cette conception non autoritaire de la transmission se distinguait radicalement des modèles hiérarchiques où le maître ou le thérapeute détient un savoir qu'il distille progressivement à l'élève ou au patient maintenu dans une position de dépendance. Roustang et Midal défendaient au contraire une vision émancipatrice où le guide accompagne l'autre vers son autonomie et sa propre découverte. Le paradoxe était que cette émancipation exige parfois un moment de soumission ou d'abandon des défenses égotiques, moment périlleux qui peut dériver vers la manipulation ou l'abus de pouvoir.
La lecture que Fabrice Midal fat de François Roustang s'inscrit dans sa démarche plus large de dialogue entre traditions orientales et pensée occidentale. Roustang représente la preuve vivante qu'un Occidental, sans référence explicite au bouddhisme ou aux traditions contemplatives asiatiques, peut parvenir à des intuitions convergentes par un chemin totalement différent. Cette convergence renforçait aux yeux de Midal l'universalité de certaines vérités concernant la condition humaine et les processus de transformation. Elle montre que la sagesse ne constitue pas le monopole d'une culture particulière et différents cultures peuvent mener à des découvertes similaires.
Dans Qu'est-ce que l'hypnose ?, ouvrage publié en 1994, Roustang propose une définition de l'hypnose comme retour à une unité primordiale avec le monde, avant la séparation opérée par la conscience réflexive. L'état hypnotique [qui se trouve être de dissociation] permet selon lui de retrouver cette indistinction originelle entre sujet et objet, entre soi et l'environnement, indistinction qui caractérise la petite enfance avant le développement de l'ego. Cette régression n'a rien de pathologique, elle ouvre au contraire l'accès à des ressources créatives et à des possibilités de changement. Midal voit dans cette description des parallèles avec les états méditatifs profonds où le sentiment d'un soi séparé se dissout temporairement dans une conscience plus vaste et indifférenciée.
Les deux penseurs partageaient une attention particulière au langage et à ses limites. Roustang montre dans ses analyses comment le langage névrotique enferme le sujet dans des représentations figées et comment le langage thérapeutique peut au contraire ouvrir des brèches dans ces constructions sclérosées. Il utilise volontiers des formulations paradoxales, des questions sans réponse, des suggestions ouvertes qui ne saturaient pas l'espace de signification et laissaient place à l'émergence de l'inattendu. Cette utilisation créative du langage rappelle l'usage des koans dans le zen ou les enseignements énigmatiques de certains maîtres bouddhistes que Fabrice Midal affectionne particulièrement. Dans les deux cas, le langage cesse d'être instrument de communication univoque pour devenir catalyseur d'expérience directe.
François Roustang a insisté dans ses derniers textes sur l'importance de l'attention flottante, concept freudien qu'il réinterprète de manière originale. Cette attention ne se fixe sur rien de particulier, elle reste disponible à tout ce qui peut surgir dans le champ de la conscience sans privilégier certains contenus au détriment d'autres. Cette qualité d'attention correspond précisément à ce que la méditation vise à cultiver : une présence ouverte, non sélective, qui accueille l'ensemble de l'expérience sans juger ni discriminer. Midal a souvent souligné cette convergence entre l'attention flottante du thérapeute selon Roustang et l'attention ouverte du méditant, y voyant une même capacité fondamentale qui pouvait se développer dans des contextes différents.
La question du temps occupe les deux penseurs de manière significative. Roustang a montré comment la névrose consiste en grande partie à ne pas habiter le présent, à ressasser le passé ou à anticiper anxieusement l'avenir. La thérapie vise à ramener le patient dans l'ici et maintenant, seul temps réel où la vie se déploie effectivement. Cette temporalité du présent vivant constituait le cœur même de la pratique méditative selon Midal, qui définissait souvent la méditation comme un entraînement à revenir sans cesse au moment présent. Les deux approches reconnaissaient que l'esprit humain possède une tendance naturelle à fuir le présent et que cette fuite constitue une source majeure de souffrance.
Habiter pleinement le présent ne signifie pas ignorer le passé et l'avenir, cela consiste à se rapporter à eux depuis l'ancrage dans l'instant actuel plutôt que de s'y perdre. Cette nuance importante évite de réduire la présence à un présentisme superficiel qui couperait l'individu de son histoire et de ses projets. Roustang et Midal distinguaient soigneusement la mémoire vivante du ressassement névrotique, l'anticipation créatrice de l'anxiété paralysante. Le présent authentique intégrait les autres dimensions temporelles au lieu de les exclure, pourtant il ne s'y dissolvait pas au point de perdre tout contact avec l'expérience immédiate.
Fabrice Midal a exprimé à plusieurs reprises sa dette intellectuelle envers François Roustang, reconnaissant l'importance de ses écrits dans l'élaboration de sa propre pensée. Cette reconnaissance publique témoigne d'une générosité intellectuelle et d'un refus de masquer ses influences. Elle montre que son approche de la méditation ne se nourrit pas uniquement des sources bouddhistes traditionnelles, qu'elle intégre des apports occidentaux contemporains. Cette hybridation créative entre Orient et Occident, entre tradition ancienne et pensée moderne, caractérise le travail de Midal et lui confère son originalité dans le paysage français de la méditation.
Après la mort de François Roustang en 2016,Fabrice Midal lui a rendu hommage dans plusieurs textes et conférences, soulignant l'importance de son œuvre et déplorant qu'elle reste insuffisamment connue du grand public, encourageant la lecture de Roustang auprès de ses propres étudiants et du public intéressé par la méditation, convaincu que cette pensée peut enrichir considérablement la compréhension des processus de transformation. La relation entre Fabrice Midal et François Roustang illustre la fécondité des rencontres entre domaines apparemment distincts : un psychothérapeute hétérodoxe et un enseignant de méditation issu de la tradition tibétaine. Ce dialogue interdisciplinaire montre que les grandes questions humaines concernant la souffrance, la transformation et la possibilité de vivre pleinement traversent toutes les cultures et tous les domaines de pratique, appelant des réponses qui se font écho par-delà les différences de vocabulaire et de méthode.
La pratique de l'éveil de Tilopa à Trungpa, l'école Kagyü du bouddhisme tibétain, 1997
Les maîtres de la philosophie, 1997
[sa thèse de doctorat, 1999]
Mythes et dieux tibétains, une entrée dans le monde sacré, 2000
Trungpa, Biographie, Paris, Le Seuil, 2002.
Jésus, Bouddha, quelle rencontre possible ?, 2006
Quel bouddhisme pour l'Occident ?, 2006
La photographie, 2007 [condensé de ses cours à Paris 8]
Petit traité de la modernité dans l'art, 2007
Chögyam Trungpa, une révolution bouddhiste, 2007
Le bouddhisme, 2007 ou Le Bouddhisme à travers 100 chefs-d'œuvre, Paris, Presses de la Renaissance, 2007.
Au service du sacré, sauter à l'angle moderne, Paul Celan, Martin Heidegger, Barnett Newman, 2007
Comprendre l'art moderne, Paris, Pocket, coll. « Agora », 2007.
Hommage à la maternité, Pré aux clercs, 14 Mai 2008. 9782842283209
Hommage à l'amitié, Pré aux clercs, 22 Mai 2008. 9782842283193
Introduction au Tantra Bouddhique. L'incandescence de l'amour, Paris, Fayard, 2008.
ABC du bouddhisme, Éditions Grancher, 2008.
Jackson Pollock ou l'invention de l'Amérique, Éditions du Grand Est, 2008.
[Philosophie] Risquer la liberté, vivre dans un monde sans repères, 2009
Pourquoi n'y a-t-il-pas de chemin spirituel possible sans un maître ?, Éditions du Grand Est, 2009.
L'écoute du ciel, bouddhisme, christianisme, islam, judaïsme, ce qui les rapproche, ce qui les sépare, 2009
[Philosophie] La voie du Chevalier. Dépassement de soi, spiritualité et action, Paris, Payot, 2009.
Quel bouddhisme pour l'Occident ?, Éditions du Seuil, 2009.
Rainer Maria Rilke, l'amour inexaucé, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Points », 2009.
[Philosophie] Préceptes de vie des philosophes grecs, Presses du Châtelet, 2010.
Mandalas. Retrouver l'unité du monde, Paris, Le Seuil, 2010.
Pourquoi la poésie ?, l'héritage d'Orphée, Paris, Pocket, coll. « Agora », 2010.
[Philosophie] Et si de l'amour on ne savait rien ?, Paris, Albin Michel, 2010. Sur son site Fabrice Midal indique 2009.
[Philosophie] Qu'est-ce que la vérité ?, 2010
La tendresse du monde, l'art de la vulnérabilité, 2012
L'amour à découvert, retrouvez une manière authentique d'aimer, 2012
[Philosophie] Auschwitz, l'impossible regard, 2012
[Philosophie] Martin Heidegger et la pensée bouddhique, Conférences de Tokyo, 2012
Comment être bouddhiste ?, 93 réponses, quelques notions et 10 préceptes, 2013
La méditation, PUF, coll. « Que sais-je ? », 2013, rééd. 2017.
[Philosophie] (rééd. poche) La Voie du Chevalier. Pratique de la méditation laïque, Paris, Payot & Rivages, 2014.
Frappe le ciel, écoute le bruit, Ce que vingt-cinq ans de méditation m'ont appris, Paris, Pocket, 2014.
Trungpa : L'homme qui a introduit le bouddhisme en Occident, préface Diana Mukpo, Paris, Éditions du Seuil, 2014.
[Philosophie] Comment la philosophie peut nous sauver, 22 méditations décisives, Paris, Flammarion, 2015.
Transformez votre vie grâce au Bouddha, la méditation peut vous guérir, vous éclairer et vous libérer, 2016.52 poèmes d'Occident pour apprendre à s'émerveiller, 2017.
Foutez-vous la paix ! et commencez à vivre, Paris, Flammarion, coll. « Versilio », 2017.
Sauvez votre peau !, devenez narcissique, 2018
Sauvez votre peau! Devenez narcissique, Paris, Flammarion, coll. « Versilio », 2018.
Traité moral pour triompher des emmerdes, Paris, Flammarion, coll. « Versilio », 2019.
Devenez narcissique ! Et sauvez votre peau, 2018
Narcisse n'est pas égoïste, Paris, Flammarion, coll. « Versilio », 2019.
Méditer. Le bonheur d'être présent, Philippe Rey, 2019.
Narcisse n'est pas égoïste, une enquête stupéfiante, 2019
Traité de morale pour triompher des emmerdes, 2019
Méditer avec Fabrice Midal, Une façon simple et vivante d'apprendre à méditer, Paris, Prisma Media, Ca m'intéresse, 2020, 141 p. 9782810430598
3 minutes de philosophie pour redevenir humain, 2020
Ne vous laissez plus jamais faire, 2020
Comment rester serein quand tout s'effondre ?, Paris, Flammarion, coll. « Versilio », 2020.
Suis-je hypersensible ?, enquête sur un pouvoir méconnu, Paris, Flammarion, coll. « Versilio », 2021.
Suis-je hypersensible ? Le cahier pratique, 2021.
Méditer sans se prendre la tête, 2021.
Méditer pour les nuls, 2021.
Foutez-vous la paix ! Et commenczez à vivre, Paris, Pocket, coll. « Evolution », 20/09/2018. 9782266278362
La méthode : Foutez-vous la paix !, Paris, Flammarion, coll. « Docs Temoignages Essais », 07/09/2022.
Les 5 portes, 2022.
Tout ce qui nous empêche d'être heureux et tout ce qu'il faut savoir pour l'être, 2023.
Les princesses ont toujours raison, 2023.
La théorie du bourgeon, Une philosophie anti-découragement, Paris, Flammarion, 24 janvier 2024. 304 p. 9782080439086
Le jeu des 5 portes, 2024.
Le guide du bonheur imparfait, Paris, Pocket, coll. « Pocket Evolution »n° 19260, 7 Mars 2024. 240 p. 9782266339773
La Magie de l'ordinaire, Paris, Flammarion, 12 mars 2025. 272 p. 9782080465887
(rééd.) La Théorie du bourgeon, Une philosophie anti-découragement, N'ayez plus peur de vivre !, Paris, Pocket, 13 mars 2025. 256 p. 9782266348393
(dir.), Guérir de vos angoisses en 6 séances, Paris, Robert Laffont, 18 sept. 2025. 256 p. 9782221283271
Les princesses ont toujours raison, La sagesse des contes et légendes pour déjouer les pièges d'aujourd'hui, Paris, Pocket, 13 nov. 2025. 192 p. 9782266344661
Empêcher que le monde ne se défasse, 19 leçons de philosophie pratique pour apprendre À résister, Paris, Flammarion, 21 jan. 2026. 220 p. 9782080473455
Préfaces
Chögyam Trungpa, Pour chaque moment de la vie, Paris, Seuil , 21 octobre 2021. 256 p. 9782021476101
François Bourgognon, Claude Penet, La thérapie d'acceptation et d'engagement, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 8 novembre 2023 (2ème édition). 128 p. 9782715421059
André Charbonnier, Plus de peurs que de mal, Entre nous et le bonheur, il n'y a que nos peurs, Paris, Points, 5 avril 2024. 208 p. 9791041415212
François Fédier, Francisco Varela, François Roustang
Rimbaud, l'heure de la fuite
L'inscription corporelle de l'esprit (1991)
La fin de la plainte (2000)