REPONSE A OYSEAULX / Sur le concours d'agrégation
Avertissement : ce texte n’est à lire que si vous êtes agrégés, si vous tenter ce concours,
ce texte à un effet dissuasif s'il est lu trop rapidement et sans nuance (lisez aussi le passage en rouge). Nous ne faisons ici qu’une réponse au commentaire
de Monsieur Oyseaulx *. Tentons l’éclaircissement, contre cette idée qu’il faudrait être agrégé pour pouvoir critiquer l’agrèg de philosophie. De même que selon Mr Oyseaulx il faut être agrégé
pour pouvoir critiquer sans ressentiment la pensée formatée de l‘agrèg, de même il faut être agrégé pour lire ce texte, qui dira-t-on dissuade de passer l’agrèg. D’avance ce texte ne visent pas
les agrégatifs, ceux qui préparent ce concours, mais ceux qui pensent que tout ce qui est de l’ordre de la pensée doit passer par cette épreuve, et qui bizarrement sont des agrégatifs.
CE TEXTE DEVELOPPE UNE PROBLEMATIQUE, ET SE DEBLOQUE A LA FIN.
Passons par le truchement d’un exemple. C'est la moindre des choses que ceux qui critiquent les pédés, se fasse passer dessus avant, question d'expertise. :) Le parallèle est volontairement
douteux, juste pour faire entrevoir que l’on ne peut pas être dans un système et prétendre librement le critiquer. Les agrégés à la différence de ceux que la société dénomme homosexuels, font
partie d’un système, c’est pourquoi il est possible de critiquer l’agrégation et mais que cela est plus discutable pour l’ « inversion » sexuelle. Montrant une certaine forme de refoulement. La
question deviendrait : peut-on refouler le système quand c’est précisément le système (l’hétéronomie appuyé par
les prêtres du savoir agrégé) qui crée le refoulement, du déchet qui tôt ou tard ressurgit ? Mais passons, tout ça pur dire que le ressentiment serait dans la très discutable critiques des pédés
et non dans celle d’un système agrégatif.
D'une autre façon on peut très bien être indifférent à l'agrèg (plus par manque de méthode d'écriture sur commande qui s’acquiert par entraînement ou formatage : l’excice de la dissertation) et
remarquer qu'il est possible de penser sans être agrégé à la pensée discursive (la pensée ne se réduisant pas au discours, à la « verbosité »). La capacité à penser sans être agrégé, C'est cette
simple hypothèse non généralisable qui est soutenue ici. Ce que nous faisons c’est un raisonnement par l'exception, par goût de la contradiction :) : c'est feu François Zourabichvili qui ne
voulait tenir compte que des agrégés en France c'est-à-dire de ceux qui savent que "c'est un peu comme courir le 100 m" mais à la fin "il faut tout oublier" (expression de Mr Loraux l’un des
maîtres de François Z.). Se dépendre de ce que l’on a incorporé, du formatage qui établit plus qu’il ne renouvelle. Faire mentir par l’expérience le discours péremptoire des agrégés, c’est cela
mon goût de la contradiction, difficile de savoir d’où ça vient, aucun aveu à faire.
Cette simple hypothèse que nous posons, est qu’une autre voie d'expérience est empruntable sans souci de la reconnaissance, l’amour pouvant s’en tenir à quelques personnes (les philoi). C'est
plus là, une critique de la facilité discursive de l'agrégé comme discours du maître que l’expression d’un ressentiment par rapport à un privilège. La distance, c’est-à-dire ce qui fait la
noblesse n’a pas besoin d’adoubement. Nombre de philosophes ont une indifférence par rapport à l'enseignement (Descartes était un ancien soldat, Leibniz un bibliothécaire, Spinoza, dont un des
traités est le condensé des cours privés de ses débuts, Schopenhauer qui s'y est essayé à deux reprises, Nietzsche n'enseignait plus après 36 ans ou Lucrèce dont on peut douter qu’il enseignait,
pour en prendre seulement quelques uns parmi les plus critiques).
Ca ne se fait pas de dire cela, mais il y a une sorte d'incapacité pour l'agrégé à faire autre chose qu'enseigner et d'être protégé par un statut (jugement un peu hâtif, puisqu'il y a comme
agrégé, un ministre, Luc Ferry et un fondateur les Ecoles Françaises d’attachées de presse, c’est-à-dire tous les pures rhétoriciens moderne, Denis Huisman). D’ici quelques temps ce sera étonnant
de voir le contraste entre les philosophes analytiques, les philosophes du langage et de l'esprit, les épistémologue qui vont envahir les institutions et les gens qui vont vivre la précarité
comme condition d'existence. Les premiers seront agrégé et détachés des seconds. En somme l'agrèg forme des gens cultivés et non des idiots : cf. le cours de Deleuze sur la
pensée naturelle de l'idiot et la pensée de reprise de l'érudit. Un philosophe a-t-il besoin d'être dans le troupeau, dans
l’agrégat, dans ce corps d’esprit qui a son code (le jargon philosophique) ?
Au nom de quoi tout penseur serait-il agrégé ? Ca serait un label qualité ? Ne peut-on pas donné un point de vue hors agrèg sans voir que ceux
qui le passent ont un certain masochisme rentré ou souvent intériorise la souffrance ** qu'ils ont eux à passer ce concours avec leur ceinture de janséniste. Comme si l'esprit de l'agrégé
était celui qui devait conditionné toutes les têtes, les former à l'esprit critique. Alors qu’il est prêt à certains sacrifices et que ceux sont ceux qui le distingue du commun des gens. S'il y a
possibilité de ne pas revenir sur ces convictions et de ne pas passer l'agrèg, pourquoi ne pas poursuivre sa voix, tout en faisant remarquer aux agrégés, comme ici, que ce n’est pas entre eux que
les choses sérieuses se passent ?Mais en tout cas bonne route pour Florian Forestier et Mr le plus sçavant des Oyseaulx, dont il faut reconnais tout le talent. Cette critique pour reprndre
Socrate dans le Gorgias de Palton, n'est pas à prendre pour soi, mais pour faire avancer la discussion. Il s'agit surtout d'accepter et de ne pas freiner la différence, c’est-à-dire que n’est pas
forcément établi et statufier (sur la différence entre le nouveau et l’établi voir DzDR et notre post à venir). C'est spinoziste, nietzschéen et
wittgensteinien de dire que la philosophie est avant tout thérapeutique, réponse à une excommunication plus qu'à un étonnement, réponse à une détonation plutôt qu'à un émerveillement face au
monde (au quel cas on demeurerait dans une logique subjective et se réclamant de l'objectivité, les deux étant grammaticalement corrélés).Bref pour revenir sur le tout premier paragraphe, il y
avait quelque de Nizantesque dans tout cela, le fait de ne pas vouloir car une fois agrégé on est obligé de produire du discours et pour reprendre Deleuze . Ne peut-on pas dénoncer la aisance du
discours et la protection du statut, peut-être l’accusation d’un idéalisme latent serait-elle valable mais encore faudrait-il croire à l’importance de l’esprit, si souvent lourd, ou de la
conscience, si souvent mauvaise.En quelques mots a-t-on le droit de rétif aux agrégations de tous ordres ? Nietzsche répondrait avec
subtilité qu'il faut se garder de combattre la décadence ; elle est absolument nécessaire, elle appartient à tous les temps, toutes les époques. Ce qu’il faut combattre de toutes nos forces
c’est l’introduction du virus contagieux dans les parties saines VP III,61 et 15[41]. Afin d'éviter Monsieur Oyseaulx tout soupçon de ressentiment à l'endroit de l'agrégation. Celle-ci si on
y prête pas garde conduit à un esprit de surplomb, un esprit de suffisance qui se satisfait très bien de son jargon.
AFIN DE REPRENDRE MON AVERTISSEMENT DU DEBUT, et de ne pas me fâcher avec tous mes amis agrégatifs, car ce n'est pas eux que je
vise, mais la suffisance des agrégés, des gens dont le point de vue sur le monde est conditionné par leur statut. Comme s'ils
oubliaient qu'ils étaient des héritiers pour reprendre l'expression de Bourdieu, du seul fait du rythme de vie introduit par l'institution. Mais nombreux qui passent le concours cherchent à
garder leur personnalité (c'est tout ton mérité monsieur Oyseaulx, je ne pense pas trio m'avancer) ou savent l'ambivalence de leur démarche, s'ils viennet du peuple, ce qui revient à vendre sa
peau à l'institution. La philosophie c'est réellement autre chose, si elle tient à sa fécondité. "C'est une chose d'enseigner, c'en est une autre de pratiquer" (comme me le faisait remarquer un
ami). Mais là je n'avance rien de nouveau. Le plus étonnant c'est donc la posture de surplomb, le statisme que conforte l'agrégation et qui finit par ne plus prêté attention au dynamisme au
dehors de l'institution agrégée, parfois à le rejeter. C'est sur ce tout dernier point que je crie HARO. C'est là qu'une chose risque de se passer, la contagion des parties de la société par
l'esprit de corps de l'agrégation, parfois il y a là comme un frein pour la pensée, mais il est vrai Mr Oyseaulx tout l'art et de ne pas si arrêter, de ne pas aller contre l'établi mais plutôt
vers la nouveauté. Une question était lancée à l'ENS par Maniguié comme se fait-il que de tous les philosophes contemporains très peu étaient universitaires (il relevait comme exception qui
confirme la règle Deleuze) et que précisément Deleuze, parmi l'un des philosophes les plus créatifs fut aussi le plus universitaire (Maniguié sous-entendait sans doute le plus soumis à
l'intitution de masse). Il y a un point que je ne développerait pas c'est qu'il n'était pas contrairemnet à ses pairs passé par l'ENS et qu'il avait donc un autre point de vue sur l'institution
de masse notamment comment ne pas se positionner contre elle mais à aller vers le nouveau. On touche à des questions d'institution qui nous éloignent (cf. le doublon
université-grandes écoles en France). Pour Deleuze, à force de réformes institutionnelles, il était de plus en plus
difficile de faire de la recherche à l'université (ce que savent les chercheurs du CNRS, qui n'ont pas d'obligation d'enseignement). Cela rejoint un constat plus philosophique de Mr Loraux (à la
fin de sa carrière unviersitaire) : pour lui, ce n'était plus dans l'intitution mais ailleurs que la philosophie passait (il pensait à l'édition par exemeple). L'agrégation forme un corps qui a
une tendance plus grande pour l'institué, l'établi que pour le nouveau, la différence. Ou peut-être ce texte serait-il issu de la confusion entre normalien et agrégé : cet esprit de corps
viendrait surtout des Normaliens, puisque "normalien agrégé" c'est un pléonasme quant à la philosophie. Cela amènerait alors un mea culpa, de notre part.
*"C'est la moindre des choses que ceux qui critiquent l'agrégation se donnent la peine de la passer. Dans le
cas contraire, leur discours pourrait être suspecté de ressentiment." (Oyseaulx, 06/06/07)
** introduction de la mauvaise conscience par intériorisation de la force, cf. Nietzsche VP II.
Pour continuer : Lire le texte sur la dissymétrie entre ce qui est origairement établi et ce qui est nouveau (à venir), c'est sur ce point que Deleuze a mis l'accent dans toute sa philosophie et
c'est aussi ce trait qui fait que Renaud Barbaras apprécie tant son côté subversif (et non ses aspects formels).