14 Juin 2025
Alors que l’épreuve tant redoutée du bac philo (c’est lundi 16 juin !) approche à grands pas, difficile de ne pas se laisser envahir par la peur. Mais difficile n’est pas impossible ! Nous vous proposons donc, avec le philosophe Alain, de remplacer la peur par le passage à l’action et le plaisir du jeu.
L’épreuve du baccalauréat de philosophie a lieu le lundi 16 juin. Et si c’était l’occasion idéale d’apprendre à déjouer la peur du grand saut ? Le philosophe français Alain (1868-1951), de son vrai nom Émile-Auguste Chartier, charismatique professeur de khâgne au lycée Henri-IV à Paris de 1909 à 1933 et connu pour ses chroniques journalistiques (il était un peu l’ancêtre de Philomag…), est le philosophe idéal pour nous accompagner dans la dernière ligne droite.
La peur de l’épreuve
Les « peurs sans mesure à l’approche d’un discours public ou d’un examen » qu’évoque le philosophe doivent certainement résonner chez les candidats qui s’apprêtent à passer le Grand Oral et l’examen de philosophie. Mais ce sont bien des « peurs sans mesure », car elles portent sur des « maux imaginaires », dont les dangers ne sont pas réels, ni tangibles, ni nettement identifiés. Ces « maux imaginaires » s’opposent aux « maux véritables » que sont la maladie, le deuil, la perte, la guerre… Le rôle de la philosophie n’est alors pas d’éradiquer la peur de l’épreuve mais de la tenir à distance. Comment ? En révélant tout ce que la peur a d’imaginaire, d’infondé et d’illusoire.
« La peur est proprement l’attente d’on ne sait quelle action que l’on va avoir à faire », écrit Alain dans Quatre-vingt-un chapitres sur l’esprit et les passions (1916). Elle correspond à l’attente qui précède l’action. Mais « la peur se nourrit d’elle-même », au sens où « l’incertitude et l’hésitation l’aggravent ». Elle est un cercle vicieux, où l’individu n’appréhende l’épreuve qu’à travers des biais cognitifs fatalistes (« de tout façon, je n’y arriverai pas ») ou nihilistes (« à quoi bon ? »). Paralysé par la peur, on en cherche la cause, on entre dans des boucles de spéculation infinies, on réécrit une énième fois le scénario dans notre tête pour venir à bout de cette action future dont on ne sait rien… en vain. Pire, « le raisonnement », pourtant cher à la philosophie, « ne peut rien ». Voilà qui n’est pas très rassurant…
Tactique n°1 : passer à l’action
Soyez rassurés : Alain préconise le passage à l’action productive pour mettre fin aux sursauts de peur. « L’action délivre de cette maladie », affirme le professeur de philosophie. Son conseil ? Effectuer « de petites actions assez difficiles et que l’on sait bien faire ». Subdiviser l’action finale (composer une copie de philosophie en quatre heures) en petites actions efficaces (relire ses cours, consulter les aides à la révision de Philosophie magazine, s’entraîner sur un sujet à l’aide des annales). Résultat : « on est aussitôt soulagé ». Comment l’expliquer ? Pour Alain, ces petites actions ont la vertu de nous occuper et ainsi de ne plus être dans l’attente, car « l’attente de la peur, c’est la peur même ». L’objet de notre vigilance est alors utilement dévié vers des tâches qui sont à notre portée, canalisant notre peur et provoquant une détente quasi-immédiate.
Tactique n°2 : se prendre au jeu
Il y a une seconde tactique : aborder l’épreuve de philosophie comme vous aborderiez un jeu. Le livre de notre philosophe-pédagogue renferme en effet un autre trésor de sagesse. Il nous invite à ne pas sous-estimer la puissance de la « passion du jeu », alimentée par « un désir de gagner mieux nourri que les désirs ordinaires ».
Quels sont les intérêts à se prendre au jeu ? Éloigner la peur : dans le jeu, pas de danger réel, seulement de la difficulté. Être déterminé à vaincre : vaincre de la difficulté posée par le texte ou la question philosophique peut avoir des allures de combat. Renoncer à choisir entre le stress moteur et le stress paralysant, qui ont leur origine dans une peur néfaste de l’épreuve. Le jeu implique de la détente sans pour autant sacrifier le sérieux. Avoir en tête les règles du jeu à tout moment : muni d’un stylo et de papier, vous avez quatre heures pour réfléchir à des notions philosophiques.
Rappelons-nous que le but de l’épreuve n’est pas de nous faire souffrir mais de nous faire réfléchir. Au lieu de penser que la question s’adresse à un programme de connaissances que nous aurions accumulées dans l’année, il faut se dire que la question nous est adressée personnellement, qu’elle vaut la peine d’être posée. Alain soulignait la force juvénile qui se déploie dans la pensée : « Chez les jeunes surtout, l’esprit est prompt à penser de nouveau le monde véritable et toute la vie. » Tout un programme…
Notre conseil, donc : jouez le jeu !