La Philosophie à Paris

Karl Marx

13 Février 2022, 19:04pm

Publié par La Philosophie

KARL MARX
par
Frederick Engels

 

Ecrit : mi-juin 1877 ;
Première publication : dans Volks-Kalender, Brunswick, 1878 ;
Source: Sur Marx;
Éditeur: Foreign Languages Press, Pékin (1975).
Consultable: Œuvres de Frederick Engels (1977).

Traduit: par Google  Capitaliste
Transcrit : par nos soins


Karl Marx, l’homme qui a été le premier à donner au socialisme, et donc à tout le mouvement ouvrier de notre époque, une fondation scientifique, est né à Trèves en 1818. Il étudia à Bonn et à Berlin, d’abord en prenant le droit, mais il se consacra bientôt exclusivement à l’étude de l’histoire et de la philosophie, et en 1842 était sur le point de s’établir comme professeur assistant de philosophie lorsque le mouvement politique qui avait surgi depuis la mort de Frédéric-Guillaume III orienta sa vie dans un canal différent. Avec sa collaboration, les dirigeants de la bourgeoisie libérale rhénane, les Camphausen, les Hansemann, etc., avaient fondé le Rheinische Zeitung à Cologne, et à l’automne 1842, Marx, dont la critique des travaux du Landtag rhénan (ou Diète provinciale) avait suscité une très grande attention, fut mis à la tête du journal. Le Rheinische Zeitung est naturellement apparu sous la censure, mais la censure n’a pas pu y faire face. [Le premier censeur du Rheinische Zeitung fut le conseiller de police Dolleschall, le même homme qui avait un jour rayé une publicité dans la Kölnische Zeittung de la traduction de la Divine Comédie de Dante par Philalethes (plus tard le roi Jean de Saxe) avec la remarque: « Il ne faut pas faire une comédie des affaires divines. » [Note d’Engels] Le Rheinische Zeitung a presque toujours fait passer les articles qui comptaient; le censeur a d’abord reçu du fourrage insignifiant pour qu’il puisse le frapper, jusqu’à ce qu’il cède lui-même ou soit qu’il soit contraint de céder par la menace que le journal n’apparaisse pas le lendemain. Dix journaux avec le même courage que le Rheinische Zeitung et dont les éditeurs auraient permis de dépenser quelques centaines de thalers supplémentaires pour la mise en forme de caractères – et la censure aurait été rendue impossible en Allemagne dès 1843. Mais les propriétaires de journaux allemands étaient des philistins mesquins et timides et le Rheinische Zeitung poursuivait seul la lutte. Il a usé un censeur après l’autre; finalement, il a fait l’objet d’une double censure; après la première censure, le Regierungspräsident avait une fois de plus, et finalement, de le censurer. Cela n’a pas non plus servi à grand-chose. Au début de 1843, le gouvernement déclara qu’il était impossible de contrôler ce journal et le supprima sans plus tarder.

Marx, qui entre-temps avait épousé la sœur de von Westphalen, plus tard ministre réactionnaire, s’installa à Paris et y publia, en collaboration avec A. Ruge, le Deutsch-Französische Jahrbücher, dans lequel il ouvrit la série de ses écrits socialistes par une Critique de la philosophie hégélienne de droite ; puis, avec F. Engels, La Sainte Famille. Contre Bruno Bauer and Co., une critique satirique de l’une des dernières formes maladroitement assumées par l’idéalisme philosophique allemand de l’époque.

L’étude de l’économie politique et de l’histoire de la Grande Révolution Français laissait encore suffisamment de temps à Marx pour des attaques occasionnelles contre le gouvernement prussien ; ce dernier se venge au printemps 1845 en obtenant du ministère Guizot — M. Alexander von Humboldt aurait agi comme intermédiaire — son expulsion de France. Marx déplaça son domicile à Bruxelles et y publia dans Français en 1847 La Pauvreté de la philosophie, une critique de la Philosophie de la pauvreté de Proudhon, et, en 1848, Discours sur le libre-échange. En même temps, il saisit l’occasion de fonder une société ouvrière allemande à Bruxelles et commença ainsi une agitation pratique. Ce dernier devint encore plus important pour lui lorsque lui et ses amis politiques rejoignirent en 1847 la Ligue communiste secrète, qui existait déjà depuis un certain nombre d’années. Toute sa structure était maintenant radicalement changée; cette association, qui était auparavant plus ou moins conspiratrice, s’est transformée en une simple organisation de propagande communiste, qui n’était secrète que parce que la nécessité l’obligeait à l’être, la première organisation du Parti social-démocrate allemand. La Ligue existait partout où se trouvaient les sociétés ouvrières allemandes ; dans presque toutes ces sociétés en Angleterre, en Belgique, en France et en Suisse, et dans de très nombreuses sociétés en Allemagne, les principaux membres appartenaient à la Ligue et la part de la Ligue dans le mouvement ouvrier allemand naissant était très considérable. De plus, notre Ligue a été la première à souligner le caractère international de l’ensemble du mouvement ouvrier et à le réaliser dans la pratique, qui avait des Anglais, des Belges, des Hongrois, des Polonais, etc., comme membres et qui organisait des réunions syndicales internationales, en particulier à Londres.

La transformation de la Ligue a eu lieu lors de deux congrès tenus en 1847, dont le second a décidé de l’élaboration et de la publication des principes fondamentaux du Parti dans un manifeste qui sera rédigé par Marx et Engels. C’est ainsi qu’est né le Manifeste du Parti communiste, qui est apparu pour la première fois en 1848, peu avant la Révolution de Février, et a depuis été traduit dans presque toutes les langues européennes.

La Deutsche-Brüsseler-Zeitung, à laquelle Marx a participé et qui a exposé sans pitié les bénédictions du régime policier de la Patrie, a amené le gouvernement prussien à tenter d’expulser Marx une fois de plus, mais en vain. Cependant, lorsque la Révolution de Février a donné lieu à des mouvements populaires à Bruxelles et qu’un changement radical semblait imminent en Belgique, le gouvernement belge a arrêté Marx sans cérémonie et l’a déporté. Entre-temps, le gouvernement provisoire Français lui avait envoyé une invitation par l’intermédiaire de Flocon à retourner à Paris, et il accepta cet appel.

À Paris, il s’est particulièrement opposé à l’escroquerie, répandue parmi les Allemands là-bas, de vouloir former les travailleurs allemands en France en légions armées afin de porter la révolution et la république en Allemagne. D’une part, l’Allemagne devait faire elle-même sa révolution et, d’autre part, toute légion étrangère révolutionnaire formée en France était trahie à l’avance par les Lamartines du gouvernement provisoire au gouvernement qui devait être renversé, comme cela s’est produit en Belgique et à Baden.

Après la Révolution de Mars, Marx se rendit à Cologne et y fonda la Neue Rheinische Zeitung, qui exista du 1er juin 1848 au 19 mai 1849 – le seul journal qui représentait le point de vue du prolétariat au sein du mouvement démocratique de l’époque, comme le montre son championnat sans réserve des insurgés de Paris de juin 1848, ce qui a coûté au journal la défection de la quasi-totalité de ses actionnaires. En vain, le Kreuz-Zeitung a souligné « l’impudence chimborazo » avec laquelle la Neue Rheinische Zeitung attaquait tout ce qui était sacré, du roi et vice-régent du royaume jusqu’au gendarme, et cela aussi dans une forteresse prussienne avec une garnison de 8 000 personnes à l’époque. En vain, la rage des philistins libéraux rhénans, devenus soudain réactionnaires. En vain, le journal fut suspendu par la loi martiale à Cologne pendant une longue période à l’automne 1848. En vain, le ministère de la Justice du Reich à Francfort a dénoncé article après article au procureur de Cologne afin que des poursuites judiciaires soient engagées. Sous les yeux mêmes de la police, le journal continua calmement à être édité et imprimé, et sa distribution et sa réputation augmentèrent avec la véhémence de ses attaques contre le gouvernement et la bourgeoisie. Lorsque le coup d’État prussien eut lieu en novembre 1848, la Neue Rheinische Zeitung appela le peuple, à la tête de chaque numéro, à refuser de payer des impôts et à affronter la violence par la violence. Au printemps de 1849, tant pour ce compte qu’à cause d’un autre article, il fut fait face à un jury, mais à chaque fois il fut acquitté. Enfin, lorsque les soulèvements de mai 1849 à Dresde et dans la province du Rhin eurent été réprimés, et que la campagne prussienne contre le soulèvement du Bade-Palatinat eut été inaugurée par la concentration et la mobilisation de masses considérables de troupes, le gouvernement se crut assez fort pour réprimer la Neue Rheinische Zeitung par la force. Le dernier numéro – imprimé à l’encre rouge – est paru le 19 mai.

Une tentative de continuer à publier la Neue Rheinische Zeitung sous la forme d’une revue (à Hambourg, 1850) a dû être abandonnée après un certain temps en raison de la violence toujours croissante de la réaction. Immédiatement après le coup d’État en France en décembre 1851, Marx publie Le Dix-huitième Brumaire de Louis Bonaparte (New York, 1852 ; deuxième édition, Hambourg, 1869, peu avant la guerre). En 1853, il écrivit Revelations About the Cologne Communist Trial (d’abord imprimé à Bâle, plus tard à Boston, et de nouveau récemment à Leipzig).

Après la condamnation des membres de la Ligue communiste de Cologne, Marx se retire de l’agitation politique et se consacre pendant dix ans, d’une part, à l’étude des riches trésors offerts par la bibliothèque du British Museum dans le domaine de l’économie politique et, d’autre part, à écrire pour le New York Tribune. , qui jusqu’au déclenchement de la guerre de Sécession a publié non seulement des contributions signées par lui, mais aussi de nombreux articles de premier plan de sa plume sur les conditions en Europe et en Asie. Ses attaques contre Lord Palmerston, basées sur une étude exhaustive des documents officiels britanniques, ont été réimprimées à Londres sous forme de pamphlet.

Premier fruit de ses nombreuses années d’études d’économie, parut en 1859 A Contribution to the Critique of Political Economy, Part I (Berlin, Duncker). Cet ouvrage contient la première exposition cohérente de la théorie marxiste de la valeur, y compris la doctrine de l’argent. Pendant la guerre d’Italie, Marx, dans le journal allemand Das Volk, paru à Londres, attaqua le bonapartisme, qui à l’époque se présentait comme libéral et jouant le rôle de libérateur des nationalités opprimées, ainsi que la politique prussienne de l’époque, qui, sous couvert de neutralité, cherchait à pêcher dans des eaux troubles. À cet égard, il fallait attaquer aussi M. Karl Vogt, qui à cette époque, à la demande du prince Napoléon (Plon Plon) et à la solde de Louis Napoléon, poursuivait l’agitation pour la neutralité, et même la sympathie, de l’Allemagne. Quand Vogt lui imposa les calomnies les plus abominables et délibérément fausses, Marx répondit avec Herr Vogt (Londres, 1860), dans lequel Vogt et les autres messieurs de la bande impérialiste fausse-démocratique furent exposés, et Vogt lui-même sur la base de preuves externes et internes fut reconnu coupable d’avoir accepté des pots-de-vin de l’empire de décembre. La confirmation est venue à peine dix ans plus tard: dans la liste des loueurs bonaparte, trouvée aux Tuileries en 1870 et publiée par le gouvernement de septembre, il y avait l’entrée suivante sous la lettre V: « Vogt - en août 1859, il lui a été remis - Frs. 40 000. »

Enfin, en 1861 parut dans Hamburg Capital, une Analyse critique de la production capitaliste, volume I, l’ouvrage principal de Marx, qui expose les fondements de ses conceptions socialistes économiques et les principales caractéristiques de sa critique de la société existante, du mode de production capitaliste et de ses conséquences. La deuxième édition de cet ouvrage d’époque parut en 1872 ; l’auteur est engagé dans l’élaboration du deuxième volume.

Entre-temps, le mouvement ouvrier dans divers pays d’Europe avait jusqu’à présent repris de la force que Marx pouvait envisager l’idée de réaliser un souhait longtemps chéri: la fondation d’une Association ouvrière englobant les pays les plus avancés d’Europe et d’Amérique, qui démontrerait corporellement, pour ainsi dire, le caractère international du mouvement socialiste à la fois aux travailleurs eux-mêmes et aux bourgeois et aux gouvernements - pour l’encouragement et le renforcement du prolétariat, pour avoir semé la peur dans le cœur de ses ennemis. Une réunion de masse en faveur de la Pologne, qui venait alors d’être à nouveau écrasée par la Russie, tenue le 28 septembre 1864 au St. Martin’s Hall de Londres, fut l’occasion de faire avancer la question, qui fut abordée avec enthousiasme. L’Association internationale des travailleurs a été fondée; un Conseil général provisoire, dont le siège est à Londres, a été élu lors de la réunion, et Marx en a été l’âme comme de tous les conseils généraux ultérieurs jusqu’au Congrès de La Haye. Il rédige presque tous les documents publiés par le Conseil général de l’Internationale, du discours inaugural de 1864 au discours sur la guerre civile en France en 1871. Décrire l’activité de Marx dans l’Internationale, c’est écrire l’histoire de cette Association, qui de toute façon vit encore dans la mémoire des travailleurs européens.

La chute de la Commune de Paris a mis l’Internationale dans une position impossible. Elle a été propulsée au premier plan de l’histoire européenne à un moment où elle avait partout été privée de toute possibilité d’action pratique réussie. Les événements qui l’ont élevée à la position de septième grande puissance lui interdisaient simultanément de mobiliser ses forces combattantes et de les employer dans l’action, sous peine de défaite inévitable et de recul du mouvement ouvrier pendant des décennies. En outre, de divers côtés, des éléments se poussaient vers l’avant qui cherchaient à exploiter la renommée soudainement accrue de l’Association dans le but de satisfaire la vanité personnelle ou l’ambition personnelle, sans comprendre la position réelle de l’Internationale ou sans tenir compte de celle-ci. Une décision héroïque devait être prise, et c’est encore Marx qui l’a prise et qui l’a prise et qui l’a prise au Congrès de La Haye. Dans une résolution solennelle, l’Internationale a décliné toute responsabilité pour les agissements des Bakouninistes, qui formaient le centre de ces éléments déraisonnables et peu recommandables. Puis, compte tenu de l’impossibilité de satisfaire, face à la réaction générale, les exigences accrues qui lui étaient imposées, et de maintenir sa pleine efficacité autrement que par une série de sacrifices qui auraient vidé le mouvement ouvrier de son sang vital - au vu de cette situation, l’Internationale s’est retirée de la scène pour le moment en transférant le Conseil général en Amérique. Les résultats ont prouvé à quel point cette décision était correcte – qui était à l’époque, et a été depuis, si souvent censurée. D’une part, il a mis un terme alors et de toutes les tentatives de faire des putschs inutiles au nom de l’Internationale, tandis que, d’autre part, les rapports étroits et continus entre les partis ouvriers socialistes des différents pays ont prouvé que la conscience de l’identité des intérêts et de la solidarité du prolétariat de tous les pays évoquée par l’Internationale est capable de s’affirmer même sans le lien de une association internationale formelle, qui pour l’instant était devenue un obstacle. 

Après le Congrès de La Haye, Marx retrouva enfin la paix et le loisir pour reprendre son travail théorique, et il faut espérer qu’il pourra bientôt avoir le deuxième volume du Capital prêt pour la presse.

Parmi les nombreuses découvertes importantes par lesquelles Marx a inscrit son nom dans les annales de la science, nous ne pouvons ici nous attarder que sur deux. 

La première est la révolution qu’il a apportée dans toute la conception de l’histoire du monde. Toute la vision antérieure de l’histoire était basée sur la conception que les causes ultimes de tous les changements historiques doivent être recherchées dans les idées changeantes des êtres humains, et que de tous les changements historiques, les changements politiques sont les plus importants et dominent l’ensemble de l’histoire. Mais la question n’a pas été posée de savoir d’où les idées viennent dans l’esprit des hommes et quelles sont les causes profondes des changements politiques. Ce n’est que sur la nouvelle école de Français, et en partie aussi de l’anglais, que les historiens ont eu la conviction que, depuis le Moyen Âge au moins, la force motrice de l’histoire européenne était la lutte de la bourgeoisie en développement avec l’aristocratie féodale pour la domination sociale et politique. Maintenant, Marx a prouvé que toute l’histoire antérieure est une histoire de luttes de classe, que dans toutes les luttes politiques multiples et compliquées, la seule chose en jeu a été la domination sociale et politique des classes sociales, le maintien de la domination par les classes plus anciennes et la conquête de la domination par les classes nouvellement émergentes. Mais à quoi ces classes doivent-elles leur origine et leur existence ? Ils le doivent aux conditions matérielles et physiquement sensibles particulières dans lesquelles la société à une période donnée produit et échange ses moyens de subsistance. La domination féodale du Moyen Âge reposait sur l’économie autosuffisante des petites communautés paysannes, qui produisaient elles-mêmes presque toutes leurs exigences, dans lesquelles il n’y avait presque pas d’échange et à laquelle la noblesse armée prêtait une protection contre l’absence et la cohésion nationale ou au moins politique. Lorsque les villes sont apparues et avec elles une industrie artisanale et commerciale séparée, d’abord internes et plus tard internationales, la bourgeoisie urbaine s’est développée, et déjà au Moyen Âge a réalisé, dans la lutte avec la noblesse, son inclusion dans l’ordre féodal comme un domaine privilégié. Mais avec la découverte du monde extra-européen, à partir du milieu du XVe siècle, cette bourgeoisie a acquis une sphère de commerce beaucoup plus étendue et donc un nouvel élan pour son industrie; dans les branches les plus importantes, l’artisanat a été supplanté par la fabrication, maintenant à l’échelle de l’usine, et cela a de nouveau été supplanté par la grande industrie, qui était devenue possible grâce aux découvertes du siècle précédent, en particulier celle de la machine à vapeur. La grande industrie, à son tour, a réagi au commerce en chassant l’ancien travail manuel dans les pays arriérés et en créant les nouveaux moyens de communication actuels: machines à vapeur, chemins de fer, télégraphie électrique, dans les plus développés. Ainsi, la bourgeoisie en vint de plus en plus à combiner richesse sociale et pouvoir social entre ses mains, alors qu’elle restait encore longtemps exclue du pouvoir politique, qui était entre les mains de la noblesse et de la monarchie soutenues par la noblesse. Mais à un certain stade – en France depuis la Grande Révolution – il a également conquis le pouvoir politique, et est maintenant devenu à son tour la classe dirigeante sur le prolétariat et les petits paysans. De ce point de vue, tous les phénomènes historiques sont explicables de la manière la plus simple possible — avec une connaissance suffisante de la condition économique particulière de la société, ce qui, il est vrai, fait totalement défaut à nos historiens professionnels, et de la même manière les conceptions et les idées de chaque période historique doivent être expliquées le plus simplement à partir des conditions économiques de la vie et des relations sociales et politiques de l’époque, qui sont à leur tour déterminés par ces conditions économiques. L’histoire a été pour la première fois placée sur sa base réelle; le fait palpable mais jusque-là totalement négligé que les hommes doivent d’abord manger, boire, avoir un abri et des vêtements, et donc travailler, avant de pouvoir se battre pour la domination, poursuivre la politique, la religion, la philosophie et ainsi de suite – ce fait palpable est enfin entré dans ses droits historiques. Cette nouvelle conception de l’histoire, cependant, était d’une importance suprême pour la perspective socialiste. Il a montré que toute l’histoire précédente avait évolué dans les antagonismes de classe et les luttes de classe, qu’il y a toujours eu des classes dirigeantes et gouvernées, exploiteuses et exploitées, et que la grande majorité de l’humanité a toujours été condamnée à un travail pénible et à peu de jouissance. Pourquoi ? Tout simplement parce que dans tous les premiers stades de développement de l’humanité, la production était si peu développée que le développement historique ne pouvait se dérouler que sous cette forme antagoniste, que le progrès historique dans son ensemble était assigné à l’activité d’une petite minorité privilégiée, tandis que la grande masse restait condamnée à produire par leur travail leurs propres maigres moyens de subsistance et aussi les moyens de plus en plus riches des privilégiés. Mais la même enquête sur l’histoire, qui fournit ainsi une explication naturelle et raisonnable de la règle de classe précédente, autrement seulement explicable par la méchanceté de l’homme, conduit également à la réalisation que, en conséquence des forces productives considérablement accrues du temps présent, même le dernier prétexte a disparu pour une division de l’humanité en ruIers et gouverné, exploiteurs et exploités, du moins dans les pays les plus avancés; que la grande bourgeoisie dirigeante a rempli sa mission historique, qu’elle n’est plus capable de diriger la société et qu’elle est même devenue un obstacle au développement de la production, comme l’ont prouvé les crises commerciales, et surtout le dernier grand effondrement, et la dépression de l’industrie dans tous les pays; que la direction historique est passée au prolétariat, une classe qui, en raison de toute sa position dans la société, ne peut se libérer qu’en abolissant complètement toute domination de classe, toute servitude et toute exploitation; et que les forces productives sociales, qui ont dépassé le contrôle de la bourgeoisie, n’attendent que le prolétariat associé pour en prendre possession pour parvenir à un état de choses dans lequel chaque membre de la société pourra participer non seulement à la production, mais aussi à la distribution et à l’administration des richesses sociales, et qui augmente ainsi les forces productives sociales et leur rendement par le fonctionnement planifié de l’ensemble de la production que la satisfaction de tous les besoins raisonnables sera assurée à tous dans une mesure toujours croissante.

La deuxième découverte importante de Marx est l’élucidation finale de la relation entre le capital et le travail, en d’autres termes, la démonstration comment, dans la société actuelle et sous le mode de production capitaliste existant, l’exploitation du travailleur par le capitaliste a lieu. Depuis que l’économie politique a avancé la proposition que le travail est la source de toute richesse et de toute valeur, la question est devenue inévitable : comment cela peut-il alors être concilié avec le fait que le salarié ne reçoit pas toute la somme de valeur créée par son travail mais doit en céder une partie au capitaliste ? Tant les économistes bourgeois que les socialistes se sont efforcés de donner une réponse scientifiquement valable à cette question, mais en vain, jusqu’à ce que Marx propose enfin la solution. Cette solution est la suivante : Le mode de production capitaliste actuel présuppose l’existence de deux classes sociales – d’une part, celle des capitalistes, qui sont en possession des moyens de production et de subsistance, et, d’autre part, celle des prolétaires, qui, étant exclus de cette possession, n’ont qu’une seule marchandise à vendre, leur force de travail, et qui doivent donc vendre cette force de travail qui est la leur pour obtenir la possession de moyens de subsistance. La valeur d’une marchandise est cependant déterminée par la quantité socialement nécessaire de travail incarnée dans sa production et, par conséquent, aussi dans sa reproduction; la valeur de la force de travail d’un être humain moyen au cours d’un jour, d’un mois ou d’une année est donc déterminée par la quantité de travail incorporée dans la quantité de moyens de subsistance nécessaires au maintien de cette force de travail au cours d’une journée, d’un mois ou d’une année. Supposons que les moyens de subsistance d’un travailleur pendant une journée nécessitent six heures de travail pour sa production, ou, ce qui est la même chose, que le travail qu’ils contiennent représente une quantité de travail de six heures; alors la valeur de la force de travail pour une journée sera exprimée en une somme d’argent qui incarne également six heures de travail. Supposons en outre que le capitaliste qui emploie notre ouvrier lui paie cette somme en retour, lui paie, par conséquent, la pleine valeur de sa force de travail. Si maintenant l’ouvrier travaille six heures par jour pour le capitaliste, il a complètement remplacé la dépense de ce dernier – six heures de travail pour six heures de travail. Mais alors il n’y aurait rien dedans pour le capitaliste, et ce dernier voit donc la question tout à fait différemment. Il dit: J’ai acheté la force de travail de ce travailleur non pas pour six heures, mais pour une journée entière, et en conséquence il fait travailler le travailleur 8, 10, 12, 14 heures ou plus, selon les circonstances, de sorte que le produit des septième, huitième heures et suivantes est un produit du travail non rémunéré et erre, pour commencer, dans la poche du capitaliste. Ainsi, l’ouvrier au service du capitaliste non seulement reproduit la valeur de sa force de travail, pour laquelle il reçoit un salaire, mais au-delà de cela, il produit aussi une plus-value qui, appropriée en premier lieu par le capitaliste, est dans son cours ultérieur divisé selon des lois économiques définies entre toute la classe capitaliste et forme le stock de base d’où naît la rente foncière, le profit, l’accumulation du capital, bref, toute la richesse consommée ou accumulée par les classes non laborieuses. Ceci, cependant, a prouvé que l’acquisition de richesses par les capitalistes d’aujourd’hui consiste tout autant dans l’appropriation du travail non rémunéré des autres que celle du propriétaire d’esclaves ou du seigneur féodal exploitant le travail des serfs, et que toutes ces formes d’exploitation ne doivent être distinguées que par la différence de manière et de méthode par laquelle le travail non rémunéré est approprié. Cependant, cela a également supprimé la dernière justification de toutes les phrases hypocrites des classes possédantes selon lesquelles, dans l’ordre social actuel, le droit et la justice, l’égalité des droits et des devoirs et une harmonie générale des intérêts prévalent, et a exposé la société bourgeoise actuelle, pas moins que ses prédécesseurs, comme une institution grandiose pour l’exploitation de l’immense majorité du peuple par une petite, minorité de plus en plus réduite.

Le socialisme moderne et scientifique est basé sur ces deux faits importants. Dans le deuxième volume de Capital, ces découvertes scientifiques et d’autres à peine moins importantes concernant le système capitaliste de la société seront développées davantage, et ainsi les aspects de l’économie politique non abordés dans le premier volume subiront également une révolution. Qu’il soit garanti à Marx de pouvoir bientôt le préparer pour la presse.

 

 


Cet extrait d'un discours d’Engels 

Écrit: Engels a éécrit Projet de discours sur la tombe de Karl Marx en mars 1883;
Première publication : dans le journal La Justice, 20 mars 1883 ;

Traduit: par Google à partir du brouillon d'Engels
Transcrit : par nos soins


 

Marx et moi, depuis 1845, sommes d’avis que l’un des résultats finaux de la future révolution prolétarienne sera la dissolution progressive et la disparition ultime de cette organisation politique appelée l’État ; une organisation dont l’objectif principal a toujours été d’assurer, par la force armée, la soumission économique de la majorité ouvrière à la minorité riche. Avec la disparition d’une minorité riche, la nécessité d’une force d’État répressive armée disparaît également. En même temps, nous avons toujours soutenu que pour arriver à cette fin et à l’autre, beaucoup plus importantes, de la révolution sociale de l’avenir, la classe prolétarienne devra d’abord se posséder de la force politique organisée de l’État et, avec son aide, éradiquer la résistance de la classe capitaliste et réorganiser la société. Ceci est déjà indiqué dans le Manifeste communiste de 1847, fin du chapitre II.

« Les anarchistes inversent la situation. Ils disent que la révolution prolétarienne doit commencer par abolir l’organisation politique de l’État. Mais après la victoire du prolétariat, la seule organisation que la classe ouvrière victorieuse trouve prête à l’emploi, c’est celle de l’État. Il peut être nécessaire de l’adapter aux nouvelles fonctions. Mais détruire cela à un tel moment, ce serait détruire le seul organisme par lequel la classe ouvrière victorieuse peut exercer son pouvoir nouvellement conquis, maintenir à bas ses ennemis capitalistes et mener à bien cette révolution économique de la société, sans laquelle toute la victoire doit se terminer par une défaite et par un massacre de la classe ouvrière comme celui après la Commune de Paris.

Cela nécessite-t-il mon affirmation expresse, que Marx s’est opposé à ces absurdités anarchistes dès le premier jour où elles ont été commencées dans leur forme actuelle par Bakounine ? Toute l’histoire interne de l’Association internationale des travailleurs est là pour le prouver. Les anarchistes ont essayé d’obtenir la direction de l’Internationale par les moyens les plus grossiers, depuis 1867 et le principal obstacle sur leur chemin était Marx. Le résultat de la lutte de cinq ans fut l’expulsion, au Congrès de La Haye, en septembre 1872, des anarchistes de l’Internationale, et l’homme qui fit le plus pour obtenir cette expulsion, fut Marx. Notre vieil ami F. A. Sorge de Hoboken, qui était présent en tant que délégué, peut vous donner plus de détails si vous le souhaitez.


Cette présentation est basée sur la version d’Engels 

Écrit: Engels a éécrit Projet de discours sur la tombe de Karl Marx en mars 1883;
Première publication : dans le journal La Justice, 20 mars 1883 ;

Traduit: par Google à partir du brouillon d'Engels
Transcrit : par nos soins


 

Karl Marx était l’un de ces hommes prééminents dont un siècle ne produit pas grand-chose. Charles Darwin a découvert la loi du développement de la nature organique sur notre planète. Marx est le découvreur de la loi fondamentale selon laquelle l’histoire humaine se déplace et se développe, une loi si simple et évidente que sa simple énonciation est presque suffisante pour obtenir l’assentiment. Pas assez avec cela, Marx avait aussi découvert la loi [qui] a créé notre état actuel de la société avec sa grande division de classe des capitalistes et des travailleurs salariés; la loi selon laquelle cette société s’est organisée, s’est développée jusqu’à ce qu’elle soit presque dépassée, et selon laquelle elle doit finalement périr comme toutes les phases historiques précédentes de la société. De tels résultats rendent d’autant plus douloureux qu’il aurait dû nous être enlevé au milieu de son œuvre, et que, tout comme il l’a fait, il en a laissé encore plus inachevé.

Mais la science, bien que chère à lui, était loin de l’absorber entièrement. Aucun homme ne pouvait ressentir une joie plus pure que lui lorsqu’un nouveau progrès scientifique était assuré n’importe où, qu’il soit pratiquement applicable ou non. Mais il considérait la science avant tout comme un grand levier historique, comme une puissance révolutionnaire au sens le plus éminent du terme. Et en tant que tel, il a utilisé, à cette fin, il a exercé cette immense connaissance, en particulier de l’histoire dans toutes ses branches dont il disposait.

Car il était en effet, ce qu’il s’appelait lui-même, un révolutionnaire. La lutte pour l’émancipation de la classe des travailleurs salariés des entraves du système capitaliste actuel de production économique était son véritable élément. Et il n’y a jamais eu de combattant plus actif qu’il n’a jamais existé. Le couronnement de cette partie de son travail fut la création de l’Association internationale des travailleurs dont il fut le chef de file reconnu de 1864 à 72. L’Association a disparu, en ce qui concerne le spectacle extérieur; mais le lien fraternel d’union des travailleurs de tous les pays civilisés d’Europe et d’Amérique s’établit une fois pour toutes, et continue de vivre même sans aucun lien d’union extérieur et formel.

Aucun homme ne peut se battre pour n’importe quelle cause sans créer d’ennemis. Et il en a eu beaucoup. Pendant la plus grande partie de sa vie politique, il a été l’homme le mieux haï et le mieux calomnié d’Europe. Mais il n’a presque jamais remarqué la calomnie. Si jamais l’homme vivait la calomnie, il le faisait, et au moment de sa mort, il pouvait regarder avec fierté les millions de ses disciples, dans les mines de Sibérie ainsi que dans les ateliers d’Europe et d’Amérique; il voyait ses théories économiques adoptées comme le credo incontesté du socialisme universel, et s’il avait encore beaucoup d’opposants, il ne lui restait plus qu’un seul ennemi personnel.


Cette courte biographie est basée sur la version d’Engels écrite à la fin du mois de juillet 1868 pour le journal littéraire allemand Die Gartenlaube, dont les éditeurs ont décidé de ne pas l’utiliser.

Écrit: Engels l’a réécrit vers le 28 juillet 1869;
Première publication : dans Die Zukunft, n° 185, 11 août 1869 ;
Traduit: par Google à partir d'une traduciotn anglaise de Joan et Trevor Walmsley;
Transcrit : par nos soins


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Karl Marx est né le 5 mai 1818 à Trèves, où il a reçu une éducation classique. Il étudia la jurisprudence à Bonn et plus tard à Berlin, où, cependant, sa préoccupation pour la philosophie le détourna bientôt du droit. En 1841, après avoir passé cinq ans dans la « métropole des intellectuels », il retourne à Bonn avec l’intention d’être habilité. À cette époque, la première « Nouvelle Ère » était en vogue en Prusse. Frédéric-Guillaume IV avait déclaré son amour pour une opposition loyale, et des tentatives étaient faites dans divers milieux pour en organiser une. C’est ainsi que la Rheinische Zeitung fut fondée à Cologne ; Avec une audace sans précédent, Marx l’utilisa pour critiquer les délibérations de l’Assemblée de la province du Rhin, dans des articles qui attirèrent une grande attention. À la fin de 1842, il prit lui-même la direction et fut une telle épine dans le pied des censeurs qu’ils lui firent l’honneur d’envoyer un censeur [Wilhelm Saint-Paul] de Berlin spécialement pour s’occuper de la Rheinische Zeitung. Lorsque cela s’est avéré inutile non plus, le journal a été soumis à une double censure, car, en plus de la procédure habituelle, chaque question a été soumise à une deuxième étape de censure par le bureau du Regierungspresident de Cologne [Karl Heinrich von Gerlach]. Mais cette mesure ne fut pas non plus d’une quelconque utilité contre la « malveillance obstinée » de la Rheinische Zeitung et, au début de 1843, le ministère publia un décret déclarant que la Rheinische Zeitung devait cesser de paraître à la fin du premier trimestre. Marx a immédiatement démissionné car les actionnaires voulaient tenter un règlement, mais cela n’a pas abouti non plus et le journal a cessé de paraître.

Sa critique des délibérations de l’Assemblée de la province du Rhin obligea Marx à étudier des questions d’intérêt matériel. En poursuivant cela, il s’est trouvé confronté à des points de vue dont ni la jurisprudence ni la philosophie n’avaient tenu compte. Partant de la philosophie hégélienne du droit, Marx est arrivé à la conclusion que ce n’était pas l’État, que Hegel avait décrit comme le « sommet de l’édifice », mais la « société civile », que Hegel avait considérée avec dédain, qui était la sphère dans laquelle une clé de compréhension du processus du développement historique de l’humanité devait être recherchée. Cependant, la science de la société civile est l’économie politique, et cette science ne pouvait pas être étudiée en Allemagne, elle ne pouvait être étudiée à fond qu’en Angleterre ou en France.

Par conséquent, à l’été 1843, après avoir épousé la fille du conseiller privé von Westphalen à Trèves (sœur des von Westphalen qui devint plus tard ministre prussien de l’Intérieur), Marx s’installa à Paris, où il se consacra principalement à l’étude de l’économie politique et de l’histoire de la grande révolution Français. En même temps, il collabora avec Ruge à la publication du Deutsch-Französische Jahrbücher, dont un seul numéro devait paraître. Expulsé de France par Guizot en 1845, il se rend à Bruxelles et y reste, poursuivant les mêmes études, jusqu’au déclenchement de la révolution de février. Le peu d’accord qu’il y avait avec la version communément acceptée du socialisme, même dans sa forme la plus érudite, a été montré dans sa critique de l’œuvre majeure de Proudhon, Philosophie de la misère, parue en 1847 à Bruxelles et à Paris sous le titre de La pauvreté de la philosophie. Dans ce travail se trouvent déjà de nombreux points essentiels de la théorie qu’il a maintenant présentés en détail. Le Manifeste du Parti communiste, Londres, 1848, écrit avant la révolution de février et adopté par un congrès ouvrier à Londres, est aussi substantiellement son œuvre.

Expulsé une fois de plus, cette fois par le gouvernement belge sous l’influence de la panique provoquée par la révolution de février, Marx retourne à Paris à l’invitation du gouvernement provisoire Français. Le raz-de-marée de la révolution a relégué au second plan toutes les activités scientifiques ; ce qui importait maintenant, c’était de s’impliquer dans le mouvement. Après avoir travaillé pendant ces premiers jours turbulents contre les notions absurdes des agitateurs, qui voulaient organiser les travailleurs allemands de France comme volontaires pour lutter pour une république en Allemagne, Marx se rendit à Cologne avec ses amis et y fonda la Neue Rheinische Zeitung, qui parut jusqu’en juin 1849 et dont les gens du Rhin se souviennent encore bien aujourd’hui. La liberté de la presse de 1848 n’a probablement pas été exploitée avec autant de succès qu’à cette époque, au milieu d’une forteresse prussienne, par ce journal. Après que le gouvernement eut tenté en vain de faire taire le journal en le persécutant devant les tribunaux – Marx fut traduit à deux reprises devant les assises pour une infraction aux lois sur la presse et pour avoir incité les gens à refuser de payer leurs impôts, et fut acquitté à deux reprises – il dut fermer au moment des révoltes de mai 1849 lorsque Marx fut expulsé sous prétexte qu’il n’était plus un sujet prussien, des prétextes similaires sont utilisés pour expulser les autres éditeurs. Marx dut donc retourner à Paris, d’où il fut de nouveau expulsé et d’où, à l’été 1849, [vers le 26 août 1849] il se rendit à son domicile actuel à Londres.

À Londres à cette époque a été assemblée toute la fleur fine des réfugiés de toutes les nations du continent. Des comités révolutionnaires de toutes sortes ont été formés, des combinaisons, des gouvernements provisoires en partibus infidelium, [littéralement: dans des parties habitées par des infidèles. Les mots sont ajoutés au titre des évêques catholiques romains nommés dans des diocèses purement nominaux dans des pays non chrétiens; ici, cela signifie « en exil »] il y a eu des querelles et des querelles de toutes sortes, et les messieurs concernés considèrent sans doute maintenant cette période comme la plus infructueuse de leur vie. Marx est resté à l’écart de toutes ces intrigues. Pendant un certain temps, il continua à produire sa Neue Rheinische Zeitung sous la forme d’une revue mensuelle (Hambourg, 1850), plus tard il se retira au British Museum et travailla à travers l’immense bibliothèque qui n’y avait pas encore été examinée pour tout ce qu’elle contenait sur l’économie politique. En même temps, il était un collaborateur régulier du New York Tribune, agissant, jusqu’au déclenchement de la guerre de Sécession, pour ainsi dire, en tant que rédacteur en chef de la politique européenne de ce journal anglo-américain de premier plan.

Le coup d’État du 2 décembre l’incita à écrire un pamphlet, The Eighteenth Brumaire of Louis Bonaparte, New York, 1852, qui vient d’être réimprimé (Meissner, Hambourg), et qui apportera une contribution non négligeable à la compréhension de la position intenable dans laquelle ce même Bonaparte vient de se retrouver. Le héros du coup d’État est présenté ici tel qu’il est réellement, dépouillé de la gloire dont son succès momentané l’a entouré. Le philistin qui considère son Napoléon III comme le plus grand homme du siècle et qui est incapable maintenant de s’expliquer comment ce génie miraculeux en vient soudainement à faire fleurir après floraison et une erreur politique après l’autre – ce même philistin peut consulter l’œuvre susmentionnée de Marx pour son édification.

Bien que pendant tout son séjour à Londres, Marx ait choisi de ne pas se mettre au premier plan, il a été forcé par Karl Vogt, après la campagne d’Italie de 1859, d’entrer dans une polémique, qui a pris fin avec Herr Vogt de Marx (Londres, 1860). À peu près à la même époque, son étude de l’économie politique a porté ses premiers fruits : A Contribution to the Critique of Political Economy, Part One, Berlin, 1859. Cet épisode ne contient que la théorie de l’argent présentée à partir d’aspects complètement nouveaux. La suite était à venir, car l’auteur a découvert tellement de nouveaux matériaux entre-temps qu’il a jugé nécessaire d’entreprendre d’autres études.

Enfin, en 1867, il est apparu à Hambourg: Capitale. Une critique de l’économie politique, Volume I. Ce travail contient les résultats d’études auxquelles toute une vie a été consacrée. C’est l’économie politique de la classe ouvrière, réduite à sa formulation scientifique. Ce travail ne s’intéresse pas à des phrases enflammées, mais à des déductions strictement scientifiques. Quelle que soit l’attitude de chacun à l’égard du socialisme, il faudra en tout cas reconnaître que dans ce travail, il est présenté pour la première fois de manière scientifique, et que c’est précisément l’Allemagne qui l’a accompli. Quiconque souhaite encore se battre contre le socialisme devra faire face à Marx, et s’il y parvient, il n’a vraiment pas besoin de mentionner le dei minorum gentium. ["Dieux d’une souche moindre; » signifiant, célébrités de moindre stature.]

Mais il y a un autre point de vue qui intéresse le livre de Marx. C’est la première œuvre dans laquelle les rapports réels existant entre le capital et le travail, dans leur forme classique telle qu’ils ont atteint en Angleterre, sont décrits dans leur intégralité et de manière claire et graphique. Les enquêtes parlementaires ont fourni suffisamment de matériel à cet effet, couvrant une période de près de quarante ans et pratiquement inconnue même en Angleterre, des documents traitant des conditions des travailleurs dans presque toutes les branches de l’industrie, du travail des femmes et des enfants, du travail de nuit, etc.; tout cela est ici mis à disposition pour la première fois. Ensuite, il y a l’histoire de la législation sur les usines en Angleterre qui, depuis ses débuts modestes avec les premières lois de 1802, a maintenant atteint le point de limiter le temps de travail dans presque toutes les industries manufacturières ou artisanales à 60 heures par semaine pour les femmes et les jeunes de moins de 18 ans, et à 39 heures par semaine pour les enfants de moins de 13 ans. De ce point de vue, le livre est d’un grand intérêt pour tous les industriels.

Pendant de nombreuses années, Marx a été le « mieux calomnié » des écrivains allemands, et personne ne niera qu’il était inébranlable dans ses représailles et que tous les coups qu’il visait frappaient à la maison avec vengeance. Mais la polémique, qu’il a tant « traitée », n’était fondamentalement qu’un moyen de légitime défense pour lui. En dernière analyse, son véritable intérêt résidait dans sa science, qu’il a étudiée et réfléchie pendant vingt-cinq ans avec une conscience inégalée, une conscience qui l’a empêché de présenter ses découvertes au public sous une forme systématique jusqu’à ce qu’ils le satisfassent quant à leur forme et à leur contenu, jusqu’à ce qu’il soit convaincu qu’il n’avait laissé aucun livre non lu, aucune objection non considérée, et qu’il avait examiné chaque point sous tous ses aspects. Les penseurs originaux sont très rares en cette ère d’épigones; Si, cependant, un homme n’est pas seulement un penseur original, mais dispose également d’un apprentissage inégalé dans son sujet, alors il mérite d’être doublement reconnu.

Comme on pouvait s’y attendre, en plus de ses études, Marx est occupé par le mouvement ouvrier ; il est l’un des fondateurs de l’Association internationale des travailleurs, qui a été au centre de tant d’attention récemment et a déjà montré dans plus d’un endroit en Europe qu’il s’agit d’une force avec laquelle il faut compter. Nous ne nous trompons pas en disant qu’en cela, du moins en ce qui concerne le mouvement ouvrier, l’élément allemand – grâce précisément à Marx – occupe la position influente qui lui est due.

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L
Un livre fort intéressant que je conseille pour lire Marx est celui d'Etienne Balibar ! Il est à la fois court et introductif :)
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