INDOPACIFIQUE / La géostratégie française : ses enjeux
LA FRANCE, PUISSANCE IMPLIQUÉE DE L'INDOPACIFIQUE
Enoncée en 2019, la géostratégie française en Indopacifique vise à renforcer l’action de ses forces de souveraineté et de ses forces de présence, à contribuer activement à la lutte contre la prolifération, à œuvrer au renforcement des institutions régionales et de ses partenariats, à consolider l’autonomie stratégique de ses partenaires d’Asie du Sud-Est et à contribuer à la politique d’anticipation sécuritaire environnementale. Il s'agit d'une approche inclusive et stabilisatrice, fondée sur la règle de droit et le refus de toute forme d’hégémonie.
DES INTÉRÊTS STRATÉGIQUES LIÉS À NOS TERRITOIRES
Sept des treize départements, régions et collectivités d’outre-mer français sont répartis entre l’océan Indien et le Pacifique Sud. Ils abritent 1,6 millions de ressortissants français et confèrent à la France neuf des onze millions de km² de sa zone économique exclusive. La France entretient en outre, et au même titre que ses partenaires européens, des liens d’interdépendance économique vitaux avec cette région traversée par des routes commerciales maritimes reliant les plus grands ensembles démographiques et économiques du vingt et unième siècle.
UNE PRÉSENCE PERMANENTE AU SERVICE DE LA SÉCURITÉ ET DE LA STABILITÉ INTERNATIONALE
L’Indopacifique est une réalité opérationnelle pour le ministère des Armées. La région est divisée en cinq commandements militaires, répartis entre trois forces de souveraineté (FAZSOI, FANC, FAPF) et deux forces de présence (FFEAU, FFDj). Ces commandements régionaux interarmées représentent un total de 7 000 personnels déployés de façon permanente, auxquels s’ajoutent ponctuellement 700 marins en mission. Ce dispositif, que complète un réseau de 18 attachés de défense, assure un maillage géographique permettant de veiller à la protection et à la sécurité des ressortissants et des territoires français, de contrôler notre ZEE et de participer aux activités de coopération de défense dans tous les domaines.
L'INDOPACIFIQUE, THÉÂTRE DE MUTATIONS STRATÉGIQUES D'AMPLEUR
L’Indopacifique est le théâtre d’évolutions stratégiques d’ampleur, lesquelles ont des conséquences directes sur l’ensemble de nos territoires et de nos intérêts, ainsi que sur ceux de nos partenaires.
UN DURCISSEMENT DE L'ENVIRONNEMENT MILITAIRE
La rivalité stratégique opposant la Chine et les Etats-Unis structure les dynamiques sécuritaires dans cette région, où elle oblige les Etats à composer avec de nouvelles menaces et influences. De nombreux régimes ont notamment investi dans le renforcement de leurs capacités de défense, induisant un durcissement de l’environnement militaire. Ce durcissement remet en cause les équilibres capacitaires régionaux et redéfinit les marges de manœuvre dont disposent les Etats. Il porte en lui la potentialité d’escalades rapides et difficilement contrôlables. On constate par ailleurs l’affermissement d’une multipolarité nucléaire militaire dont le centre de gravité est désormais situé en Indopacifique.
DES MENACES TRANSNATIONALES QUI PERDURENT
A ces évolutions s’ajoutent l’endurance de menaces transnationales telles que la piraterie, la pêche illicite, la criminalité transnationale organisée, l’immigration illégale et le terrorisme djihadiste. L’ensemble de la zone Indopacifique est également exposée à un risque sécuritaire accru du fait du réchauffement climatique.
DES ATTEINTES À L'ORDRE INTERNATIONAL MULTILATÉRAL FONDÉ SUR LE DROIT
Dans ce contexte sécuritaire dégradé, on constate, enfin, un délitement du multilatéralisme et de l’ordre international fondé sur le droit. Les grands compétiteurs stratégiques sont incités à recourir à l’action unilatérale. La possibilité de révoquer tout engagement jugé trop contraignant et la volonté de diminuer les ressources allouées aux instances multilatérales remettent en cause la crédibilité des efforts multilatéraux. Dans l’ensemble de la zone, le déficit de régulation et l’absence de consensus multilatéral sur les conditions d’accès et d’utilisation des espaces communs facilitent l’exercice des rapports de force entre États, ou à l’encontre d’acteurs non-étatiques. Enfin, les architectures régionales de sécurité dans l’océan Indien, en Asie et dans le Pacifique demeurent fragiles, en dépit d’importants efforts consentis.