La Philosophie à Paris

BECK & DeLILLO / La société post-moderne du risque et de la catastrophe humaine

10 Janvier 2016, 00:18am

Publié par Anthony Le Cazals et M. V. (documentation Enora)

Ulrich Beck et Don Delillo ont écrit des ouvrages de la seconde modernité, comprenez, post-modernes en ce qu'ils entérinent la fin des grands récits et la perte de repère que l'on nomme techniquement en philosophie le désastre, l'absence de point fixe que serait un astre). On prendra ici en référence La société du risque de Beck et Bruit de fond de Delillo. La seconde modernité c'est la modernité réflexive qui tente d'anticiper ses effets pervers contrairement à la précédente productiviste et consumériste. Paris 8hp

 

1°) Beck et la sociologie du risque
Beck développe une vision plus globale basée sur un cosmopolitisme méthodologique. Pour lui, les états tendent à présenter toute situation, toute décision sous la forme d'une alternative entre une solution sûre et une solution risquée. Pour ce faire, il y a toujours la dimension d'une catastrophe inéluctable qui est mise en avant comme par exemple avec le réchauffement climatique ou la pollution présentée colme grandissante. La pensée de Beck est une sociologie politique de la connaissance qui montre que derrière tout débat il y a l'influence des effets pervers, non-intentionnels et non prévus d'une catastrophe. Par exemple on peut penser à une épidémie (Ebola, grippe aviaire....), le nauffrage d'un pétrolier (Exxon Valdes, Erika....), une explosion nucléaire (Tchernobyl, Fukushima). Sa vision est avant tout post-moderne. Il est l'inventeur du concept de Société du risque, cela veut dire que la production économique de richesses est inséparable de la production sociale du risque. Ils s'intéressent aux catastrophes d'origines humaines et à la violence endémique de la société européenne pour Beck et américaine pour DeLillo. Dans les deux cas, la catastrophe n'est plus extérieur comme dans les sociétés pré industrielles (comme avec le tremblement de terre de Lisbonne). Ce risque est à présent géré par des normes et est garanti par le système lucratif de l'assurance. Au contraire, les risques de la société post-industrielle sont fabriqués socialement, ils sont internes à la société et non pas externes ou comme provenant du déchaînement de la nature. Nous allo ns le voir mais nous sommes passez du déluge au désastre. De la peue du récit biblique à la disparition de son emprise (post-modernité). Ils présupposent la prise de conscience d'une catastrophe dont la probabilité est prédictible. Leur probabilité est infime mais les risques, leurs conséquence sur le long terme encourus sont énormes. Beck en parle de manière centrale dans la Société du risque, pour De Lillo cela est sous-jacent mais n'en donne pas moins le titre. "Bruit de fond" parle de l'angoissse de la mort au sein d'une famille. .... et de la possible implosion de celle-ci du fait d'un évènement interne, qu'on pourrait appelé la catastrophe. Ainsi ces deux oeuvres sont complémentaires et donnent une vision globale d'une société post-moderne où le risque est latent, toujours menacée d'une probable catastrophe. De Lillo aborde cela en toile de fond après avoir décrit la saturation médiatique de nos vies, la consommation sans frein, le désir de nouveauté. La catastrophe est chez lui le risque de désintégration de la famille. L'un aborde la catastrophe d'un point de familial, l'autre d'un point de vue socile. Mais encore une fois, dans les deux cas la catastrophe est interne, c'est-à-dire d'origine humaine. Les sociétés du risque ne sont pas des sociétés gouvernées par la catastrophe mais par l'appréhension de la catastrophe humaine car on ne peut s'assurer de son risque.

 

 

 

BECK & DeLILLO / La société post-moderne du risque et de la catastrophe humaine

2°) De Lillo et le romn de la catastrophe
Dans le début du livre The white noise ou le bruit de fond (qui évoque la radio fonctionnant sans interruption déversant son flot de nouvelles), De Lillo aborde de face la vulnérabilité propre aux sociétés du risque, apropos d'un collègue de Jack, il fait dire à ce dernier : "Il prenait soin d'éviter auto-critiques, équivoques, subtilités, vulnérabilité et, bien sûr, angoisses sophistiquées ... de tout cela il ne s'est permis que de garder un seul élément. La vulnérabilité." 

Vous pouvez télécharger une version trilingue de Bruit de fond ici !

Il dresse dès le premier tiers de son livre, le tableau d'une famile soumise à la peur de mourir, comme cela va se révéler patent au fur à mesure du livre. Dans la seconde partie du livre il y a la simulation d'une catastrophe : l'arrivée d'un nuage toxique suite à un accident. L'une des filles de Jack Gladney, le héros principal, lui raconte la simulation. Il se trouve que les sauveteurs ne sont jamais arrivés et que la radio les noyaient d'informations et de mesures à suivre. Dans la troisième partie, Jack, qui a été exposé un court moment au véritable nuage toxique développe une angoisse de la mort. Sa femme, Babette, aussi à une angoisse de la mort et prend un médicament permettant de lutter contre la peur de mourir. Le roman bascule petit petit du roman domestique et familial au roman catastrophe. Bee,13 ans, est la fille de Jack et de son ex-femme Tweedy Bonner. Bee décide de venir voir sont père mais elle n'a jamais les autres enfants de Jack et Babette : Steffie, Denise et Wilder. Elle n'a vu Denise qu'une seule fois à Disneyworld. Bee est porteuse par son côté cosmopolite d'une situation d'inconfort puisque c'est elle qui génère une prise de conscience chez Jack ainsi que son côté auto-réflexif (propre à la seconde modernité comme nous l'avons vu avec Beck). Si à cela s'ajoute le nuage toxique , on peut comprendre cette phrase "je me réveille dans les sueurs de l'agonie, impuissant en face d'une terreur incontrôlable.

 

3°) On assure les déluges non pas le désastre

Le système économique de l'assurance qui a été mis en place conjointement au développement du capitalisme et des grandes traversée vers le nouveau monde, est incapable de palier à cette catastrophe désastreuse. Dans les sociétés post-modernes telles que décrites par ces deux auteurs le désastre est protéiforme, double : c'est à la fois la perte de repère (comme astre d'orientation) du fait de la fin des grands récits idéologiques et aussi le fait que l'on ne peut pas s'assurer de la catastrophe. Comprenez que la catastrophe est désastreuse. Le désastre (obscur) se retrouve chez des auteurs aussi variés que Beckett, Badiou, Blanchot (écriture du désastre) qui pour certain ont influencé Lyotard, le découvreur de la condition post moderne.

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