La Philosophie à Paris

TRANSFORMATIONS / La Substitution

18 Mars 2007, 00:58am

Publié par Anthony Le Cazals

Qu'est-ce que la substitution ? 

La substitution est une révolution discrète, Nietzsche par exemple en fait état quand il dit à propos de la mort de Dieu dont personne ne s'était aperçu, que les grands évènement arrive toujours sans bruit. La substitution est un certain renversement de valeurs qui se fait sans fracas mais contamine et sécrète dans toute la société. On retrouve la substitution chez Merleau-Ponty quand dans Le visible et l'invisible, il parle de conversion du langage. On la retrouve quand Foucault parle de rupture épistémologique entre différentes strates empirico-historiques (les "positivités") mais qui sont en fait la substitution de régimes de pouvoir et de savoir (qui tiennent du registre discursifs qui se superposent ou plutôt se juxtaposent dans le temps). Au fond il n'y a que les révolutions symboliques (comprenez scientifiques) qui marchent, toutes les autres trahissent. Qui s'est aperçu que les nouvelles technologies qui bouleversent notre paysage quotiden étaient issu de ce que la physique quantique s'était jouée de toute répresentation, et avait subsistué à la représentation, via les technoligies de l'information qui la surcodent, un nouvel ordre polycentrique, rhizomatique. Au niveau politique, le renversement de régime est bien la mise en place d'un régime tout aussi violent (dès lors qu'il souhaite imposer une prétendue "égalité" tout en réservant des privilèges à ses aparatchiks). Toute révolution a sa Terreur (guerre contre les contre-révolutionnaires) et ses Thermidoriens (bourgeois qui se détachent du "Peuple" qui les a fait souverains, Peuple et notables allant de paire).


Mais la substitution, c'est avant tout une révolution discrète, comme le disait Deleuze à propos de son propre parcours de pensée. il suffit de voir combien Mille Plateaux fonctionne sur le mode du troisième terme (ca  un nom chez les stoïciens mais je l'ai oublié, cela correspond à "ni..., ni..., mais..."). La substitution opère un glissement, une dérive qui, de limites repoussées en limites repoussées, nous fait finalement franchir un seuil sans que l'on s'en rende comptent, puisque cela tient de données générationnelle (les adultes n'évoluent guère dès lors qu'ils ont un statut, mais dans une société les adultes se substituent les uns ux autres). Un exemple de substitution est le passage du genre au sexe , de la société faite de communauté vernaculaires à une société d'indicidus, encore que la différence est très tranchée. Ce n'est Il ne s'agit nullement d'un réformisme qui se substituerait à la révolution, car il n'y a rien de légal là-dedans, on est dans le registre du tacite, du la discrétion. La substitution par les nouveaux domaines qu'elle ouvre, par les nouvelles régions souvent peuplées d'intensités inouïes qui s'approchent, est presque inévitable dès lors que ce sont des processus qui délirent sans que le discours abstrait ne puisse intervenir. Pour Lacan ce seraient les noeuds borroméens, c'est-à-dire le fonctionnment en vase-clos de ce qu'il désigne par les trois lettre RSI, (réel, imaginaire et symbolique). Les noeuds borroméens sont abstraits contrairement au noeuds de marins qui eux ont toujours un bout de corde qui dépasse, que sont concret. Dire pour un psychanalyste que les noeuds arrêtent les délires, c'est dire que le psychanalysé se met en tête des schèmes symboliques et par là arrête de délirer sur son imaginaire. Mais par là ce serait aussi accepter sa propre névrose plutôt que de sublimer par substitution, de gentiment délirer, sur ce qui est possible d'arriver.

 

 

"...songer au Wittgnestien de la fin du tractatus : il faut se taire sur ce qui ne se laisse pas dire ; il faut montrer ce sur quoi on ne peut que se taire ... Wittgenstein aurait raison, si seulement ce dont on ne peut parler consentait à se taire. Le point c'est qu'il n'y consent pas, L'inconsceint, c'est seulement cela." Jean-Claude Milner, L'oeuvre claire, pp. 167/169

 

 

Le principal moteur de la substitution est inconscient il est d'ordre des processus de contagion et de sécrétion dont nous auront l'occasion de reparler. C'est pour cela que l'une des dimensions joyeuses de la philosophie n'est pas la vérité mais l'importance (comme disait Platon, nous nous rendons malheureux parce que nous ne savons ce qui a de l'importance), l'importance de relever ce qu'il y a de tacite dans les changment d'une époque pour accentuer dans les processus et les tendances en émulsion (= qui coexistent malgré eux). Subvertir un système au fond c'est s'en détourner, comme dominique Latour qui parle de ces techniques qui modifient les rapports de pouvoir, les pouvoirs s'appuyant sur des techniqued souvent propres au discours. On peut penser à la façon dont Foucault parlait du peuple, de la "plèbe", en en faisant pas un sans-fond, un substance d'où émergerait une souveraineté, mais une échappée, dans les droites lignes de ce que Deleuze appelait des lignes de fuites "créatrices". Il y a là quelque chose d'efficient, d'effectif, de créateur que le pouvoir ne peut nier. Le pouvoir essayera de le capitaliser en un discours ces nouveaux investissements, mais quelque chose devra lui échapper sinon il s'épuiserait. ...


Pour continuer le frayage : lire la substitution des blogs d'information à la presse ou si vous voulez d'internet à l'imprimerie, l'un ne remplaçant pas l'autre mais ce substituant au premier comme espace de liberté : il s'agit là d'une substitution concrète car bruyante non la substitution discrète d'une forme de pensée ou d'un regime, par un(e) autre. Les plus grands bouleversements sont ceux que l"on aperçoit pas parce qu'ils arrivent sans bruit et si on ne les aperçoit c'est que l'on est pris pas ses a-priori historiques (éducation étatique) ou vernaculaires (éducation familiale ou habitus d'un milieu social d'origine)

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