PROVOQUER / Lettre à l'école doctorale
En arrivant à Paris 8 en février, j’ai découvert une chose que je ne pensais pas existante : la liberté. C’est de la liberté donc que je vais usé ici simplement pour rendre un hommage à nos aînés de Vincennes. A la Sorbonne ce mail aurait été tout bonnement censuré mais à Paris 8 c’est serait le comble car c’est à la liberté à laquelle on est invité. Et même il faut en profiter parce que l’autonomie de Paris 8 va en diminuant, pensons aux futurs radiations de fonctionnaires et donc d’enseignants de l’après 2007.
« Socrate » a dit, dans le Phèdre : « Les plus grands biens sont arrivés à la Grèce grâce à un délire (mania) ». Platon ajoute ailleurs : « des biens qui nous échoient, les plus grands sont ceux qui nous viennent par le moyen d'un délire ». Eh bien à Paris 8 et plus particulièrement à l’école doctorale ça ne délire plus beaucoup. L’article de l’Humanité qui titrait qu’au département de philosophie il ne se passe rien, avait sans doute raison. Il suffit de voir la nostalgie qu’il y avait au colloque sur Gilles Châtelet, qui d’ailleurs ne portait pas réellement sur lui. C’est pourquoi la venue cette année de Mr Prado et plus particulièrement celle de Mr Loraux, l’année prochaine ne doit rien au hasard. J’invite les présents lecteurs à avoir de la curiosité, non dans ces personnes mais dans ce qui les traversent.
Le dispositif même du jury tend chez le candidat à produire de l’ego. Aussi je me permets donc de secouer le cocotier et de dire que l’école doctorale s’est planté. Je ne sais au fond ce qui était jugé. Sans doute « mon » projet de thèse était jugé trop pluridisciplinaire pour avoir parler de physique quantique et ne pas avoir bassiné le jury avec la théorie de l’éternel retour qui est son pendant philosophique et qui est porteuse d’une certaine manière d’un « sens » sélectif. Concrètement, sur les 16 candidats en phase final à l’allocation de recherche, il y avait 8 étudiants en philosophie dont trois ont obtenus la bourse. Reste 6 étudiants pour 3 places au rattrapage à l’automne. Il ne fallait nullement avoir un sujet pluridisciplinaire et pouvoir argumenter sur la différence de sujet entre mémoire de master et thèse.
J’avoue ici avoir plagié les cours de Mr Loraux et les écrits de Mr Badiou (respectivement le catalyseur et le dépeupleur de la philosophie actuelle). Les cours de monsieur Loraux portant sur le devenir collectif de la pensée contemporaine en rapport avec les philosophies antique de Platon et Aristote. Quant à Mr Badiou si celui-ci en a encore l'énergie, le troisième tome de l’être et l’événement devrait porter non plus sur le réel et le possible c’est-à-dire les dimensions ontologique et logique de sa philosophie mais sur le concept de capacité qui est la dimension de la méta-ontologie. La capacité est ce que Badiou nomme sujet mais le capable est précisément ce qui biaise le rapport faussé ou trop convenu du possible et du réel.
Aussi, après cet aveu de plagiat, je certifie présentement que Ciprian Cepoi, lui, n’a rien plagié et que l’école doctorale a la possibilité de se rattraper à l’automne. Son projet de thèse sur la « déresponsabilisation » est très intéressant. Il est dans une moins grande liberté financière que le présent auteur de ce mail donc ne gaspillez pas toutes vos cartouches.
Mr Prado je voulais que vous vous souveniez de votre première année (de retour) à Paris 8 simplement parce que trop de profs y dépriment alors que je n’ai jamais vu autant de possibilités de liberté. L’un sans doute oblige l’autre. A un moment donné il faut savoir passer par ce qu’on appelle la nécessité ou l’exigence de création c’est-à-dire s’est trouvé face à une impossibilité.
MM Poulain et Douailler, une réponse même courte aurait été la bien venue quant au séminaire « Deleuze et le devenir philosophique de la pensée contemporaine », les jurys d’allocation de recherche étant passés, n’ayant plus de poulains à défendre, je ne vois pas ce qui vous retiens de la donner, même négative.
Si ce mail avait blessé ou outré une personne, s’excuser serait hypocrite, nous rappelons juste que la philosophie naît non d’un étonnement face au monde (posture égotiste) mais d’une rencontre violente (posture impersonnelle). Ce qui importe à présent ce n’est pas le sens qu’on peut donner au monde (toujours langagier) mais les signes ou particules qui nous parviennent (toujours corporels et donc parfois strictement langagiers). C’est la médiocrité conduit à des antagonismes, comme le montre la théorie sur la hiérarchie des rats. De même toute révolution de dominés ne fera que produire des dominants, c’est précisément être en capacité (ou devenir autonome) qui importe, ce qu’à indiquer une fois Spinoza et une seconde fois Nietzsche. C’est un effort à faire sur « soi », son inconscient, pour ne pas ramener à « moi », le je fêlé de la blessure narcissique. Aussi joins-je à ce mail un début de transfiguration de la blessure narcissique issu de mon passage au jury d’allocation de l’école doctorale dont une possible thèse à Paris 8 sera l’aboutissement.
L’un de mes profs dit que le génie est celui qui fixe ses propres règles (cf. autonomia), j’espère qu’un jour il n’emploiera plus ce terme. Ce jour-là alors, à Paris 8, aura surgi une nouvelle capacité ou subjectivité, celle que précisément Foucault et Deleuze ont mis tant en avant, nos aînés.
Il ne sera donner aucune suite à ce mail égotiste simplement parce que le bruit efface ce qui nous importe à savoir la pensée et sa libération. A la question, l’homme peut penser mais en est-il capable la réponse est nullement, car c’est une affaire d’agencement collectif, de milieu propice. Le coup ne peut-être asséner qu’en une fois. Comprend ou prend peur qui voudra mais le tri ce fera ainsi, non par un jury.