823. La voie indienne.
Jusque là nous avons beaucoup parlé des valeurs de l’Occident, restent l’Inde avec sa société de castes. Il existe bien une autre voie vers le Surhomme qui ne soit pas occidentale mais indienne. Cette voie indienne peut se résumer en deux noms : Jiddu Krisnamurti, en déblayeur des valeurs endormies par la routine, et Sri Aurobindo, en promoteur d’une hors-la-conscience plus cellulaire. Ce dernier concentre son intention et sa volonté loin de toute décision et loin de toute précipitation. Il n’a pas été compris de tous ses disciples, peut-être simplement parce que le surhomme ne se vit pas en communauté. C'est toujours la part faible qu’une communauté conserve, comme les Grecs ont vu si souvent les maladifs se regrouper en école philosophique. « Efforcez-vous … » Telle est, comme Nietzsche le relève, la dernière phrase de Bouddha à ses disciples, à l’opposé de l’ascétisme bouddhique attendu. Cette phrase clé, imprégnée d’un grand mystère, cherche à corriger une sorte d’affaissement nirvanesque qui préfère la paresse à l’effort de concentration. En somme, disait-il, exercez-vous et le lapsus viendra, vous ne ferez pas comme moi mais vous me dépasserez, ce dont il était moins sûr. Envoyez-moi de la joie et je vous en enverrai tout autant. Mais en Inde jusqu'alors, cela n'a pas été possible : Bouddha et Gandhi étaient porteurs d'une force émancipatrice — contre les religions védique et jaïniste, pour Bouddha, contre l'impérialisme colonial, pour Gandhi. Cette force émancipatrice n'était pas explosive ou libératrice, car elle s'est très vite recentrée dans les mains d’une oligarchie (gouvernance) — celle que défendaient déjà Platon et Aristote en méprisant les hommes et la vie sous le jugement d'être tous corrompus. Bouddha et Gandhi tous deux étaient issus de la caste oligarchique et furent mariés très jeunes. De nos jours, la société indienne reste une société de castes tout en profitant des avancées technologiques opérées grâce à la physique quantique. Il y est même plus facile de communiquer que d’avoir de l’eau potable.