La Philosophie à Paris

LES SIGNES D'UNE PHILOSOPHIE A VENIR / La brèche

3 Février 2008, 10:00am

Publié par Le Cazals

Le principe de la brêche : "il faut aller la où personne ne va".

Partons de l'idée que la vie procède par mutation et par hasard. On continue sur la même lancée que le texte sur l'éperon de la vie (ou hormesis). Je pourrais développer un peu plus l'antinomie entre systèmes statiques (la philosophie comme "hobby" métaphysique, qui est au fond une manière de ne pas prendre de risque et de se mettre à l'abri des événements) et les systèmes émergents ou dynamiques qui ne sont jamais bouclés, car la richesse d'une vie de philosophe est nécessaire pour les expliquer, en contre-point. C'est un petit pied de nez à Wlatzinblack.

Qu'est-ce que la brèche ?

Le principe de la brèche : "il faut aller la où personne ne va".

1°) Se tenir sur la brèche / faire la brèche

Être sur la brèche ou mieux encore s'y tenir, ce n'est pas être sur la schize. La
schize c'est la différence entre un actuel et un virtuel mais qui au fond préfère la fuite à l'effort ou au conflit, c'est cette position au bord de la société où l'on peut se tenir et l'observer avec un regard critique (posture du schizo). Se tenir sur la brèche c'est se tenir à l'affût, être aux aguets prêt à bondir, prêt aussi à entrer en conflit comme le guerrier, mais c'est surtout s'acharner au travail en tenant la même ligne de conduite (qui peut être justement celle de changer sans cesse de point de vue). Combattre , se dépenser jusqu'à ce que vienne l'heure du repos, celle du repos du guerrier.

Faire la brèche, suivre cette ligne de vie, par intuition, ruse (metis), sagacité (phronesis), opportunité, c'est se détacher de tout principe de minorité qui lui renvoie toujours à une majorité. Comme le dit si bien Zizek "résister, c'est déjà capituler", en somme être minoritaire, c'est déjà manquer d'affirmation... Faire la brèche c'est produire une émergence.

2°) Systèmes cohérents et systèmes émergents

Les systèmes cohérents sont de l'ordre du symbolique, ils confondent souvent l'abréviation du singe (symbole ou la dite "puissance de la lettre") avec le signe lui-même. Si l'émergence quant à elle ne vise pas avant tout la cohérence mais la brèche, c'est que le non-sens révélateur de sens est plus que tout porteur de valeur. Parler de non-sens c'est encore être enfermer dans une vision dépréciatrice.
C'est pourquoi, pour prendre un exemple interne au système de reconnaissance philosophique (
l'Institution), François Zourabichvili se trompait lorsqu'il voyait dans l'agrégation, le critère capable de désigner la communauté des philosophes. Mais combien, cette agrégation est grégaire, combien tous se dirige vers l'enseignement qui n'est pas la pratique (ou tout au plus la pratiques des textes avec souvent un manque de philologie certain). Cette remarque quant à Zourabichvili est d'autant plus flagrante, que contre toute moralité, il n' a même pas survécu au sein du système dont il héritait : plus précisément il n'a pas survécu face à l'inhumanité où le plaçait Badiou, tout en se coupant et de Nietzsche et de Bergson (c'est-à-dire par deux fois de schopenhauer). C'est précisément hors de l'institution que les choses se jouent, sur la brèche. plus encore que sur le métier (d'enseignant)


3°) La brèche entre le pathétique et le dynamique

En chaque chose, il y a du pathétique et du dynamique, de la conservation et de la dissipation ou dispersion. Le pathétique comme le dit Kierkegaard est ce qui ressort d'un choix de conscience d'un "ou bien ... ou bien ..." (voir à ce titre "Ou bien ... ou bien" de Kierkegaard). Mais au-delà de cette opposition entre conservation et de la dissipation, il y a la création. Cette création de valeur qui en philosophie se traduit par delà la conscience de soi et l'oubli de soi par l'affectation de soi par soi. A travers la conscience de soi et l'oubli de soi on retrouve deux processus mis en avant des les années 60-70, à savoir les processus de subjectivation et de dépersonnalisation, le pathétique et le dynamique se sont manifestés sous la forme de ces processus, mais la brèche est précisément l'oscillation entre les deux.

Cette oscillation par-delà l'être et le devenir, la forme et le flux se rapproche de la philosophie du neutre de Blanchot (du "ni ceci ni cela"), qui n'est qu'une reprise du "ni ... ni ..." stoïcien, lui-même issu d'Héraclite quand il disait que "la nuit et le jour c'est la même chose...", et que ce qui entre en conflit est avant tout la marque d'une affinité plus large entre les deux (pensons aux gendarmes et aux brigands, pensons au film de Scorcese les infiltrés). De manière plus pragmatique et économique (comme nous l'avions dit avec l'éperon), ceux qui entrent en conflit ne seront pas les véritables vainqueurs, c'est toujours un tiers qui en sort gagnant, car les "belligérants" épuisent leur forces et sortent amoindris du conflit. Boston, puis New York sont devenus les centre du capitalisme un fois que l'or s'est échappé d'Europe, chaque fois que l'Allemagne et la France et le Royaume-Uni sont entrés en guerre. Même chose pour le premier empire d'occident, Alexandre mis fin à l'hellénisme (fin que déplora Aristote sur son lit de mort, lui qui avait enseigner à Alexandre) en fusionnant l'Empire perse et les cités grecques qui y résistaient.


edition du 10/02/08 16:00


SIGNES D'UNE PHILOSOPHIE A VENIR / L'émergence
SIGNES D'UNE PHILOSOPHIE A VENIR / La brèche


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